Le nouvel album de Drake est-il aussi raté que sa pochette ?
Toronto, 1er septembre 2021, le Yonge-Dundas Square de la ville de Drake se réveille sous le regard écrasant d’immenses panneaux publicitaires à la gloire de Donda, le nouvel album de Kanye West paru quelques jours plus tôt. Depuis que la hache...
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
Toronto, 1er septembre 2021, le Yonge-Dundas Square de la ville de Drake se réveille sous le regard écrasant d’immenses panneaux publicitaires à la gloire de Donda, le nouvel album de Kanye West paru quelques jours plus tôt. Depuis que la hache de guerre a été déterrée avec Kanye, on retiendra de cette dernière péripétie, la violence symbolique d’aller bousculer Drake sur son terrain (celui de l’étalage de richesses et d’ego) façon publicité concurrentielle entre Pepsi et Coca-Cola.
Mais si finalement, les deux rappeurs en pleine démonstration de leur smart power réglait leur conflit fratricide sur le terrain des idées ?
Un album luxueux
Si Certified Lover Boy, le nouvel album de Drake, n’est pas Donda (lire notre chronique ici), les deux albums partagent la même amplitude. 21 titres qui charrient autant de moments de grâce que d’instants d’ennui qui flirteraient presque avec la musique illustrative. Remplissant un office bien différent d’un disque à l’autre, au moins sept artistes prennent part à la fois à Donda et CLB – dont Lil Baby, Ty Dolla $ign ou même Jay-Z et les protégés de Kanye, Kid Cudi et Travis Scott – pour deux visions du blockbuster de rap US.
>> A lire aussi : Damon Albarn dévoile le single “Particles” dans une sublime session live !Si le public pouvait nourrir quelques craintes à l’égard de CLB face à cet artwork imaginé par Damien Hirst – au mieux stupide, au pire complètement déplacé -, le sixième album du 6 God tient ses promesses de luxure nichée dans des productions luxueuses que promettait son titre clinquant. Sans tout à fait revenir à la formule qui faisait le succès de Take Care ou Nothing Was The Same, ni tout à fait abandonner le virage commercial amorcé avec Views – grosso modo, en finir avec le format album et placer l’intégralité des titres du disque sur un maximum de playlists de Spotify ou Apple Music -, CLB navigue entre deux eaux, mais avec l’envie certaine d’accoucher d’un disque qui tirerait sa cohérence d’autre chose qu’un algorithme de plateforme de streaming.
À cet égard l’enchaînement inaugural de Champagne Poetry et Papi’s Home – qui tire le meilleur de l’échantillonnage du sample de Nice For What – contribue à faire de CLB le disque le plus marquant de Drake depuis 2015 et la parution de la mixtape If You’re Reading This It’s Too Late. Une impression renforcée par les basses aquatiques de Nothing Was The Same qui font leur retour sur le reste de l’album.
Retour aux affaires
En sa qualité de plus gros vautour du rap US, une certaine ironie pourrait poindre lorsqu’il rappe “Imitation isn’t flattery, it’s just annoyin’ me” (“l’imitation n’est pas flatteuse, elle m’agace”) ou qu’il nomme un morceau No Friends In The Industry. CLB semble pourtant tellement loin de l’indigence de Care Package, More Life et l’horrible Scorpion, qu’on serait prêt à lui pardonner son misérabilisme de superstar pleine aux as.
Le miracle tient à bien peu de choses. Travaillant une sorte d’épure à l’extrême depuis son troisième album qui consacrait les vertus quasi-ASMR et New Age des productions aquatiques de Noah “40” Shebib avant d’en faire un pastiche d’ambient feignante, Drake semble enfin en mesure de revitaliser cet art du dépouillement qui lui faisait défaut.
À l’exception des prévisibles Girls Want Girls et Fucking Fans, les productions immaculées de son armada de beatmakers offrent un écrin cossu aux atermoiements triomphaux de Drake. Des spectres de la Three 6 Mafia sur Knife Talk (avec 21 Savage et Project Pat), au Future libidineux de Way 2 Sexy, en passant par le beat spatial de TSU, aux guitares sensuelles de N 2 Deep et au r’n’b classieux de Race My Mind : toute la suavité de Certified Lover Boy paraît contenue dans le titre du morceau d’ouverture : Champagne Poetry. Une tournure presque oxymorique pour figurer ces rimes balancées par un Drake drapé d’un peignoir en satin.
Son clash avec Pusha T (The Story Of Adidon) l’a peut-être réveillé, ou en a-t-il eu assez de marcher pieds nus sur les dalles en marbre de Carrare de sa forteresse de solitude de Toronto ? Difficile de savoir ce qui aura poussé Drake à sortir d’une zone de confort qu’il avait bâti brique par brique ces six dernières années. Reste néanmoins que ce retour impromptu d’un Drake véritablement indocile faisant la nique à sa propre politique cynique et par extension celle du diabolique patron de Spotify, Daniel Ek – qu’on remercie pour le player de l’album ci-après -, réveille des émotions qu’on pensait perdues à jamais.
>> À lire aussi : The Divine Comedy offrira bientôt un lifting à ses meilleurs morceaux