“Leur Algérie” de Lina Soualem, un beau documentaire sur le silence et l’exil

Ça pourrait être le pitch d’une comédie de remariage hollywoodienne à moins que ce ne soit celui d’un mélodrame façon La Femme d’à côté de François Truffaut… Après plus de soixante ans de vie commune, Aïcha et Mabrouk, arrivés à Thiers, en...

“Leur Algérie” de Lina Soualem, un beau documentaire sur le silence et l’exil

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Ça pourrait être le pitch d’une comédie de remariage hollywoodienne à moins que ce ne soit celui d’un mélodrame façon La Femme d’à côté de François Truffaut…

Après plus de soixante ans de vie commune, Aïcha et Mabrouk, arrivés à Thiers, en Auvergne depuis au moins autant de temps, décident de se séparer et ne trouvent rien de mieux que de s’installer dans deux appartements qui se font quasiment face. Aïcha, femme douce et constamment hilare, le visage enfoui dans ses mains pour masquer les rires (et parfois les pleurs) qui disent la gêne et l’extrême pudeur quand il s’agit de causer d’elle et d’amour, n’a qu’à traverser un sentier pour se rendre chez Mabrouk, pépé rabougri et d’abord pas très causant, pour lui assurer ses repas, se soucier de sa santé.

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Monde ouvrier 

Pourtant, elle voudrait bien maintenant profiter du temps qui lui reste, arrêter d’être épouse, mère et grand-mère pour vivre sa vie. Leur Algérie explique un peu ça, cette tentative d’émancipation d’une femme mais il retrace aussi l’histoire d’un oubli, d’une dépossession, celle de ces deux exilé·es, de cette succession d’arrachements (à leur famille, à leur pays, cette contrée perdue où l’on ne revient pas) dont leur vie est faite et du mystère silencieux qui entoure leurs douleurs.

En creux, c’est aussi la fin d’un monde ouvrier et d’une France industrielle qui s’écrit et l’émotion suscitée par le film tient évidemment à la profonde mélancolie face à ce qui est destiné à disparaître. Lina Soualem, fille du comédien Zinedine Soualem et de l’actrice et réalisatrice Hiam Abbass, dont on entend la présence derrière la caméra, est habitée par cette obsession de cinéma qui est celle de la trace, de l’immortel. Mais elle est aussi travaillée par l’idée que les images, comme les archives de famille qui ouvrent le film où elle apparaît enfant près de ses grands- parents adorés, sont aussi bien des mensonges qu’il faut apprendre à retourner que des détonateurs de vérité.

Leur Algérie de Lina Soualem (Fr., Sui., Alg., Qat., 2020, 1h12)