Le variant brésilien inquiète les élus français, voici ce qu'on en sait
CORONAVIRUS - Fermer les lignes aériennes avec le Brésil? Compliqué, affirme le gouvernement, mais une nécessité pour une bonne partie de la classe politique. En cause, depuis le début du mois du mois d’avril, l’explosion d’un variant brésilien...
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CORONAVIRUS - Fermer les lignes aériennes avec le Brésil? Compliqué, affirme le gouvernement, mais une nécessité pour une bonne partie de la classe politique. En cause, depuis le début du mois du mois d’avril, l’explosion d’un variant brésilien du coronavirus. Dénommé “P.1” par les chercheurs, il est à l’origine d’une nouvelle vague meurtrière dans le plus grand pays d’Amérique du Sud, et inquiète en France.
Aujourd’hui, cette variation du Covid-19 est déjà présente dans l’Hexagone, mais mesurée à l’état de traces seulement. À la mi-mars, Santé publique France estimait sa prévalence à 0,1% de cas de Covid détectée sur le sol français. C’est pourquoi l’heure est grave chez ceux qui appellent à couper les ponts aériens avec le Brésil: c’est maintenant qu’il faut agir pour ne pas jeter les bases d’une éventuelle quatrième vague.
Leur crainte? Lorsque de nouveaux cas auront été importés puis lâchés dans la nature, il risque d’advenir ce qu’il s’est passé avec le variant britannique, aujourd’hui responsable de 80% des nouvelles infections...ou pire, imaginent certains. Car ce variant P.1, bien qu’encore mal connu, a des caractéristiques qui ont de quoi inquiéter. Gare pour autant à ne pas céder à la panique.
Oui, le variant brésilien est plus contagieux
Leurs résultats, comme pour toutes les études relatives à P.1, ne sont que préliminaires, mais ils sont cohérents avec la résurgence du nombre de cas au Brésil. Des chercheurs ont étudié les cas d’infections à Manaus (où a été identifié le variant pour la 1ère fois) et les ont comparés avec les malades porteurs d’autres souches du coronavirus. Les résultats sont inquiétants: P.1 serait 1,4 à 2,2 fois plus contagieux que le coronavirus original.
Un chiffre sans appel, à comparer toutefois avec le variant qui aujourd’hui fait l’épidémie en France. B.1.1.7, le fameux variant britannique, a lui aussi une transmission plus élevée, que l’on estime aujourd’hui être entre 1,5 et 1,7 fois plus important que le Covid-19 des 1ères vagues. Il y aurait donc une contagiosité plus élevée que P.1, mais impossible de dire pour l’instant si la différence est considérable. Même incertitude pour la mortalité: aucune donnée n’établit pour le moment clairement que le virus est plus létal.
Cette agressivité du virus va néanmoins de pair, d’après la même étude brésilienne, avec une charge virale très élevée. Pour le dire autrement, le variant P.1 se reproduit plus abondamment dans le corps humain que les autres mutations, ce qui pourrait expliquer la facilité de contagion... Mais dans un environnement où une partie importante de la population est vaccinée, présente-t-il encore un danger?
Pour l’instant, P.1 ne “résiste” pas aux vaccins
Sur ce sujet, il convient d’être particulièrement prudent, à l’image de Kate O’Brian, directrice du département “Immunisation” de l’Organisation mondiale de la santé qui déclarait le 9 avril: “Il n’y a pas assez d’informations pour tirer de conclusion définitive” sur l’efficacité des vaccins contre le variant brésilien. On peut néanmoins clarifier en partie la situation.
Plusieurs études ont apporté des nouvelles rassurantes ces dernières semaines, même si elles doivent être confirmées sur le terrain. À la fin du mois de mars, une étude de l’Université d’Oxford a montré que le vaccin AstraZeneca réagissait bien face à P.1, bien qu’un peu moins efficacement que contre le virus originel. Selon Gavin Screaton, à l’origine de l’étude, la réponse immunitaire serait même “aussi bonne” que contre le variant britannique.
