La vague de Covid du variant Delta peut-elle submerger le "mur vaccinal"?

SCIENCE - Après des semaines d’alertes multiples, le gouvernement prend enfin la mesure du risque d’une 4e vague de Covid-19 en France, liée à la dominance du variant Delta plus contagieux.En effet, le nombre de cas de coronavirus ne baisse...

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SCIENCE - Après des semaines d’alertes multiples, le gouvernement prend enfin la mesure du risque d’une 4e vague de Covid-19 en France, liée à la dominance du variant Delta plus contagieux.

En effet, le nombre de cas de coronavirus ne baisse plus depuis plusieurs jours. Alors que le taux de positivité stagne, le taux d’incidence (nombre de cas pour 100.000 habitants) commence doucement à réaugmenter (+10% sur une semaine).

Si la tendance est encore frémissante, il est malheureusement probable, au vu de ce que le variant Delta a provoqué dans d’autres pays, que la courbe des cas continue d’augmenter petit à petit dans les semaines à venir.

Mais avec l’arrivée de la vaccination de masse, la situation n’est-elle pas différente? Une vague de cas entraîne-t-elle obligatoirement une saturation hospitalière comme nous l’avons malheureusement vu depuis 18 mois? Ce qui se passe aujourd’hui au Royaume-Uni permet de mieux cerner les enjeux et les incertitudes de cette situation si spéciale.

Décrochage hospitalier

Outre-Manche, le variant Delta venu d’Inde a pris pied plus tôt que dans l’Hexagone. Dès le mois de mai, il était clair que cette nouvelle version plus contagieuse du coronavirus allait écraser Alpha, l’ancien variant dominant découvert en Angleterre à l’automne 2020.

Fin mai, les chercheurs britanniques alertent: même si les chiffres sont bas, la 3e vague a démarré. Début juillet, le nombre de cas quotidien augmente jour après jour, dépassant les 20.000 alors qu’il était dix fois plus faible fin avril.

Mais la bonne nouvelle, c’est que la courbe des hospitalisations, qui suit d’habitude l’incidence à quelques jours près, semble avoir décroché, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous.

La vaccination, qui diminue le risque d’hospitalisation (avec une efficacité forte dès la 1ère dose), n’y est bien sûr pas étrangère. Comme le rappelle le chercheur Eric Topol, les hospitalisations augmentent avant tout chez les moins de 64 ans au Royaume-Uni.

Or, les catégories de population les plus vaccinées dans le pays sont les plus âgées. 9 personnes de plus de 50 ans sur dix ont déjà reçu leurs deux doses et sont protégés à plus de 90%. C’est loin d’être le cas pour les plus jeunes, comme le montre le graphique ci-dessous de l’agence de santé publique britannique.

Le taux de vaccination par classe d'âge au Royaume-Uni.

Rupert Pearse, médecin en soins critiques, expliquait sur Twitter fin juin que si la vague hospitalière arrivait, elle était d’une ampleur moindre que la précédente. Quand le Royaume-Uni comptait plus de 20.000 cas quotidiens en décembre 2020, plus de 1700 personnes entraient à l’hôpital chaque jour, contre moins de 400 aujourd’hui. 

Une vague reste une vague

Les plus à risque étant en grande partie doublement vaccinées, les cas de Covid-19 touchent des personnes développant en général des formes légères de la maladie. Mais il ne faut pas croire pour autant que tout va pour le mieux et que la pandémie est derrière nous. Quand on regarde les deux courbes, on voit tout de même que celle des hospitalisations augmente. Certes moins vite, mais elle augmente.

Il est parfois difficile de bien lire ces courbes exponentielles, qui donnent l’impression d’avoir du mal à démarrer pour finir par exploser. Le graphique ci-dessous montre l’évolution des deux indicateurs (incidence et hospitalisations) en pourcentages.

On voit clairement que l’incidence, en bleu, a une croissance plus importante que les hospitalisations, en jaune. Mais le problème, c’est que les hospitalisations augmentent doucement, en décalage de quelques jours avec l’incidence. Or, si celle-ci continue de grimper, qu’est-ce qui pourrait empêcher les hospitalisations d’atteindre, petit à petit, des niveaux problématiques pour le système de santé?

C’est justement cette question qui divise politiques et épidémiologistes au Royaume-Uni aujourd’hui. Le ministre de la Santé a affirmé dimanche 4 juillet qu’il allait falloir “apprendre à vivre avec le Covid”, rapporte le Guardian, alors que Boris Johnson a annoncé la levée prochaine des dernières restrictions encore en place, notamment la fin du masque le 19 juillet.

Une décision critiquée par plusieurs épidémiologistes membres du Conseil scientifique britannique, le Sage, car elle risque d’augmenter encore la croissance du nombre de cas quotidiens. D’autres estiment au contraire que les personnes entièrement vaccinées ont bien moins de risque d’être malades et qu’il est temps de lever des contraintes pesantes.

Comment arrêter une épidémie?

Le problème, c’est que même si le Royaume-Uni est un pays très vacciné, il n’est pas sûr que ce “mur de vaccin” sera suffisant pour endiguer le Covid-19 avant qu’il ne provoque des dégâts. Dans une récente étude, l’Institut Pasteur s’interrogeait sur le risque d’une nouvelle vague à l’automne en France, en imaginant une population très largement vaccinée, au moins aussi bien que le Royaume-Uni aujourd’hui.

Le résultat: si rien n’était fait pour contenir le coronavirus, une vague identique à la deuxième de l’automne 2020 pourrait survenir. Pourquoi? Car si aucune mesure n’est prise pour freiner à nouveau l’épidémie, elle ne s’éteindra qu’une fois un certain seuil d’immunité collective atteint. Et si nous ne l’atteignons pas via le vaccin, ce sera via les contaminations: avec les conséquences sanitaires qui en découlent pour les non-vaccinés.

La vague hospitalière décrite dans ce scénario sera beaucoup plus jeune (40% des cas de moins de 60 ans contre 25% par le passé). Ce qui conduirait à une situation différente en termes de mortalité - même si le modèle de l’Institut ne l’étudie pas en détail. “Dans le modèle, il y a plus de jeunes hospitalisés, qui survivent mieux, donc une mortalité plus faible. Mais la pression hospitalière serait toujours là”, rappelle Simon Cauchemez. “Et comme les plus âgés ne vont pas forcément en réanimation, il n’est pas certain que la vague serait moins importante”.

Face à ce constat, les chercheurs de l’Institut Pasteur précisaient que dans ce modèle, des mesures de restrictions relativement légères et touchant uniquement les non-vaccinés pouvaient facilement endiguer la vague. De la même manière, réussir à vacciner la moitié des non-vaccinés permettait également d’empêcher une saturation du système hospitalier.

En disant adieu à toute restriction, le gouvernement anglais prend le risque de laisser la vague hospitalière grossir doucement, mais sûrement. La bonne nouvelle, c’est que depuis la fin mai, le nombre de 1ères doses injectées chez les jeunes britanniques est en augmentation, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous réalisé par le professeur de mathématiques Oliver Johnson.

Reste à voir si les briques du mur de vaccins britannique s’assembleront suffisamment vite pour contenir la vague qui vient. Un cas d’école à suivre pour la France, qui risque de se retrouver dans cette situation bien trop rapidement. Dès la fin juillet, a alerté Olivier Véran.

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