Les drag queens ne se cantonnent plus aux bars gay

LGBTI - Des paillettes, mais pas que. Depuis plusieurs années, et notamment grâce au succès de l’émission de télé-réalité “RuPaul’s Drag Race” sur Netflix, les drag queens sont sous les projecteurs. Disponible sur France.tv Slash à compter...

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Cookie Kunty, figure de la scène drag parisienne, à découvrir dans

LGBTI - Des paillettes, mais pas que. Depuis plusieurs années, et notamment grâce au succès de l’émission de télé-réalité “RuPaul’s Drag Race” sur Netflix, les drag queens sont sous les projecteurs. Disponible sur France.tv Slash à compter de ce dimanche 24 janvier, le documentaire “Queendom” donne la parole à trois d’entre elles.

Elles portent les noms de Cookie Kunty, Shigo La Durée et Le Filip. La première multiplie les apparitions à l’écran. La seconde, bien connue des ballrooms, défend les droits des personnes racisées. La dernière, elle, tente de percer sur les planches. Elles sont toutes les trois des figures majeures de la scène parisienne.

Dans leur documentaire, les réalisateurs plongent le spectateur dans le glamour de cet univers, mais rappellent aussi que les drag queens sont des êtres humains aux ambitions, réalités et parcours différents. L’idée? “Dépoussiérer cette image qu’on a toutes et tous et d’expliquer [qu’elles] existent sous beaucoup de formes artistiques et politiques. Ce ne sont pas juste des gens qui se maquillent”, nous souffle l’un des deux documentaristes, Marco Novoa. 

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Il ajoute: “Les gens, au sein même de la communauté LGBTI, confondent encore l’art du drag avec les notions de transidentité ou de travestissement, par exemple.” Les drag queens sont des personnages, des reines du spectacle qui jouent sur l’extrapolation de codes féminins. Elles excellent dans la mise en scène au gré de tenues flamboyantes.

Un sujet “pas suffisamment mainstream”?

Le projet, qui mûrit depuis trois ans, s’est heurté à de nombreux refus, nous précise le vidéaste. Pour ces distributeurs, le sujet n’était “pas suffisamment mainstream”. “Ils nous ont dit que ce n’était pas au goût du jour, que ça n’intéresserait pas l’ensemble de la population”, se souvient Marco Novoa, aujourd’hui satisfait de voir le résultat diffusé sur une plateforme gratuite et accessible au plus grand nombre.

Miss Fame est au premier rang de tous les défilés. Conchita Wurst, sur le podium de Jean-Paul Gaultier. Dans la mode, les drag queens sont là. À la télévision française, ça démarre, comme en témoignent un personnage de la série “Plus Belle La Vie” ou la participation de Leona Winter aux “Anges de la télé-réalité”.

La lumière s’allume sur elles. c’est important. ”À l’intérieur de la communauté queer, nous sommes déjà à même de comprendre la fluidité de genre, précise-t-il. Maintenant, il faut passer à l’étape suivante. Il faut que d’autres populations, qui ne fréquentent pas les bars gay, puissent en prendre conscience. Si ce message peut être entendu par des personnes qui ne sont pas concernées, ça devient encore plus fort et encore plus efficace.”

Ouvrir les mentalités

Ce point de vue, Cookie Kunty le partage. Pour le vent de fraîcheur et de liberté qu’elle et ses consœurs soufflent sur la scène culturelle française, d’abord. D’autre part, pour l’aspect social intrinsèque à cet art scénique. Lutte contre la sérophobie, les droits des personnes LGBTI, l’acceptation de soi. Derrière l’humour, les performances revêtent un pan de revendications.

“Une fois qu’on a mis un pied dans la porte, on peut contribuer à ouvrir les débats et les mentalités, estime la drag queen. On peut inviter les gens à prendre conscience qu’il n’y a pas que leurs vérités.”

Shigo La Durée se prépare avant un ballroom.

Bientôt à l’affiche d’un long-métrage, Cookie Kunty n’est plus une inconnue. Elle était, au mois de décembre dernier, la jurée de l’émission “Les reines du make-up” sur 6play. Une telle démarche demande de la vigilance. “Il faut faire la distinction entre ce qui va être de l’ordre du pinkwashing, une émission qui va nous utiliser à des fins divertissantes sans âme ni fond, et une initiative qui va nous permettre d’appuyer notre discours”, soutient-elle.

Par crainte de la récupération ou d’une mauvaise représentation, “il faut se préserver, ajoute la performeuse. Notre communauté, c’est comme une famille. Il faut faire attention les unes aux autres. C’est pas le reste du monde qui le fera.”

La standardisation, un danger

Mais voilà, bien qu’étant bénéfique à toutes et tous, la démocratisation du drag peut, comme tout art, faire défaut et entraîner un risque de standardisation. ”‘RuPaul’s Drag Race’ a été une bénédiction et une malédiction pour nous”, nous dit Cookie Kunty. L’émission a suscité des vocations et l’intérêt des médias.

Cependant, elle aurait mis en place des standards de beauté irréalistes, loin de l’essence de la culture drag qui fut en tête des cortèges, avec les personnes trans, des mouvements sociaux LGBTI. Le glamour est vendeur. “Dans le milieu du drag parisien, c’est flagrant, ajoute la connaisseuse. Celles qui ne correspondent pas à certains canons de beauté ou à certaines esthétiques, comme les drag racisées ou trans, vont être moins bookées.”

Le Filip, au cours de son spectacle à la Nouvelle Seine.

Ce qu’elle déplore, aussi, c’est l’appropriation des codes du mouvement. Depuis quelques temps, des créateurs de contenus, essentiellement des make-up artistes, font leur business sur les réseaux sociaux en se maquillant ou s’habillant comme des drag queens, à l’étranger et en France.

En quête de likes ou de cadeaux des marques? On ne sait pas. En tout cas, “ils prennent ce qu’il y a à prendre, sans rendre à la communauté.” Ils ne subissent ni les stigmatisations, ni l’investissement, mental et économique, que ça représente en tant qu’artiste. ”Être drag queen, tu le vis, tu le respires, tu le subis. Eux, ils peuvent choisir de faire machine arrière, tranche Cookie Kunty. Nous, c’est notre vie.” Une vie qui mérite d’être entendue, sous toutes ses formes.

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