La vaccination est obligatoire pour les soignants en Italie et voici comment ça se passe
CORONAVIRUS - Les soignants bientôt tous vaccinés sans exception? Alimentée par les craintes autour du variant Delta, l’idée d’une vaccination obligatoire du personnel soignant fait son chemin en France et le gouvernement se penchera sur la...
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CORONAVIRUS - Les soignants bientôt tous vaccinés sans exception? Alimentée par les craintes autour du variant Delta, l’idée d’une vaccination obligatoire du personnel soignant fait son chemin en France et le gouvernement se penchera sur la question si besoin à la rentrée. Avec sans doute dans son rétroviseur l’exemple de l’Italie qui a tranché: là-bas, c’est le vaccin ou les sanctions.
“Très franchement, j’étais contre l’obligation et il me semble que maintenant on a atteint le niveau où on doit l’envisager”. Ce mercredi 30 juin, le président du Conseil Scientifique Jean-François Delfraissy a revu son avis sur l’obligation pour les soignants d’être vaccinés. Il plaide même pour que cela aille très vite pour “anticiper” une éventuelle quatrième vague de Covid-19 en septembre. Avant lui, le ministre de la Santé Olivier Véran avait défendu l’idée, “si la vaccination du personnel soignant est insuffisante” en septembre, ajoutant que cette vaccination obligatoire est déjà à l’œuvre pour certaine maladie comme l’hépatite B. Jean Castex a lui fixé un objectif de vaccination dès “la fin du mois d’août” pour “tous les personnels d’Ehpad”.
Pourquoi maintenant? Pour prévenir des situations telles que celle des Landes, où sur sept clusters identifiés, deux l’ont été dans des Ehpad. Avec pour au moins un des deux un traçage qui a permis de remonter jusqu’à un membre du personnel soignant non vacciné. En Italie, c’est une situation similaire qui a amené sur le tapis la vaccination obligatoire qui est désormais en vigueur dans certains territoires.
Moins de 3% de soignants non vaccinés en Italie
Fin mars, une dizaine de patients a dû être hospitalisée dans la région de Ligurie après qu’un membre du personnel hospitalier qui avait refusé le vaccin a ” inconsciemment introduit le virus”, ont conclu les autorités de santé après une enquête. Immédiatement, le président de la région a déclaré qu’il jugeait “utile de faire quelque chose pour rendre obligatoire (le vaccin des soignants, NDLR) pour la protection des patients.” Mais comme il l’a rapidement souligné, ce pouvoir n’appartient pas aux régions, mais au gouvernement.
Son appel n’est pas passé inaperçu. Dès le 26 mars, il a reçu le soutien du Premier ministre Mario Draghi, lequel a jugé “absolument inacceptable que du personnel sanitaire non vacciné soit en contact avec des malades”. “Le gouvernement a l’intention d’intervenir”, a-t-il annoncé, et ce, même si le nombre de soignants non vaccinés était ” résiduel […] très réduit”, selon le ministre de la Santé le même jour. En date du 27 juin, seulement 2,19% du personnel n’avait reçu aucune dose, selon les données gouvernementales.
À titre de comparaison, en France, le 29 juin, 44% du personnel des Ehpad ont une couverture vaccinale complète (57% de primo-vaccinés). Hors Ehpad, Santé Publique France évoque un “plafond” dans la progression de la vaccination des soignants, avec un écart notable entre les médecins (72,2% de primo-vaccinés) et le personnel dit non-médical, comme les infirmiers et aide-soignants, où à peine plus de 50% ont reçu une 1ère dose. Soit des chiffres bien supérieurs à ceux répertoriés en Italie lorsque le débat a surgi.
Tâches “inférieures”, congés forcés ou suspension
Retour en Italie. Aussitôt l’alerte passée, Mario Draghi a annoncé fin mars que les ministères de la Santé, du Travail et de la Justice se penchaient sur le sujet.
Ils ont accouché le 1er avril d’un projet de loi -entré en vigueur le 10 avril- qui fait de la vaccination “une condition essentielle” pour “tous ceux qui ont affaire aux soins et à l’assistance des personnes”, un large spectre qui inclut les médecins, les infirmiers, les pharmaciens et tous ceux qui exercent des activités dans les établissements sanitaires et sociaux. Charge aux régions de vérifier le statut vaccinal des personnels concernés et de transmettre les données aux autorités sanitaires locales.
Après un 1er avertissement et un délai pour justifier d’une demande de vaccination (ou d’une dispense pour raisons médicales), les sanctions tombent. Un 1er palier prévoit que les soignants réfractaires sont affectés à des tâches “inférieures (...) qui n’impliquent pas de risques de propagation du virus”. Si cet arrangement n’est pas possible, ils peuvent être contraints de poser des congés. Enfin, dernier stade de sanction, la suspension sans solde “pour une durée adaptée à l’évolution de la pandémie”, mais avec une limite fixée au plus tard au 31 décembre 2021. Cette sanction peut être levée dès lors que la personne change d’avis.
“Je préfère ne pas avoir de travail que de me sentir victime d’un chantage”
La décision gouvernementale a divisé la profession. Certains syndicats y sont favorables, même s’ils redoutent la surcharge de travail pour le personnel vacciné en cas de suspensions trop nombreuses. D’autres y sont farouchement opposés, comme le secrétaire général de la Fisi. “Je préfère ne pas avoir de travail et rester pauvre plutôt que de me sentir victime d’un chantage pour un travail”, écrivait un infirmier dans une lettre adressée au président de la République Sergio Mattarella et au ministre de la Santé Roberto Speranza, relayée par l’agende de presse Ansa. “Je ne veux pas que mon corps devienne un objet d’expérimentation et j’ai de forts doutes sur la hâte avec laquelle le médicament a été testé”, avait-il écrit.
Cette notion d’expérimentation revient dans la plupart des discours des soignants opposés à la vaccination. “Ils nous ont soumis à un chantage et si nous ne voulons pas subir ce chantage, ils nous font passer de héros à propagateurs de la peste”, s’indignait aussi une infirmière lors d’une manifestation à Gênes fin avril qui a réuni plus de 300 personnes.
Ce mercredi 30 juin encore, un syndicat appelait à une grève symbolique de 12heures pour dénoncer plus particulièrement la suspension de travail et du salaire prévue par la nouvelle loi. Parmi différents arguments, ils soulignent notamment que si le vaccin protège des formes graves, son efficacité sur la transmission du Sars-Cov2 reste encore à documenter. Une étude britannique sur Pfizer/BioNTech et AstraZeneca parue fin avril montre cependant qu’une seule dose de vaccin réduit de près de moitié le risque de transmission dans un foyer.
Plusieurs recours - notamment pour inconstitutionnalité au nom du “respect des soins, de la sensibilité de chacun et de la liberté de choix” - ont été déposés pour contester la décision du gouvernement. En vain pour l’instant: les 1ères peines sont tombées fin juin, dans la région de Ligurie, où une vingtaine de professionnels a été suspendue jusqu’au 31 décembre.
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