Lisa Joy (”Westworld”) bascule brillamment sur grand écran avec “Reminiscence”

Il aura suffi d’un film et d’une série à Lisa Joy pour imposer un univers d’autrice. Cocréatrice de Westworld avec son compagnon Jonathan Nolan (frère de…) et réalisatrice de ce 1er long métrage intéressant, la jeune femme rêve de mondes qui...

Lisa Joy (”Westworld”) bascule brillamment sur grand écran avec “Reminiscence”

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Il aura suffi d’un film et d’une série à Lisa Joy pour imposer un univers d’autrice. Cocréatrice de Westworld avec son compagnon Jonathan Nolan (frère de…) et réalisatrice de ce 1er long métrage intéressant, la jeune femme rêve de mondes qui s’accordent à nos désirs.

Marchand de rêves

Dans Westworld, ce rêve d’un monde parfaitement accordé aux désirs de ceux et celles qui le parcourent se déployait dans l’espace : il prenait la forme d’un très vaste Luna Park où des client·es fortuné·es fournissaient, clés en main, à de démiurgiques entrepreneurs d’illusions le scénario des expériences qu’ils et elles avaient envie de vivre : chasseur de prime dans l’Ouest sauvage ou samouraï dans le Japon féodal. Reminiscence exploite le même fantasme, mais le déplie dans le temps. Hugh Jackman y interprète un marchand de rêves qui immerge ses client·es dans un caisson amniotique et leur permet de replonger, grâce à de savantes électrodes, dans les fragments de leur existence passée qu’ils et elles ont envie de revivre. “Rien n’est plus addictif que le passé”, entend-on en voix off dès les 1ères images du récit. 

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De Westworld à Reminiscence, il y a clairement un repli des utopies, un désenchantement quant à la possibilité de vivre des vies rêvées. Au rêve conquérant de s’acheter une autre vie (fût-elle sous cloche et peuplée de figurant·es robotiques) succède le retranchement sur ses petits bouts de bonheurs passés serrés très forts comme des doudous, petites bulles fœtales dans lesquelles le sujet déçu de son existence se réfugie.

Addiction au passé

C’est la part la plus émouvante du film, et aussi la plus juste sur le fond de l’air désillusionné de notre temps. Reminiscence décrit un monde où quasiment plus personne n’a assez de ressources pour se projeter dans le futur. Il faut dire que, dans cette dystopie, une bonne partie de la planète a été engloutie par une crue géante. Miami surnage dans les eaux et une poignée d’ultra-riches domine une humanité sur le carreau.

L’addiction au passé n’est pas le monopole des personnages en mal de consolation du film. C’est aussi la marque stylistique de l’autrice, Lisa Joy, qui déjà, dans Westworld, entre western et chambara (cinéma japonais de bataille de sabre), pastichait avec gourmandise les genres cinématographiques anciens. Au cœur du décorum SF de Reminiscence, c’est un autre genre qu’elle travaille secrètement : le film noir poisseux des années 1940.

Hugh Jackman a la tristesse déphasée des héros de Chandler. L’énigmatique chanteuse qui le fait cavaler et dont la disparition le torture est une pure vamp de film noir. Mais avec une conscience avisée de son époque, Lisa Joy retourne ce stéréotype genré de la femme fatale (on ne spoilera pas) et opère une résolution narrative remarquable de négativité hantée. Un beau 1er film, donc.

Reminiscence de Lisa Joy, avec Hugh Jackman, Rebecca Ferguson, Thandiwe Newton (É.-U., 1 h 56, 2021). En salle le 25 août.

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