M. Blanquer, beaucoup d'élèves décrochent et ne seront pas prêts pour le bac

Monsieur le ministre de l’Éducation,Mon enfant, qui est né en 2003, fait partie des milliers de lycéens qui essuient les plâtres du nouveau Bac 2021. Être les 1ers à bénéficier d’une réforme n’est pas toujours un désavantage et cela peut apporter...

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Des élèves portant des masques arrivent pour apprendre le résultat du baccalauréat au lycée Jean-de-La-Fontaine dans le 16e arrondissement de Paris, le 7 juillet 2020.  (Photo by MARTIN BUREAU/AFP via Getty Images)

Monsieur le ministre de l’Éducation,

Mon enfant, qui est né en 2003, fait partie des milliers de lycéens qui essuient les plâtres du nouveau Bac 2021. Être les 1ers à bénéficier d’une réforme n’est pas toujours un désavantage et cela peut apporter aux élèves une certaine fierté d’avoir fait partie de cette nouvelle aventure… Mais cela s’entendrait toujours si nous n’étions pas en pleine pandémie depuis plus d’un an.

Pourtant, lorsque ce nouveau bac nous a été annoncé alors que nos enfants étaient en classe de troisième, j’étais particulièrement confiante et je communiquais mon enthousiasme à tous les parents qui m’interrogeaient à ce sujet.

Certes, à l’entrée au lycée, les contours de cette réforme étaient encore flous et nous comprenions que l’équipe éducative n’était pas plus informée que nous mais nos enfants semblaient portés par ce nouveau projet.

 

Je me dois, au nom des enfants, de vous alerter sur le dramatique déséquilibre et l'injustice qui sont en train de s’inscrire dans l’Histoire de l’éducation française.

 

Nous avons même vu nos enfants mûrir rapidement en arrivant en classe de 1ère. Le contrôle continu qui comptait dans le calcul du bac leur rappelait sans cesse que leur travail leur permettrait d’avoir accès aux meilleures formations après la terminale. Ils s’investissaient à fond et cela faisait totalement écho au concept de maturité que vous aviez associé à ce nouveau bac.

Mais le 12 mars 2020, le Président de la République Emmanuel Macron a annoncé la fermeture des écoles et le beau chemin qui devait mener nos enfants vers le nouveau Bac est devenu de plus en plus sinueux et pour certains d’entre eux il les a rapprochés d’un dangereux précipice: celui de l’échec et du décrochage scolaire...

Alors Monsieur Blanquer, quand vous annoncez aux médias comme jeudi que “vous avez trouvé le chemin d’équilibre” ou lorsque vous avez pris la parole sur France Inter le 2 mars dernier et que vous avez répondu à une auditrice qui vous alertait sur l’inégalité qui se creusait entre les lycées publics (qui respectent les consignes gouvernementales) et les lycées privés (souvent ouverts), qu’il n’y avait pas d’inégalité puisque les cours que les élèves ne pouvaient pas suivre en présentiel étaient proposés à distance: malheureusement, tous les établissements ne possèdent pas l’équipement et le réseau wifi adaptés pour assurer ces enseignements en distanciel…

Malgré tout le respect que j’ai pour votre fonction et la conscience que vous devez gérer une crise sans précédent, je me dois, au nom des enfants, de vous contredire et vous alerter sur le dramatique déséquilibre et la consternante injustice qui sont en train de s’inscrire dans l’Histoire de l’éducation française avec cette pandémie.

Les différences se sont malheureusement révélées dès le 13 mars 2020 lorsqu’il a fallu mettre en place l’enseignement à distance. Tous les élèves n’avaient pas forcément l’équipement pour suivre la classe depuis leur domicile. Ou parfois, même s’ils avaient l’équipement informatique, ils leur manquaient la motivation ou suffisamment de confiance en eux pour être présents derrière un écran.

 

Tous les élèves n’ont pas les mêmes capacités d’adaptation pour garder confiance lorsque le rythme habituel est bouleversé et que les relations avec leurs pairs sont limitées.

 

J’ai admiré l’engagement des enseignants qui ont œuvré pour accompagner les élèves pendant les longues semaines de confinement. Et il leur fallait du courage pour faire cours alors qu’il n’y avait parfois que trois élèves connectés!

En 2020, vous avez décidé d’annuler les E3C2 ainsi que les épreuves de français. Et des milliers de lycéens et leurs parents ont été rassurés même si déjà le baccalauréat devenait inégalitaire. En effet, certains lycées ont alors augmenté les moyennes de français pendant que d’autres respectaient les consignes que vous aviez données.

En novembre dernier, pour répondre à l’aggravation de l’épidémie de Covid-19, vous avez annoncé un protocole sanitaire renforcé dans les lycées, qui pouvaient basculer vers davantage de cours à distance à condition de conserver au moins 50% de cours en présentiel pour chaque élève. Mais encore une fois, tous les établissements n’ont pas respecté les consignes et ce sont encore les élèves qui seront pénalisés pour leur baccalauréat.

Tous les élèves n’ont pas les mêmes capacités d’adaptation pour garder confiance en eux lorsque le rythme habituel est bouleversé et que les relations avec leurs pairs sont limitées. Lors des conseils de classe, nous entendons causer d’adolescents qui ont perdu pied et qui n’arrivent plus à suivre. Certains doivent être accompagnés par des psychologues… Et même les bons élèves pourront faire le constat amer de ne pas avoir eu la même chance que les autres pour ce nouveau bac en fonction du lycée qu’ils fréquentent. Ainsi, en tant que représentant des parents d’élèves, je dois vous informer que de nombreux jeunes ne seront pas prêts pour affronter l’épreuve de philosophie annoncée début juin. Et malheureusement, l’ensemble des lycéens français n’arriveront pas devant leur copie avec la même préparation. Ceux qui n’étaient pas en cours en demi-jauge seront bien plus en avance sur le programme que les élèves qui fréquentaient un lycée respectueux des règles sanitaires.

 

Malheureusement, l’ensemble des lycéens français n’arriveront pas devant leur copie avec la même préparation.

 

Alors, si vous voulez que les bacheliers 2021 avancent dans la vie en ayant confiance en la justice sociale, ne leur demandez pas d’affronter cette épreuve de philosophie et invitez-les plutôt à se concentrer pour les deux mois à venir sur l’épreuve du grand oral pour laquelle ils auront davantage de temps pour être accompagnés par leurs enseignants et mettre un coup de projecteur sur leur projet professionnel.

Ce grand oral, qui sera le point final de ces mois d’incertitude, leur permettra de sortir heureux et fiers d’avoir été les 1ers à porter, malgré la crise sanitaire, cette réforme du baccalauréat.

 

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