Le mariage en temps de Covid-19, la seule solution des couples binationaux pour se retrouver?

COUPLE - Le 14 février pour les membres du mouvement “Love is not tourism” se fera sans leur Valentin. La crise sanitaire n’évoluant pas dans le bon sens, le gouvernement français a décidé de restreindre les déplacements au-delà des frontières....

Le mariage en temps de Covid-19, la seule solution des couples binationaux pour se retrouver?

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Les couples binationaux se tournent pour certains vers le mariage pour faciliter leurs déplacements pendant le covid-19.

COUPLE - Le 14 février pour les membres du mouvement “Love is not tourism” se fera sans leur Valentin. La crise sanitaire n’évoluant pas dans le bon sens, le gouvernement français a décidé de restreindre les déplacements au-delà des frontières. Depuis le 31 janvier, il est donc impossible de s’envoler depuis le territoire pour l’étranger ni d’y entrer, sauf pour motif impérieux.

Pour se déplacer, il faut se munir d’une attestation et cocher l’une des trois cases suivantes en précisant la raison: motif sanitaire impérieux, motif familial impérieux, motif professionnel impérieux ne pouvant être différé.

Les couples binationaux mariés espéraient pouvoir figurer au sein de la seconde case. Mais ce n’est pas le cas. Ils sont donc dans l’impossibilité de retrouver leur conjoint.e pendant un temps encore incertain. Jusqu’à présent, ils pouvaient demander un laissez-passer pour retrouver leur famille. Selon Franceinfo, depuis le mois de septembre, 2570 documents de ce type ont été délivrés.

Un mariage express en Ukraine

C’est pour faciliter cette démarche qu’ils sont quelques-uns à s’être tournés vers le mariage. C’est le cas de Jean-Marc, en couple depuis octobre 2019, qui est désormais marié à sa compagne kazakh. “On avait prévu de se marier bien plus tard, en 2022 ou 2023. C’était quelque chose que l’on souhaitait”, confie-t-il au HuffPost LIFE.

En octobre dernier, après une longue séparation de plusieurs mois, il passe trois semaines en Turquie avec sa femme. C’est le seul pays qui accepte les deux nationalités à ce moment-là. En rentrant de ces vacances, le couple se demande une nouvelle fois comment faire pour se retrouver la prochaine fois étant donné que la situation ne s’améliore pas. C’est alors qu’ils pensent au mariage.

“Au mois d’octobre, je regarde où il est possible de se marier, sachant que ma femme n’est pas autorisée à venir sur le sol français. Kiev en Ukraine est accessible pour nous deux. En continuant mes recherches, je tombe sur un cabinet d’avocat qui organise tout ça dans la ville. Je prends contact. On me dit que c’est 800 dollars et que l’on a tous les documents apostillés et traduits en français et en russe, puis vous êtes mariés”, se rappelle Jean-Marc.

Ils s’envolent tous les deux pour l’Ukraine du 8 au 17 décembre et rentrent chez eux avec le document officiel. Le Kazakhstan reconnaît l’union et délivre un visa de 6 mois au Français. Il en profite dès le mois de janvier en s’envolant vers l’est pour rejoindre sa belle famille. Quant à la France, les démarches vont être plus longues puisque sa femme n’est toujours pas autorisée à y séjourner.

Un engagement qui peut faire peur

Malheureusement, tous les couples n’ont pas trouvé une solution aussi rapide que Jean-Marc et sa compagne. Anna, 25 ans, est en couple avec Yarden, 24 ans. Il est Israélien, ils sont ensemble depuis un an et demi. L’an passé, le jeune couple a pu se retrouver à trois reprises: une fois en France au début du confinement, une seconde fois en Serbie puis à nouveau en France en passant par le Royaume-Uni. Les jours avant les retrouvailles restent stressants, de peur de ne pas arriver à se rejoindre. C’est pourquoi lors de leur dernier séjour en France, le couple a émis le souhait de s’unir.

“C’est là que l’on a un peu commencé à penser à une solution sur le long terme pour que Yarden puisse rester plus longtemps en France. Et on a pensé au Pacs. On regardait aux alentours de début novembre. Par contre les délais étaient longs: pas de place avant fin janvier. On allait donc dépasser son visa de 3 mois en France et, en plus de ça, il fallait les papiers originaux et faire les traductions par des personnes assermentées. On a donc laissé tomber”, détaille Anna au Huffpost LIFE.

