L'euthanasie légalisée (sous conditions) en Espagne
POLITIQUE - Le parlement espagnol a approuvé définitivement, ce jeudi 18 mars, la légalisation de l’euthanasie, faisant de l’Espagne l’un des rares pays au monde permettant à un patient atteint d’une maladie incurable de mourir pour mettre...
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POLITIQUE - Le parlement espagnol a approuvé définitivement, ce jeudi 18 mars, la légalisation de l’euthanasie, faisant de l’Espagne l’un des rares pays au monde permettant à un patient atteint d’une maladie incurable de mourir pour mettre fin à ses souffrances.
Priorité pour le gouvernement du socialiste Pedro Sánchez, cette loi, qui doit entrer en vigueur en juin, a été adoptée par la chambre basse du Parlement, grâce notamment aux voix de la gauche et du centre, par une large majorité de 202 députés sur 350. 141 députés de droite et d’extrême droite ont voté contre, tandis que 2 se sont abstenus.
Avec cette loi, “nous avançons vers une société plus humaine et plus juste (...) pour les personnes qui se trouvent dans une situation de grande souffrance et pour leurs familles”, a déclaré la ministre de la Santé, Carolina Darias.
En Europe, l’Espagne devient ainsi le quatrième pays à dépénaliser l’euthanasie, après les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Le parlement portugais a également voté fin janvier 2021 une loi légalisant l’euthanasie, mais la Cour constitutionnelle a retoqué lundi le texte, qui va être renvoyé aux députés.
En Espagne, cette loi autorise aussi bien l’euthanasie -c’est à dire lorsque le soignant provoque la mort du patient- que le suicide médicalement assisté- lorsque le patient prend lui-même la dose de produit prescrite pour se donner la mort.
Une légalisation sous strictes conditions
Elle prévoit que toute personne ayant “une maladie grave et incurable” ou des douleurs “chroniques le plaçant dans une situation d’incapacité” puisse demander l’aide du corps médical pour mourir et s’éviter ainsi “une souffrance intolérable”.
Des conditions strictes encadrent toutefois la démarche: la personne, espagnole ou résidant dans le pays, doit ainsi être “capable et consciente” lorsqu’elle fait la demande, qui doit être formulée par écrit “sans pression extérieure” et renouvelée quinze jours plus tard.
Le médecin pourra toujours rejeter cette demande s’il estime que ces critères ne sont pas remplis. En outre, elle devra être approuvée par un autre médecin et recevoir le feu vert d’une commission d’évaluation.
De plus, n’importe quel professionnel de la santé pourra faire valoir “son objection de conscience” et refuser de participer à la procédure, prise en charge par le système public de santé.
L’adoption de cette loi intervient après plusieurs cas emblématiques dans le pays au cours des dernières décennies, dont celui de Ramón Sampedro, tétraplégique incarné à l’écran par Javier Bardem dans le film oscarisé “Mar adentro”.
C’est une victoire “pour les gens qui pourront en bénéficier”, et aussi “pour Ramón”, s’est félicitée auprès de l’AFP Ramona Maneiro, l’amie de Ramón Sampedro qui l’a aidé à mourir en 1998.
Manifestant devant la Chambre des députés avec des organisations défendant le droit à mourir dignement, Asun Gómez Bueno, dont le mari atteint de sclérose en plaques est mort à 50 ans après des années de souffrance, a, elle, salué un “jour très heureux”.
“On me traitait d’assassine car je voulais aider mon mari à arrêter de souffrir”, a-t-elle dénoncé.
Un “homicide” pour l’Église catholique
L’Église catholique, tout comme la droite et l’extrême droite, sont, en revanche, vent debout contre cette réforme, dont l’application suscite, par ailleurs, les interrogations de certains médecins.
L’euthanasie “est toujours une forme d’homicide” et “plutôt que de défendre la vie”, l’Etat “devient responsable de la mort infligée”, a ainsi dénoncé la Conférence Episcopale Espagnole.
Députée du parti d’extrême droite Vox, Lourdes Méndez Monasterio, a pour sa part affirmé que l’adoption de cette loi était une “ignominie” et dénoncé “la culture de (...) la mort”. Depuis le milieu des années 1980, lorsque l’euthanasie a surgi dans le débat public en Espagne, plusieurs cas retentissants ont défrayé la chronique.
Outre le cas de Ramón Sampedro, celui de Luis Montes, médecin anesthésiste accusé d’avoir donné la mort à 73 patients en phase terminale, a également fait couler beaucoup d’encre jusqu’à ce que son dossier soit classé par la justice en 2007. Plus récemment, en 2019, Ángel Hernández a été arrêté pour avoir aidé sa femme, atteinte de sclérose en plaques, à mourir. Il attend d’être jugé.
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