Ma dernière expérience professionnelle m'a fait comprendre que je ne dois plus renier mes valeurs - BLOG

TRAVAIL - Je suis une femme lambda, pas franchement optimiste, mais pas pessimiste non plus, sociable, mais incapable de transformer le contact en opportunité. Ferme, ma détermination à “rayer le parquet” s’est transformée en désir d’une existence...

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Certes, l’envie de me trouver m’a menée sur des chemins sinueux, affronter des problématiques complexes et existentielles mais je remarque que les personnes qui m’inspirent ont su rester cohérentes avec leurs valeurs, celles-là même que j’ai foulées du pied en acceptant une telle offre.

TRAVAIL - Je suis une femme lambda, pas franchement optimiste, mais pas pessimiste non plus, sociable, mais incapable de transformer le contact en opportunité. Ferme, ma détermination à “rayer le parquet” s’est transformée en désir d’une existence cohérente après quelques épuisements professionnels. Sans avoir les mêmes envies de dévorer le globe, je suis imprégnée de mes rencontres avec des globe-trotteurs, créateurs de projets indépendants, à l’esprit ouvert et à la capacité de rebond indéfectible. Cependant, la voie de la cohérence professionnelle est difficile. En effet, je suis à la recherche d’une insertion professionnelle dans un climat de crise, de peur du mauvais recrutement de l’employeur qui n’investit pas dans l’intégration de nouveaux salariés, et de coupes de l’État sur les acquis sociaux comme le chômage.  En cette heure d’incertitudes, je traverse un revers professionnel, et je me demande donc pourquoi et quelles sont les conditions de mon rebond?

J’ai connu plusieurs expériences professionnelles infructueuses en l’espace de deux ans et demi

Pour expliquer, alors que pour beaucoup, la saison fleure bon les vacances, j’ai atterri là, dans un petit duplex d’une métropole à l’atmosphère étouffante en ce jour de juillet. Je reçois les appels comme les avis toujours tranchés de mes proches quant à ma situation. En deux ans et demi, j’ai raté le barreau deux fois, ouvert un blog que j’ai fermé, me suis démenée pour acquérir une agence d’assurances aux bilans finalement non viables, lorsque j’ai fini par trouver un emploi de juriste dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. Le deal était de remplacer la responsable juridique pendant son congé maternité. En y pensant, c’est un peu fou, je n’ai pas d’expérience en tant que juriste à proprement causer, mais c’est un beau défi, une belle expérience, je me lance. Je déménage à 250 kilomètres, loge dans ma famille, puis chez des potes, avant de me trouver un petit nid.

… J’étais prête à tout pour acquérir une crédibilité dans un nouveau métier

Pour résumer, malgré une mission scindée en plusieurs petits Contrats à Durée Déterminée (CDD), ce poste devait être un tremplin pour plus de stabilité (oui). En effet, cette expérience, initialement prévue pour huit mois m’aurait apportée plus de crédibilité en tant que juriste, caressant mes espoirs d’exercer un métier alliant juridique et connaissances techniques de mon domaine initial. Cela me semblait un bon compromis de reconversion, bien que me rappelant ma 1ère année de jeune travailleuse. J’accepte un statut de technicienne pas vraiment en phase avec la nature de la mission. Comme me l’ont dit, mes employeurs ont fait confiance à mon CV “polyvalent”. Moi, j’étais confiante, j’ai toujours eu à cœur de réussir mes missions. Cependant patatras, je ne valide pas la “période d’essai” incarnée dans un 1er CDD d’un mois.

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Je ne me suis jamais sentie aussi mal traitée professionnellement – Les temps sont troubles –

Le vers était dans le fruit et je feignais de ne pas le voir. En effet, en acceptant de telles conditions, je cautionnais le comportement de cette entreprise, que je perçois maintenant comme utilisant les salariés comme une matière 1ère jetable. Cela allait contre les principes d’une solidarité sociale certes, mais aussi contre ma conception de la cohésion sociale. Il fallait cependant que je m’en sorte, que je rebondisse, aussi, j’ai ignoré le fait que l’annonce du poste que je venais d’obtenir circulait toujours sur internet. Lorsque j’ai raconté cela à une amie experte en ressources humaines, elle s’exclame “je suis désolée de te le dire, mais c’est vraiment pas cool, ils t’ont fait faire tous ces kilomètres alors qu’il y a de fortes probabilités pour qu’ils aient continué le processus de recrutement, te faisant combler le poste en attendant, au cas où ils ne trouveraient personne”.