Mais l’idée est toujours dans un coin de leur tête, même si cette union resterait une grosse étape pour le jeune couple. “J’ai un peu peur de l’engagement. Ça ne fait pas hyper longtemps que l’on est ensemble et je n’ai que 25 ans. Le mariage, ce n’était pas du tout possible, c’était un trop gros engagement et je ne voulais pas le faire juste pour des papiers”, assure la Française. Anna patiente jusqu’au jour où Yarden pourra revenir en France avec ses documents officiels.

Des mariages impossibles

Si les amoureux ont hésité, d’autres couples sont prêts à sauter le pas depuis longtemps. La fermeture des frontières les empêche de conclure.

Katia est en couple avec un artiste burkinabè depuis deux ans. La date du mariage était fixée à l’été 2020. Les démarches ont dû être décalées au mois de janvier 2021. Problème, impossible de pouvoir tout finaliser sans se déplacer. Le couple se retrouve une nouvelle fois dans l’impasse.

“Nous avons entamé la démarche au Burkina Faso où nous avons déposé là-bas notre dossier auprès du consulat de France mi-décembre. Nous avons été reçus en audition, moi en France, lui à Ouagadougou, le même jour à la même heure, le 5 janvier 2021. Tout s’est très bien passé et le consulat a envoyé la publication des bans à ma maire. La mairie a ensuite envoyé le certificat de non-opposition au consulat et nous venons d’obtenir notre Certificat de capacité à mariage le 1er février 2021. C’est génial, sauf que je ne peux pas voyager pour aller déposer notre dossier de mariage à la mairie de Ouagadougou. C’est le désespoir total. Je suis épuisée de tout ce bazar”, détaille Katia au HuffPost LIFE.

L’incompréhension est encore plus grande pour ce couple qui a les papiers pour se marier, mais n’arrive pas à aller au bout. “Le fait d’aller déposer son dossier de mariage hors Union européenne n’est visiblement pas un motif impérieux alors que l’État français via le consulat nous autorise à nous marier”, poursuit-elle.

Des mariages sur Internet et à Gibraltar

Ces jeunes couples ont été contraints de se projeter et de grandir rapidement, passant parfois par la case mariage pour prouver que l’amour est plus fort qu’une pandémie. Parfois, ce besoin de se revoir était si grand que l’acte symbolique du mariage est passé au second plan. Durant l’été, les couples binationaux ont été quelques-uns à se tourner vers des solutions de dernière minute pour s’engager et rendre plus facile cette démarche. Certains ont choisi des sites Internet comme WebWed, même si le document attestant du mariage n’est pas reconnu dans tous les pays.

D’autres se sont dit oui à Gibraltar, seule destination durant la période entre les deux confinements à accepter les voyageurs du monde entier et à avoir une politique de mariage assez laxiste. “Nous étions juste fatigués d’être constamment déçus par toutes les restrictions d’immigration qui ont fonctionné contre nous”, confie au New York Times l’Américaine Je’nell Griffin, désormais marié à un britannique. 

Traduction du tweet: “Le minuscule territoire britannique situé à la pointe de l’Espagne, avec sa frontière ouverte et son absence de restrictions, est devenu l’endroit incontournable pour les couples qui souhaitent se marier. (Y compris les Américains).”

“Le mariage devient un passage administratif totalement “déromantisé”, tant il est semé d’embûches et peut finir à distance sur Zoom, loin des projections symboliques que l’on a pu s’en faire. Bien sûr, à titre collectif c’est du détail, mais à titre individuel, tout cela laisse perplexe et fragilise beaucoup les couples”, nous avoue Flore, qui vit une relation à distance depuis deux ans avec un Américain.

Malgré cette solution qui permettrait l’obtention plus facile d’un laissez-passer, aujourd’hui la France a de nouveau bloqué ses frontières et le mariage n’est pas considéré comme un motif impérieux familial. Retour à la case départ pour les couples binationaux. Jean-Marc a, lui, déjà pensé à un plan B, coûteux et long, pour retrouver sa femme en avril prochain si les frontières restent fermées.

À voir également sur Le HuffPost: Durant le coronavirus, les retrouvailles impossibles des couples binationaux