Les relations amicales entre parents et non-parents sont parfois compliquées, mais ce n’est pas une fatalité
PARENTALITÉ - Les relations amicales entre les parents et leurs amis sans enfants sont parfois compliquées. Les parents peuvent culpabiliser de refuser si souvent les invitations aux sorties ou aux soirées entre amis, tout en souhaitant que...
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PARENTALITÉ - Les relations amicales entre les parents et leurs amis sans enfants sont parfois compliquées. Les parents peuvent culpabiliser de refuser si souvent les invitations aux sorties ou aux soirées entre amis, tout en souhaitant que ceux qui n’ont pas d’enfants comprennent ce qu’implique leur nouvelle vie: les nuits d’insomnie, les caprices, voire, en ces temps de Covid, les difficultés de l’enseignement à distance, si leurs enfants sont plus grands.
De leur côté, les amis sans enfants se sentent souvent délaissés, déçus par ces annulations successives, et se demandent: “Mais qu’est-il arrivé à mon ami si dynamique, qui adorait s’amuser? Dois-je dire adieu pour de bon à nos apéros? Est-ce les autres ‘mamans et papas’ qu’il ou elle fréquente au parc vont me remplacer?”
L’une des raisons fréquentes de ce conflit, c’est que trop d’amis s’attendent à ce que les choses restent plus ou moins les mêmes après la naissance d’un enfant, indique Kurt Smith, thérapeute conjugal et familial en Californie.
“La vie personnelle des parents devient souvent totalement différente de celle des non-parents”, indique-t-il au HuffPost. “Un bébé, ça change tout, il faut s’en occuper 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.”
En thérapie, certains de ses clients sans enfants font parfois des remarques sur la façon dont leurs amis jeunes parents ont changé.
“J’entends régulièrement des choses comme ‘Elle n’a plus aucun ami.’ ‘Elle ne sort jamais de chez elle.’ ‘Il a amené sa fille au dîner qu’on avait organisé avec d’autres couples d’amis’”, relate le thérapeute.
Même s’il est logique de passer tout son temps à s’occuper d’un nouveau-né, Kurt Smith remarque que la plupart des parents n’arrivent jamais tout à fait à maintenir un équilibre entre leurs responsabilités familiales et leur vie personnelle. Leurs centres d’intérêt et leurs désirs, leurs amitiés de longue date et parfois même leur couple passent au second plan.
Solange François, consultante en marketing et communication à Auckland, en Nouvelle-Zélande, maman de deux enfants de 2 ans et demi et 5 mois, s’est trouvée dans les deux cas de figure.
“Avant d’avoir des enfants, je ne me rendais pas compte de l’investissement qu’impliquait la parentalité, que ce soit en temps, en argent ou en énergie,” explique-t-elle. “Maintenant que je suis maman, je me sens davantage en phase avec les amis sans enfants qui ont conscience de cet investissement.”
D’après mon expérience, l’une des clés pour garder ses amis, c’est de continuer à faire des choses qui vous permettent de rester vous-même, pour ne pas devenir le genre de maman qui cause à ses amis comme à ses enfants.JESSICA TANGITAU, MAMAN DE DEUX ENFANTS
Quand elle parvient à trouver le temps de voir des amis, Solange François n’évite pas spécialement de causer de ses enfants, mais elle n’en fait pas non plus le centre de la conversation.
“Je m’assure toujours d’avoir d’autres sujets de discussion que les couches et les caprices de mes enfants,” assure-t-elle. “Quand je suis avec des amis non-parents, je veille à leur demander aussi de leurs nouvelles.”
Que peuvent faire d’autre les parents et les non-parents pour préserver leurs relations amicales? Des thérapeutes et des personnes qui ont réussi à rester proches de leurs amis après avoir eu des enfants partagent avec nous six conseils.
Si vous êtes l’ami sans enfant, n’hésitez pas à prendre les devants
Votre ami jeune parent a sans doute bien besoin de sortir un peu. Continuez à l’inviter à prendre un brunch et à participer à toutes les activités que vous faisiez ensemble, il appréciera! Mais rappelez-vous que ses horaires ne sont pas aussi souples qu’avant, conseille Sarah Spencer Northey, thérapeute conjugale à Washington D. C.
