“Le Menu” : un brouet prétentieux et mégalo

Qu’ont donc mangé certain·es cinéastes, en 2022, pour vouloir nous servir leur réinterprétation de La Grande bouffe, le sulfureux cocktail molotov de Ferreri ? Quelques semaines après la Palme d’or Sans filtre et sa charge enragée contre les...

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Qu’ont donc mangé certain·es cinéastes, en 2022, pour vouloir nous servir leur réinterprétation de La Grande bouffe, le sulfureux cocktail molotov de Ferreri ? Quelques semaines après la Palme d’or Sans filtre et sa charge enragée contre les élites, voici Le Menu, nouvelle satire de classe marketée comme objet à haut potentiel inflammable, signé Mark Mylod (réalisateur de plusieurs épisodes de Game of Thrones).

De son passage dans le show HBO – série qui avait pourtant le génie de renverser tous les schémas emphatiques habituels et de nous faire soudainement adorer un personnage jadis détestable – Rylod n’en a retenu que le penchant scénaristique le plus cruel : tout personnage, sans exception, peut mourir brutalement.

Petit théâtre de la cruauté

Donnant l’impression d’avancer avec, pour seul moteur, ce plaisir démiurgique de donner vie ou mort à ces pantins, Le Menu livre un petit théâtre de la cruauté baignant dans un sadisme exalté. À sa baguette, un chef d’orchestre diabolique (un illustre chef interprété par Ralph Fiennes) venu se venger de la bassesse et de la médiocrité d’un panel de convives choisi·es minutieusement. Passée leur caractérisation unidimensionnelle en forme de caricature creuse, ces personnages ne recevront aucun développement par la suite, simplement réduit·es à des comportements toxiques que le film condamne mais jamais n’explore.

Prétention et mégalomanie

En demeure un film à l’image des plats que concocte le chef : un summum de prétention et de mégalomanie (là où cette même cuisine était censée dénoncer le snobisme dans l’art). C’est en effet ce que martèle Le Menu à ses spectateur·ices : l’art n’est épanouissant et précieux que lorsqu’il est amusant. Une même pensée qui sera retranscrite dans sa formule culinaire : un bon cheeseburger vaut toujours mieux qu’une cuisine d’auteur·trice. “Vous êtes la raison pour laquelle cet art est en train de mourir”, vomit le personnages de Ralph Fiennes à ces client·es misérables. Pour un film sur le manque d’amour adressé à l’art, c’est vrai qu’on aura été servi.

Le Menu de Mark Mylod, sortie le 23 novembre.