Même son de cloche pour Coronavac, un vaccin chinois inconnu des Européens, mais très attendu au niveau mondial, particulièrement dans les pays du sud. Ce vaccin à base de virus inactivé obtiendrait d’excellents résultats contre P.1, avec 50% d’efficacité dès la 1ère dose, d’après des chercheurs de l’université de Yale.
Des études analogues n’ont pas encore eu lieu pour les vaccins Moderna et Pfizer, mais le tableau est là encore plutôt encourageant. Des tests ont été réalisés avec le plasma de personnes vaccinées avec ces deux produits, et la réaction des anticorps a été significative: moins forte que contre le virus originel, mais plus forte que contre le variant sud-africain. Ces signes sont encourageants, mais ne peuvent se substituer à des études plus poussées.
Du côté des traitements curatifs en revanche, c’est la douche froide. À une exception près, les anticorps monoclonaux n’auraient pas de prise sur P.1. Le bamlanivimab d’Ely Lily, sur lequel misait le gouvernement, échouerait ainsi à empêcher la maladie de dégénérer dans sa forme grave, et seul le imdevimab de Regeneron garderait une partie de ses propriétés curatives... Mieux vaut donc prévenir que guérir avec ce nouveau variant.
Échappement, fuite immunitaire... Ce qu’on ignore
Alors que la campagne de vaccination est plus que largement entamée en France, la peur de l’infection cède la place à celle de la réinfection, et les rumeurs entourant P.1 ne sont pas de nature à rassurer. Au Brésil, en particulier à Manaus où la maladie fait des ravages depuis des mois, ce nouveau pic épidémique interroge: et si le variant touchait des personnes ayant déjà été malades du Covid?
Il est encore trop tôt pour le dire, tant les données peuvent être interprétées. Une étude parue dès le mois de janvier dans la revue The Lancet l’explique clairement: oui, la remontée des infections a lieu au Brésil dans des zones où la pandémie avait déjà touché une large portion de la population, mais non, cela ne veut pas forcément dire que le virus est plus à même de réinfecter des personnes ayant déjà été malades.
Quatre scénarios peuvent en effet expliquer cette résurgence: une surestimation du nombre d’asymptomatiques lors de la 1ère vague, une immunité qui a baissé avec le temps (un autre coronavirus pourrait alors être aussi dangereux), une plus grande transmissibilité du virus, qui touche des personnes jusqu’alors épargnées, ou...une fuite immunitaire. Dans ce dernier cas, la protection acquise par les malades serait inefficace face au nouveau variant.
Rien ne permet aujourd’hui d’affirmer que ce dernier scénario l’a emporté, certains éléments de réponse allant même dans le sens opposé. Une étude parue le 7 avril dans The New England Journal of Medecine affirme ainsi que chez les patients combinant une infection passée à Sars-cov-2 et un vaccin ARNm (Pfizer ou Moderna), la réponse immunitaire face à P.1 est excellente.
Autrement dit, la réponse immunitaire suite à une 1ère infection agit comme une 1ère injection et le vaccin comme un booster: ensemble, ils fabriquent une réponse immunitaire adéquate, empêchant le virus de s’installer. Comme pour le variant britannique, il semble donc que le P.1 soit plus agressif, et nécessite des mesures renforcées.
Ce variant n’est pas pour autant cette mutation hors de contrôle à laquelle on pourrait penser au regard de la situation brésilienne. Le pays dirigé par Jaïr Bolsonaro suit depuis le début de la pandémie une trajectoire dramatique, où malgré l’urgence, la population n’est vaccinée qu’à moins de 5%. Jair Bolsonaro n’a d’ailleurs cessé de minimiser la gravité de la pandémie et de remettre en cause les mesures de restriction prises par les gouverneurs des États pour tenter d’endiguer les contaminations.
Une partie des peurs liées aux variants découle de cette situation. Ou comme l’expliquait début mars le New York Times: “le Brésil est un avertissement pour le monde”. À charge pour le gouvernement d’entendre cet avertissement.
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