“La plupart de vos amis seront toujours d’aussi bonne compagnie une fois devenus parents, mais ils seront désormais disponibles de 7 h du matin à 9 h du soir”, dit-elle. “Ils n’auront peut-être pas l’énergie nécessaire pour assister à un concert qui se termine tard, vu qu’on les aura réveillés sans pitié aux aurores, mais ils peuvent encore faire plein de choses sympa l’après-midi ou le matin.”
Dans le cercle d’amis de la thérapeute, une femme sans enfants a fait un beau cadeau aux parents du groupe: quand elle organise des soirées, elle prévoit aussi quelque chose plus tôt, spécialement pour les parents.
Kurt Smith, qui reçoit majoritairement des hommes à son cabinet, insiste aussi sur la nécessité d’adapter les sorties entre amis.
“L’amitié, ce n’est pas tout ou rien”, fait remarquer le spécialiste. “Peut-être que vous n’aurez plus le temps d’enchaîner 18 parties de golf tous les week-ends ou de vous faire une virée entre mecs à Las Vegas. Ça ne veut pas dire pour autant que votre amitié est terminée. La relation peut changer et se renouveler.”
Il se peut que cela devienne “petit-dej ensemble avant d’aller bosser une fois par mois, ou FaceTime toutes les deux semaines”, ajoute-il. Il faut miser sur le long terme: vos potes finiront par avoir à nouveau du temps libre. Etant donné vos emplois du temps chargés, prendre des nouvelles ou vous voir de temps en temps devrait suffire à alimenter votre relation pour le moment.
Si vous êtes l’ami qui a des enfants, faites parfois passer vos amis en 1er comme vous le faites pour votre couple.
Jessica Tangitau a une fille de 7 ans et un fils de 4 ans. Avant de devenir “maman”, elle était simplement Jessica. Pour son propre bien et celui de ses relations amicales, elle s’efforce de ne jamais l’oublier.
“D’après mon expérience, l’une des clés pour garder ses amis, c’est de continuer à faire des choses qui vous permettent de rester vous-même, pour ne pas devenir le genre de maman qui cause à ses amis comme à ses enfants”, plaisante-t-elle.
En même temps, selon elle, il est important de s’investir dans ses relations amicales comme on le fait dans son couple après avoir eu des enfants.
“Réservez-vous du temps pour voir vos amis dès que vous le pouvez et gardez les centres d’intérêt et les activités que vous aviez en commun avant”, conseille-t-elle. “Dans mon groupe d’amis, ce sont les voyages, la politique et Issa Rae [Actrice et réalisatrice britannique, N.d.T].”
Même si elle a peu de temps libre, Jessica Tangitau parvient à conserver ces liens d’amitié.
“Avant la pandémie, au lieu de partir en vacances en famille à Disney World, on est allés à Londres”, ce qui lui a permis d’avoir plus de choses à expliquer à ses amis, relate-t-elle. “On s’envoie des textos pour commenter en direct les épisodes d’’Insecure’(série avec Issa Rae, N.d.T) Et avant le confinement, on avait l’habitude de se retrouver régulièrement pour décompresser autour d’un verre.”
Aux dernières élections, Jessica et ses amis s’étaient tous portés volontaires pour tenir un bureau de vote.
“Ces temps-ci, nous avons moins de contacts mais ils sont toujours riches de sens”, dit-elle.
Adoptez les conversations groupées sur les plateformes de messagerie (ne serait-ce que pour vous envoyer des memes!)
Si vous devez créer un groupe WhatsApp ou organiser des réunions sur Zoom pour garder le contact – surtout en période de Covid-19 – qu’à cela ne tienne.
“Peut-être que c’est dû au Covid, mais je suis restée en lien et me suis même rapprochée de certains amis grâce à nos conversations sur GroupMes et WhatsApp”, souligne Sarah Spencer Northey. “Alimenter la discussion dans ces petits groupes virtuels tend à encourager les gens à se voir en personne plus tard.”
