Le Covid-19 révèle inégalités et abus de pouvoir, partout dans le monde
Un an et demi après le début de la pandémie de Covid-19, on ne peut qu’entrevoir comment l’équilibre de pouvoir a changé dans le monde entier, du niveau interpersonnel au niveau mondial. En revanche, le mécontentement quant à la répartition...
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Un an et demi après le début de la pandémie de Covid-19, on ne peut qu’entrevoir comment l’équilibre de pouvoir a changé dans le monde entier, du niveau interpersonnel au niveau mondial. En revanche, le mécontentement quant à la répartition du pouvoir est de plus en plus évident.
Partout, la pandémie a affecté la distribution, l’utilisation et la surveillance du pouvoir qui détermine le bien-être des populations. Le Covid-19 servant de prétexte à la centralisation et à la consolidation du pouvoir, la diminution de la confiance dans les systèmes de gouvernance et l’affaiblissement des contrats sociaux se répandent.
Les mesures d’urgence pour combattre le Covid-19 ont accéléré la détérioration des droits de l’homme et des libertés fondamentales –qui avait déjà commencé avant la pandémie.
Ce constat est apparu très clairement lors des récents dialogues régionaux menés par Southern Voice et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). En mai et juin, alors que les pays faisaient face à différents niveaux de l’épidémie pandémique, nous avons demandé à une poignée d’experts de chaque continent d’expliquer comment le Covid-19 a affecté les progrès vers l’Objectif de Développement Durable 16 (qui mesure la paix, la justice et l’inclusion). Plus précisément, nous voulions savoir comment la relation entre les populations et leurs gouvernements a changé à cause de la crise.
Nous avons entendu des récits similaires dans toutes les régions. Le Covid-19 révèle des inégalités extrêmes, et un impact dangereux de la pandémie sur la répartition du pouvoir.
Une 1ère tendance observée est l’abus de pouvoir légitime et le rétrécissement de l’espace civique engendrés par la pandémie. Selon CIVICUS, seulement 3,4% de la population mondiale vit dans des pays où l’espace civique est ouvert. Nous constatons maintenant que les mesures d’urgence adoptées pour combattre le Covid-19 ont accéléré la détérioration des droits de l’homme et des libertés fondamentales –qui avait déjà commencé avant la pandémie. Ces mesures, par exemple, sont parfois utilisées pour saper la dissidence, cibler les défenseurs des droits de l’homme et les médias, et éroder les institutions de contrôle –y compris les institutions judiciaires, législatives et les institutions nationales des droits de l’homme. Il convient de prêter attention à la nature des politiques qui ont réduit au silence les voix de l’opposition et attaqué les droits des minorités.
Deuxièmement, l’exclusion sociale est en train de semer les graines des conflits futurs. Elle est utilisée pour ôter tout pouvoir aux populations pauvres et marginalisées, et perpétuer les violations quotidiennes dont elles sont victimes. En favorisant la corruption à tous les niveaux et en encourageant la fragmentation politique, différents intérêts ont cherché à priver les communautés ciblées de leurs droits. Les niveaux élevés de méfiance à l’égard du gouvernement qui en résultent peuvent être de puissants moteurs d’instabilité et de troubles. En Amérique latine, par exemple, où existent de profondes inégalités fondées sur le revenu, la race et l’origine ethnique, nous assistons à des manifestations généralisées après l’adoption de politiques gouvernementales qui pénalisent injustement les pauvres et les marginalisés.
Troisièmement, les luttes de pouvoir débordent sur l’arène numérique. Le Covid-19 a vu augmenter la prolifération de la désinformation. Le ciblage de l’opposition politique et de la société civile, en particulier des femmes, pour ôter leur pouvoir aux individus et groupes, et les réduire au silence, a également augmenté. Les activistes et les blogueurs sont surveillés et l’accès aux plateformes en ligne est limité. En outre, avec 3,7 milliards de personnes non connectées à l’internet (la plupart des femmes, et personnes issues de pays en développement) la fracture numérique reste un défi qui renforce les inégalités.
Nous nous trouvons donc à un moment critique où nous devons regarder au-delà du court terme, et nous éloigner d’une réponse à la pandémie uniquement axée sur la santé. L’ODD 16 fournit un manuel pour ce changement de cap. Nous devons nous recentrer sur la manière de corriger certaines des tendances de gouvernance insidieuses et à plus long terme qui sont en train d’émerger, avant qu’il ne soit trop tard. L’expérience nous montre qu’avec le temps, les grands déséquilibres de pouvoir déclenchent l’instabilité et les conflits. Si nous ne corrigeons pas d’urgence ces disparités, nous risquons de perdre une grande partie des progrès réalisés en matière de développement durable.
Les niveaux élevés de méfiance à l’égard du gouvernement qui en résultent peuvent être de puissants moteurs d’instabilité et de troubles.
Certaines idées émergeant des récents dialogues ont mis l’accent sur:
- Favoriser la surveillance des institutions de gouvernance en soutenant l’indépendance judiciaire et législative pour contrôler les pouvoirs exécutifs.
- Protéger l’espace pour un dialogue et des débats inclusifs entre la société civile et les partis politiques, ainsi qu’encourager les mouvements sociaux mondiaux et la solidarité au-delà des frontières.
- Donner aux organes de contrôle indépendants les moyens de défendre les droits de l’homme et de protéger les libertés fondamentales face à la fermeture de l’espace civique et à l’érosion de l’État de droit.
- Protéger les espaces numériques qui sont devenus de puissants outils de participation politique. Les jeunes, en particulier, ont utilisé efficacement la sphère numérique et les médias sociaux pour se mobiliser et prendre part au discours politique.
L’objectif 16 sera examiné lors du Forum politique de haut niveau de cette année. C’est l’occasion d’explorer comment les gouvernements, la société civile et les entreprises privées peuvent tirer parti de l’Agenda 2030. Ensemble, ils doivent s’efforcer de maintenir l’espace civique ouvert, de se mobiliser en faveur d’une gouvernance axée sur les personnes et de plaider pour une reprise de la pandémie fondée sur les droits de l’homme.
Il ne suffit pas d’imaginer un monde plus pacifique, plus juste et plus inclusif, nous devons travailler activement ensemble pour donner aux individus le pouvoir de l’exiger.
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