Une mission non concluante est souvent perçue comme étant la faute exclusive du salarié

Je repense en effet au fait que lorsque je demandais des informations à mes collègues, je me suis vue convoquée sous prétexte que cela ne se faisait pas. J’étais ahurie. Outre le fait, que demander conseil est un moyen de lier contact en entreprise, et de connaître les modes de fonctionnement d’un environnement nouveau, cela revenait à me couper du contact de mes collègues, à une mise en quarantaine. Aussi, lorsqu’en début de réunion je demandais de me faire un topo sur les sujets abordés, on me répondait que l’on verrait cela plus tard, cependant, envois de mails, appels téléphoniques pour m’enquérir des besoins et de l’existant ne trouvaient pas de place dans les agendas “très chargés”. Aussi, lorsque mon entourage m’a demandé “qu’as-tu fait pour ne pas valider cette mission” je sentais l’opprobre s’abattre sur moi, c’est forcément que je n’avais pas été performante. Les réactions de mes proches m’ont en réalité plus irritée que le comportement de mon employeur.

Pas en phase avec la culture de l’entreprise, la prochaine fois je choisirais mon employeur

Les réactions inquiètes ou affolées, étaient à l’opposé de mon sentiment de libération lorsqu’à demi-mots, mon employeur s’est excusé de m’avoir fait venir alors qu’“ils n’avaient pas le temps de m’aider à m’intégrer au poste”. Non, je n’ai pas senti de colère ou de rancœur, je me suis juste dit que c’était la fin d’une mascarade et que c’était une étape de plus dans l’optique de retrouver des repères professionnels aux valeurs saines. La prochaine fois, je choisirai mieux mon employeur. En attendant, je me retrouve au chômage. Alors, oui, lorsque l’amateurisme de certains professionnels confine à la bêtise, j’estime que nous avons le droit de choisir notre employeur. Oui, on a le droit de tâtonner, de se tromper, de persévérer et ceci n’est pas un luxe. Dans mon cas j’étais prête à prendre un risque. J’ai perdu beaucoup d’argent pour m’installer puis finalement faire machine arrière dans mon déménagement, mais cela ne sont que des considérations matérielles. En effet, une telle expérience peut briser une personne, celle qui ne se croirait pas à la hauteur, celle qui prendrait bien plus que sa part de torts, celle se pensant donc inapte pour le monde du travail.

Après cette expérience je suis convaincue que choisir son employeur ne doit pas être un luxe

Je ne dis pas que je ne crains pas l’avenir, mais la perspective de pouvoir encore bénéficier de certains amortisseurs sociaux comme le chômage me préserve de la précarité. Le comportement de mon employeur qui me proposait une succession de CDD, puis continuant certainement à chercher un autre candidat durant ma mission était le reflet d’une société au marché du travail sclérosé par la peur du mauvais recrutement, des coûts salariaux, etc. Ainsi, je pense que le 1er facteur de mon rebond est le fait de pouvoir bénéficier du système de protection sociale efficient. Trentenaire, sans enfant, je pouvais me payer le luxe d’un prêt à taux zéro de maman, je ne suis donc pas de ceux qui sont contre un marché de l’emploi plus flexible… pourvu que l’on ne meurtrisse pas de trop les acquis sociaux. Certes, je vais me lancer dans des missions d’intérim en attendant, mais je sais ne pas être démunie en cas de mauvaise expérience. Non, bien que guidée par le goût du défi, je ne pourrai pas me payer le luxe de connaître une nouvelle fois une telle expérience.

Merci à mon amie pour son sage conseil: “Annabelle tu vois toujours les choses en grand, prends le temps de te poser.”

Certes, l’envie de me trouver m’a menée sur des chemins sinueux, affronter des problématiques complexes et existentielles, mais je remarque que les personnes qui m’inspirent ont su rester cohérentes avec leurs valeurs, celles-là mêmes que j’ai foulées du pied en acceptant une telle offre. Le cheminement est difficile, risqué, mais je me rends compte qu’un retour en arrière est impossible. Certes je me suis “donnée à fond” dans mon travail, mais dès le début, je me sentais confortée par la durée déterminée du contrat, et dans mon for intérieur de moins en moins exalté par la mission; je n’étais donc pas à ma place. Je ne vibrais pas et peut-être que cela se sentait, je n’en sais rien. Ainsi, je pense qu’affirmation de sa valeur et cohérence existentielle sont les maîtres mots d’un rebond professionnel, encore plus en période de crise. De cette expérience, je me rends compte que si l’on nie soi-même qui l’on est, le monde du travail nous recadre à notre place. Durant le mois d’août à venir, comme chaque été depuis mon entrée dans le monde du travail, je vais donc réfléchir à ma rentrée, rien de nouveau sous le soleil, cependant, je me sens plus que jamais consciente de ma valeur qu’elle soit professionnelle ou humaine. Anciennement cadre dans des entreprises préservées, je descends ma tour d’Ivoire, et voici donc livré le précieux apport de mon expérience. Je ne regrette rien et je suis prête à prendre un emploi moins qualifié pourvu que mes valeurs personnelles soient respectées. Je comprends maintenant ce qu’est le souci de cohérence professionnelle.

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