Si votre ami.e fait face à des problèmes d’infertilité – ou si ça a été le cas par le passé – évitez de trop causer des enfants.
Il est particulièrement important d’éviter de monopoliser la conversation en parlant de vos enfants si l’un de vos ami a des difficultés à concevoir ou n’a pas pu le faire.
Andreia Trigo, une infirmière consultante spécialiste de la fertilité, créatrice de l’application Enhanced Fertility Programme, a appris à l’âge de 17 ans qu’elle ne pourrait pas avoir d’enfants.
Ses fils d’actualité Facebook et ses flux Instagram sont remplis de photos de bébés et de familles comblées, car la plupart de ses amis sont parents d’un ou deux bambins.
“En soi, c’est déjà éprouvant, comme un rappel constant de ce dont on est privé”, souligne-t-elle. “Dans les conversations, c’est presque inévitable d’entendre causer des enfants et des expériences liées à la parentalité.”
La majorité du temps, Andreia est heureuse d’entendre ces anecdotes, mais ses amis et collègues sont au courant qu’elle ne peut pas avoir d’enfants et font attention à ce qu’ils disent. Personne ne lui demande jamais “Quand est-ce que tu t’y mets?” ni ne fait de remarques du genre “On ne sait pas ce que c’est que le vrai amour tant qu’on n’est pas devenue maman.”
“Pour les gens qui préfèrent garder pour eux leurs problèmes d’infertilité, ça peut être plus compliqué de [rester ami avec de jeunes parents] parce qu’ils doivent supporter ces commentaires sans arrêt”, ajoute la spécialiste. “Si la société était davantage sensibilisée à ce sujet et à ce que vivent les personnes qui n’arrivent pas à concevoir, je crois que les gens causeraient avec plus de tact devant leurs amis ou même des inconnus.”
Si vous êtes l’ami qui souffre de ces problèmes, vous avez le droit de poser des limites aux parents de votre entourage.
“Vous n’aurez peut-être pas envie de vous rendre à la baby shower ou à la fête d’anniversaire de l’enfant, par exemple”, souligne Andreia. “Soyez honnêtes avec vos amis en leur expliquant pourquoi cela vous est pénible.”
Organisez en priorité des week-ends et des dîners sans les enfants.
Hannah Elizabeth Leach, à la tête d’un cabinet de conseil en relations publiques, a deux filles de 2 et 4 ans. C’est un vrai luxe pour elle de profiter de ses amis sans avoir les enfants dans les pattes, mais elle s’arrange pour le faire une fois par mois. C’est souvent elle qui organise, mais ses amis en valent la peine.
“Que ce soit une balade dans un parc, une soirée entre filles ou une excursion le week-end, on arrive toujours à s’organiser”, assure Hannah. “Voir ses amis, ça fait du bien au moral. Alors même s’il faut planifier ça des mois à l’avance, ça vaut le coup.”
Ne perdez pas de vue qui vous étiez avant d’avoir des enfants
Inge Hunter, spécialiste en e-marketing et co-animatrice du podcast “Now I’m worried” (où elle discute avec sa meilleure amie Zoë de différents sujets de préoccupation actuels), a deux enfants de 8 et 2 ans. Elle arrive à rester proche de ses amis sans enfants, tout simplement parce qu’elle considère qu’être maman n’est qu’une partie de son identité.
“Je pense vraiment que les parents perdent leurs amis sans enfants quand ils perdent leur identité et ne vivent plus qu’à travers leurs enfants et leur statut de parent”, explique-t-elle. “Soyons honnêtes, nos enfants n’intéressent que nous. Je n’aime pas entendre causer des enfants des autres alors pourquoi penserais-je qu’ils s’intéressent aux miens?”
Inge partage toujours avec ses amis les centres d’intérêt qui les avaient rapprochés au départ, et même si elle leur explique de temps en temps une anecdote sur ses enfants, ils sont rarement au centre de la conversation.
“Nous sommes une famille aimante et heureuse, mais je n’éprouve pas le besoin d’en causer sans arrêt”, conclut-elle.
Cet article, publié sur le Huffpost britannique, a été traduit par Iris Le Guinio pour Fast ForWord.
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