Le sable radioactif venu du Sahara vous a inquiété? Ces chiffres vous aideront à relativiser

SCIENCE - La semaine passée, une partie de la France a vu le ciel se colorer de jaune. En cause: un important nuage de sable venu du désert du Sahara. Un phénomène déjà observé début février, magnifique, mais qui a sa contrepartie: plusieurs...

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Le sable du Sahara a coloré le ciel de jaune, entraîne une alerte aux particules fines. Mais sa radioactivité n'est pas dangereuse.

SCIENCE - La semaine passée, une partie de la France a vu le ciel se colorer de jaune. En cause: un important nuage de sable venu du désert du Sahara. Un phénomène déjà observé début février, magnifique, mais qui a sa contrepartie: plusieurs départements ont été placés en alerte pollution de l’air aux particules fines par Météo France. Samedi 27 février, les dernières alertes ont été levées.

Au même moment, de très nombreux médias se faisaient l’écho d’un autre phénomène lié à ce sable: il serait radioactif. L’histoire remonte au 24 février, jour où l’Acro, une association pour le contrôle de la radioactivité dans l’ouest, annonce avoir analysé la radioactivité de ces poussières venues du Sahara et récoltées le 6 février. Selon l’ONG, le résultat est “sans appel, du Césium-137 est clairement identifié”.

L’Acro évoque environ 80.000 becquerels par km2. Un chiffre qui peut faire peur, même si l’ONG précise que ce niveau est “très faible”, sans plus d’indication. La réalité, c’est qu’il est quasiment insignifiant. Pour mieux le comprendre, Le HuffPost a posé la question à l’IRSN, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.

Remettre les chiffres en perspectives

Avant tout, il convient de rappeler qu’en général, la radioactivité des surfaces est calculée en becquerels par mètres carrés (Bq/m2). “Ici, ce que l’on a, c’est donc 0,08 Bq/m2”, explique Marc Gleizes, adjoint au directeur de l’environnement à l’IRSN.

Pour se donner une idée, le rapport de l’ONU sur l’accident nucléaire de Tchernobyl a estimé que pour qu’une zone soit considérée comme contaminée, il faut que l’on dépasse les 37000 Bq/m2. Environ 460.000 fois plus que ce que l’Acro a relevé pour les poussières du Sahara.

L’IRSN a elle aussi réalisé des analyses. Mais plutôt que de regarder la poussière déposée sur une surface, l’institut procède différemment, afin notamment d’être sûr de pouvoir détecter des niveaux de radioactivité très, très faibles. Pour cela, 50 énormes aspirateurs répartis partout en France absorbent des centaines de mètres cubes d’air par heure. “L’air est filtré, puis nous récupérons ces filtres pour analyser en laboratoire la radioactivité trouvée sur ces filtres”, précise Marc Gleizes.

Une hausse qui n’est qu’un bruit de fond

“Le bruit de fond moyen du Cesium-137 en France correspond à 0,15 microbecquerel par mètre cube (µBq/m3), cela veut dire un millionième de becquerel”, détaille-t-il. Le Cesium-137 n’existe pas à l’état naturel, il est obligatoirement dû aux activités humaines. Ce bruit de fond provient en général des restes des essais nucléaires réalisés par les grandes puissances dans la seconde moitié du XXe siècle ou aux quelques accidents nucléaires de grande ampleur, tels Fukushima et Tchernobyl. Le vent brasse parfois ces particules, qui mettent des décennies à se détruire.

L’IRSN a partagé au HuffPost les récents résultats de ses analyses pour la semaine passée. Dans plusieurs régions, rien de particulier, avec une mesure entre 0,1 et 0,15 µBq/m3, soit le niveau du bruit de fond. L’institut a par contre observé une très légère hausse dans l’Essonne, avec 0,25 µBq/m3 et à Clermont-Ferrand, à 0,76  µBq/m3.

Une multiplication par cinq donc. Inquiétant? Soyons clairs: pas du tout. Il suffit de mettre ces chiffres en perspective. D’abord, ce n’est pas une première. En 2004, les vents avaient également coloré le ciel de jaune en France et l’IRSN avait à l’époque relevé une radioactivité au Cesium-137 de 4,5 µBq/m3. Soit beaucoup plus que la hausse de la semaine passée.

Les exemples de Fukushima et Tchernobyl

Autre comparaison: suite à l’accident de Fukushima, les vents ont diffusé et dilué (fortement) le Cesium-137 expulsé par les réacteurs. Le nuage a même fini par survoler la France. À l’époque, l’IRSN avait relevé des niveaux entre 100 et 200 µBq/m3.

Mais tout cela n’est rien comparé au fameux nuage de Tchernobyl qui est passé sur la France après la fusion du coeur du réacteur en Ukraine. “On avait alors mesuré une activité d’un becquerel par mètre cube, soit un million de fois plus élevée que ce qu’on a relevé la semaine dernière” à cause du sable du Sahara, précise Marc Gleizes. C’est également 5000 fois plus élevé que ce qui a été relevé lors du passage du nuage venu de Fukushima.

À l’époque de Tchernobyl, aucune mesure sanitaire n’est mise en place, car cette exposition était déjà plus de 100 fois inférieure aux zones contaminées autour de la centrale de Tchernobyl. Et si des associations militent pour faire reconnaître l’impact de cette pollution nucléaire, il est aujourd’hui très difficile de savoir si le nuage de Tchernobyl a eu un impact sur la part de cancer en France ou non.

De son côté, l’Acro justifie sa démarche en jurant que “l’objet n’est pas de dire qu’il y a une mise en danger de la population mais de rappeler un peu quelle est l’origine et la responsabilité de la France”. Interrogé par France Info, le spécialiste de la radioprotection à l’Université de Caen et vice-président de l’Acro, Pierre Barbey, estime que la radioactivité de ce sable “remonte au début des années 60, quand la France a fait ses essais nucléaires atmosphériques dans le Sahara”, et pointe le niveau d’exposition des populations locales.

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