Macron devait-il confiner plus tôt? Dès janvier, il connaissait les risques pour mars

CORONAVIRUS - “Je peux vous le dire: nous avons eu raison de ne pas confiner la France à la fin du mois de janvier parce qu’il n’y a pas eu l’explosion qui était prévue par tous les modèles.” Voici ce qu’a déclaré, on ne peut plus sûr de son...

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Jeudi 25 mars, Emmanuel Macron a affirmé qu'il avait eu raison de ne pas confiner le pays en février contre l'épidémie de covid-19. Une affirmation qui semble bien bancale au vu des recommandations scientifiques de l'époque.

CORONAVIRUS - “Je peux vous le dire: nous avons eu raison de ne pas confiner la France à la fin du mois de janvier parce qu’il n’y a pas eu l’explosion qui était prévue par tous les modèles.” Voici ce qu’a déclaré, on ne peut plus sûr de son fait, Emmanuel Macron après le sommet européen virtuel organisé le 25 mars autour de la question de la vaccination contre le covid-19. 

Dans la foulée, le chef de l’État a poursuivi dans le même registre. “Nous considérions qu’il y avait un risque, que le virus était là, qu’il circulait. Mais nous considérions aussi qu’avec le couvre-feu et avec les mesures de freinage qui étaient les nôtres, nous pouvions faire face sans qu’il y ait une flambée”, a-t-il précisé. Et de l’affirmer: “C’est ce qu’il s’est passé.” 

Une assurance et un aplomb qui ont d’autant plus fait causer qu’ils succédaient, 24 heures plus tard, à une prise de parole de la chancelière Angela Merkel, dans laquelle elle présentait des excuses publiques à la population allemande, reconnaissant avoir commis une erreur en voulant instaurer un confinement strict au moment du week-end de Pâques. Un projet finalement abandonné par notre voisin. 

Des mesures “coercitives” réclamées dès janvier

Mais c’est donc sur une tout autre tonalité qu’Emmanuel Macron a décidé de jouer sa partition face à la presse, ce jeudi. “Est-ce que le 29 janvier, nous aurions dû confiner le pays comme certains le disaient et parce que certains modèles montraient que nous allions connaître une flambée en février? Nous en avons fait l’expérience collective, réelle: non”, a-t-il encore affirmé, prenant les Français pour témoins. 

Sauf qu’en réalité, si la question d’un confinement en février s’est posée, c’est davantage pour anticiper un futur rebond épidémique d’ampleur au printemps que pour faire face à un pic imminent. Car dès le milieu du mois de janvier, de nombreuses personnalités scientifiques respectées (et même consultées par l’exécutif) ont recommandé de manière pressante l’instauration d’un confinement strict au mois de février. On peut par exemple citer l’infectiologue Karine Lacombe, qui prévoyait, dès le 20 janvier, des mois de mars et avril “extrêmement durs”.

Au contraire de ce qu’affirmait jeudi Emmanuel Macron, elle décrivait ainsi une situation en train de se détériorer, avec la crainte d’une “augmentation bien plus importante” du nombre de cas “dans les semaines à venir”. Soit exactement ce qu’il s’est produit. Par conséquent, la cheffe de service des maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, recommandait de prendre des mesures “plus coercitives” que le simple couvre-feu.

 

Le rôle joué par les variants était prévu

Ce jeudi, Emmanuel Macron a aussi déclaré que l’accélération que nous vivons actuellement ne s’était déclenchée qu’au mois de mars, “entre le 8 et le 10” et qu’elle s’accompagne actuellement d’une augmentation des hospitalisations. “De manière assez surprenante”, a ajouté le président de la République, précisant que “ceci correspond au fait que le variant britannique en particulier est devenu très majoritaire dans certains départements”. 

Or là encore, dès le mois de janvier, le chef de l’État avait les éléments en main pour que cette situation ne soit pas vécue avec “surprise”. Jean-François Delfraissy, le président du conseil scientifique qui conseille directement Emmanuel Macron, déclarait en effet le 24 janvier sur le plateau de BFMTV qu’un pic de contamination lié aux variants était à craindre pour le mois de mars. 

“On se rend compte qu’en continuant sans rien faire de plus nous allons nous trouver dans une situation extrêmement difficile dès la mi-mars”, précisait-il. Le 17 janvier, l’épidémiologiste et membre du Conseil scientifique Arnaud Fontanet disait peu ou prou la même chose au micro de LCI, avançant là encore la perspective d’une situation qui se dégraderait violemment à partir de la fin mars, début avril. Une prévision qui était ensuite détaillée le 29 janvier dans un avis du conseil scientifique axé sur les modélisations pour le mois de mars du fait de la progression des variants dans le pays. 

Et une fois de plus, ce n’était pas sur le mois de février qu’alertait le document, mais bien sur la suite à plus long terme. “L’émergence de variants du virus va rendre le contrôle de l’épidémie en France encore plus difficile dans les mois qui viennent”, écrivaient notamment les sages dans leur avis, plaidant pour un couvre-feu dès le mois de février (le 1er ou le 8) de manière, non pas à endiguer définitivement l’épidémie ou à éviter un pic occasionnel en février comme l’a dit Emmanuel Macron, mais bien à gagner du temps face au virus pour préparer la suite. 

Un confinement pour s’offrir du temps

Ainsi, parmi les avantages d’un confinement en février listés par le conseil scientifique, on retrouvait: la “construction d’une stratégie de dépistage dans les lieux à risque de circulation” grâce aux nouveaux tests (salivaires notamment), la possibilité de terminer la vaccination dans les Ehpad avant de déconfiner, d’établir une stratégie pour mieux prendre en charge les personnes vulnérables ou encore de poursuivre les recherches sur le séquençage des variants de manière à mieux les connaître et donc les combattre.

En résumé, le conseil scientifique ne prévoyait aucunement d’éviter un pic des contaminations et des hospitalisations en février en suggérant un confinement à cette période. Il réclamait en revanche du temps pour permettre au pays de mieux se préparer à la propagation inévitable des variants et pour mieux anticiper la vaccination et la protection des plus fragiles. 

“Je peux vous affirmer là que je n’ai aucun mea culpa à faire, ni aucun remord, ni aucun constat d’échec”, a finalement jugé Emmanuel Macron ce jeudi. Avant d’ajouter: “J’aurai toujours la même humilité: face à une épidémie, nous ne savons pas tout, on fait sans doute des erreurs, on fait de son mieux. Le tout est de corriger le plus vite possible ces erreurs.” Une leçon qu’il n’a pas forcément appliquée en refusant de reconnaître qu’il avait été prévenu très tôt des risques encourus (et devenus réalité) pour ce printemps 2021. 

À voir également sur Le HuffPost: Emmanuel Macron estime avoir “eu raison de ne pas reconfiner” fin janvier