“Le Discours” : adaptation ratée, mode d‘emploi
Un trentenaire s’ennuie au dîner familial, cerné par une mère piaillant son small talk dérisoire, un père radotant ses sempiternelles anecdotes de service militaire, une sœur détaillant les dernières nouvelles de sa conjugalité IKEA (“et donc...
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Un trentenaire s’ennuie au dîner familial, cerné par une mère piaillant son small talk dérisoire, un père radotant ses sempiternelles anecdotes de service militaire, une sœur détaillant les dernières nouvelles de sa conjugalité IKEA (“et donc on s’est mis au chauffage central !”) et un beau-frère chiantissime qui l’assassine d’une requête inattendue : il voudrait le voir prononcer un discours lors de leur mariage imminent.
L’occasion pour le narrateur d’engager en monologue face caméra un long pamphlet venimeux sur le dîner, le mariage, la famille, où tout sent le déjà-vu ; tout, c’est-à-dire évidemment les emblèmes petits-bourgeois que sa diatribe est censée fusiller, mais aussi et surtout le venin lui-même, la haine maussade et très convenue qu’ils suscitent en lui.
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Du poulet du dimanche à la chenille qui redémarre, des épouses autoritaires aux maris castrés, en passant par ce plan, ce satané plan du couple au lit, côte à côte en T-shirt, adossé au mur, lisant d’un air morose dans des draps bleu gris (pitié, ce plan !), toute la misanthropie frelatée du Discours semble moins provenir d’un dégoût sincère du monde qui l’entoure que des vieux réflexes épuisés d’un mauvais cinéma de mœurs qui ne regarde en réalité ni la famille ni la société, mais seulement lui-même, et ses petits effets de manche banalement acides. L’effet produit est l’inverse de celui souhaité : on ne déteste rien autant à la fin que le narrateur lui-même.
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Le Discours de Fabcaro, avec Benjamin Lavernhe, Sara Giraudeau, Kyan Khojandi (Fr., 2020, 1h27). Sortie le 9 juin