L'explosion du complexe nucléaire de Natanz en dit long sur la fragilité de l'Iran
Le 11 avril 2021, la presse iranienne annonce qu’une explosion a eu lieu au moment où le directeur de l’OIEA (l’Organisation iranienne de l’énergie atomique), Behrouz Kamalvandi rendait visite aux installations nouvellement réparées de Natanz....
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Le 11 avril 2021, la presse iranienne annonce qu’une explosion a eu lieu au moment où le directeur de l’OIEA (l’Organisation iranienne de l’énergie atomique), Behrouz Kamalvandi rendait visite aux installations nouvellement réparées de Natanz. Le lendemain, la République islamique accuse Israël.
Ce n’est pas la 1ère fois que cette usine d’enrichissement d’uranium, située à Natanz, à 250 kilomètres au sud de Téhéran, est visée. Le 5 juillet 2020, elle a subi une vaste cyber-attaque et ses systèmes de centrifugation ont été largement endommagés. Quelques mois plus tard, le 27 novembre 2020, l’assassinat de l’un des hauts responsables du régime, considéré comme le père du nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh a ramené le souvenir d’autres assassinats qui ont ciblé une dizaine de spécialistes du régime il y a dix ans.
Tombé en plein milieu de la reprise de leurs négociations avec la communauté internationale, y compris avec les États-Unis, l’incident a mis les ayatollahs au pied du mur.
Après chaque sabotage, attaque ou assassinat, les ayatollahs accusent les Israéliens et leur promettent la pire des vengeances. Alors que depuis plus de quarante ans ils crient haut et fort: “mort à Israël” (marg bar Esrael), et souhaitent officiellement la disparition de ce pays, il semblerait pourtant que les “soldats invisibles de Moïse” (le surnom que les Iraniens donnent aux agents du Mossad) soient plus efficaces pour déstabiliser le régime iranien.
Si Israël est vraiment impliqué dans les attaques successives visant ces installations ultrasensibles et ces responsables nucléaires iraniens, cela pourrait signifier que ce pays ne croit pas en une solution diplomatique avec la République islamique. De toute façon, pour Tel Aviv, il y a une intransigeance constante vis-à-vis de Téhéran: pas de bombe nucléaire.
Mais ce que ces attaques mettent en évidence, c’est que le système de sécurité des ayatollahs est particulièrement défaillant. Les Pasdaran (les soldats de l’armée révolutionnaire) savent étouffer dans l’œuf les contestations populaires et tuer leurs compatriotes sans défense, mais au cœur même du pays, ils ne parviennent pas à protéger ces systèmes de centrifugation qui sont la fierté de leur régime.
Tombé en plein milieu de la reprise de leurs négociations avec la communauté internationale, y compris avec les États-Unis, l’incident du dimanche 11 avril a mis les ayatollahs au pied du mur.
Depuis l’arrivée du nouveau locataire de la Maison Blanche, les ayatollahs espèrent la levée immédiate des sanctions pour remédier à l’état catastrophique de l’économie iranienne: seulement 4 milliards de dollars de réserves officielles brutes en 2020 contre 122,5 milliards de dollars en 2018. Les caisses vides de l’État pressent les ayatollahs de trouver un accord pour lever les sanctions, c’est pourquoi ils ne peuvent pas se permettre d’entrer en conflit direct avec les Israéliens. De toute évidence, un régime qui n’est pas capable de protéger ses installations ni ses personnels nucléaires ne serait pas non plus en mesure de faire la guerre à un pays doté d’une armée puissante comme Tsahal.
Depuis l’arrivée du nouveau locataire de la Maison Blanche, les ayatollahs espèrent la levée immédiate des sanctions pour remédier à l’état catastrophique de l’économie iranienne.
Mais le silence de la République islamique face aux attaques successives qui sont imputées à Israël déstabiliserait avant tout une partie des Iraniens qui soutiennent encore le régime et qui sont d’autant plus précieux pour lui qu’ils sont minoritaires. Après chaque attaque, ceux-ci attendent que Téhéran se montre à la hauteur de ses prétentions et remette en place les Israéliens, en vain. La déclaration d’hier de Téhéran quant à un enrichissement de l’uranium de 60% et l’attaque contre le navire, appartenant à une société israélienne, augmentent certes la tension entre les deux pays, mais on est encore bien loin de la vengeance promise par les ayatollahs.
Depuis l’annonce dans la presse iranienne du “sabotage” de l’usine nucléaire de Natanz, de violentes disputes éclatent entre les défenseurs régime qui se déchirent. Les uns accusent le gouvernement et demandent la mise en examen rapide du président Rouhani, voire son exécution, pour avoir signé l’accord de Vienne, affaiblissant ainsi la République islamique. Les autres pointent du doigt le rôle néfaste des Pasdaran (les soldats de l’armée révolutionnaire du régime) dans les affaires étrangères du pays. Cependant, personne n’ose critiquer ouvertement le Guide de la République islamique, l’ayatollah Khamenei, qui décide de tout dans ce pays, sans jamais accepter les conséquences de sa diplomatie belliqueuse.
Pendant que la République islamique ne sait pas sur quel pied danser, nombreux sont les Iraniens qui se moquent de leurs dirigeants: ces dirigeants qui ne savent que terroriser leur propre peuple mais qui sont si fragiles face aux attaques étrangères.
Pour Israël, il y a une intransigeance vis-à-vis de Téhéran: pas de bombe nucléaire. Si le pays est impliqué dans les attaques, cela pourrait signifier qu'il ne croit pas en une solution diplomatique.
Sur les réseaux sociaux persans, les internautes inventent des blagues d’autant plus drôles qu’impossibles à traduire en français pour ridiculiser un régime qui veut tenir tête aux grandes puissances du monde, mais qui n’arrive même pas à sauver la peau de ses dirigeants. Dès l’annonce de l’explosion de Natanz, une lueur d’espoir est apparue quant à la possibilité de l’effondrement imminent du régime, dans le contexte d’extrême morosité faisant suite à la signature de l’accord de partenariat stratégique avec la Chine[1].
Terrorisés par la répression sanguinaire du novembre 2019, tous ceux qui ont été violemment réprimés pour avoir critiqué la politique économique des ayatollahs jubilent de voir la fragilité de ces derniers qui tentent de se protéger de ces Israéliens qui osent frapper là où ils veulent, déstabilisant ainsi les sphères les plus secrètes du régime islamique.
[1] Ce vaste accord, estimé honteux par les Iraniens, prévoit un investissement chinois de 400 milliards de dollars dans l’économie iranienne pendant 25 ans, en contrepartie d’un accès illimité aux ressources naturelles du pays. Voir l’article de l’auteure dans le Figaro: Pourquoi l’accord mystérieux avec la Chine inquiète tant, le 28/7/20.
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