Kurt Cobain, 30 ans déjà

Les quelques égaré·es né·es un 5 avril doivent vivre depuis 1994 avec l’idée que leur anniversaire sera toujours éclipsé par celui de la mort de Kurt Cobain. Cette année sera plus que jamais le cas, la cartouche du fusil Remington M11 ayant...

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Les quelques égaré·es né·es un 5 avril doivent vivre depuis 1994 avec l’idée que leur anniversaire sera toujours éclipsé par celui de la mort de Kurt Cobain. Cette année sera plus que jamais le cas, la cartouche du fusil Remington M11 ayant traversé la tête du natif d’Aberdeen, Washington, fêtant ses 30 ans. C’est qu’on les aime, les chiffres ronds. Ils disent quelque chose de la manière dont la mémoire est affectée par le temps.

La relève

Comme avec toutes les icônes de la culture populaire disparues trop tôt, on a longtemps cherché qui était l’héritier de Kurt Cobain chez les emo kids du rap (de Lil Uzi Vert au démoniaque XXXTentacion), jusqu’à l’apparition de Billie Eilish, en qui un type comme Butch Vig, producteur de l’album Nevermind, a vu les reflets de Kurt. En 2021, il nous confiait : “Elle exprime son anxiété de l’époque dans laquelle elle vit et se situe à un niveau émotionnel qui cause directement aux gens qui la suivent, parce qu’ils sont précisément comme elle. C’est exactement ce qu’il s’est déroulé avec Nevermind. Preuve que le dispositif en power trio de Nirvana n’était qu’un support dynamique pour exalter un dégoût, et non une doctrine rock formelle.

Néanmoins, il peut se passer plus en trois ans qu’en trente. C’est ainsi qu’en 2024, la question de la réincarnation de Kurt Cobain dans la peau d’un individu cristallisant tous les reflux de l’époque nous semble soudainement nulle et non avenue. Tout est plus diffus, mouvant, asymétrique. Un disque paru ces jours-ci documente ce glissement de paradigme : CD Wallet, de Homeshake. Mon disque préféré de l’année so far. La pochette – une piaule bordélique d’ado tardif jonchée de fringues, de CD et de bouquins – est grunge. La photo aurait pu être prise en 1994, mais il y a aussi des chances pour qu’elle ait été shootée hier.

Éternelle adolescence

La musique, quant à elle, tranche avec les albums précédents du Canadien, plus axés sur les synthés. Ici, Peter Sagar (son vrai nom), sort les guitares slowcore de son adolescence 90’s passée dans les environs de sa bourgade d’Edmonton, capitale de la province de l’Alberta. Mac DeMarco vient de là-bas, lui aussi. Le geste est donc nostalgique, comme le coup d’œil dans un rétro dévoilant un paysage familier, mais étrange. Dans un entretien accordé au magazine culturel Range, il explique que CD Wallet a été “réalisé dans un style indie rock heavy et simple, pour impressionner l’ado qu[‘il] étai[t]” : “Quelques chansons évoquent des événements spécifiques, mais la plupart sont la réminiscence de l’époque de mon enfance, quand je me saoulais derrière une benne à ordure. Rien de très profond là-dedans.

Trente ans après sa mort, Cobain n’est plus le Christ qu’on a bien voulu faire de lui et qu’il vomissait, mais une tronche de plus sur un poster dans la chambre de Peter Sagar et de tous·tes les gosses se souvenant d’abord du quotidien plombé d’une enfance passée dans la décennie 1990.

Édito initialement paru dans la newsletter musique du 5 avril 2024. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !