Macron et le cannabis, une histoire de revirements pour aboutir à la tolérance zéro
POLITIQUE - Il veut “du bleu” pour lutter contre le vert. En pleine offensive régalienne, entre un déplacement à Montpellier sur le thème de la sécurité du quotidien, et un entretien fleuve au Figaro, presque intégralement consacré au sentiment...
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POLITIQUE - Il veut “du bleu” pour lutter contre le vert. En pleine offensive régalienne, entre un déplacement à Montpellier sur le thème de la sécurité du quotidien, et un entretien fleuve au Figaro, presque intégralement consacré au sentiment d’insécurité et aux questions qui en sont liées, Emmanuel Macron réveille les discussions politiques autour du cannabis.
Tout en martelant sa volonté de “ne laisser aucun répit aux trafiquants de drogue” afin de “faire reculer la délinquance”, le président de la République explique au quotidien vouloir lancer “un grand débat national sur la consommation de drogue et ses effets délétères.”
Car pour lui, une chose est désormais certaine: “dire que le haschisch est innocent est plus qu’un mensonge”: “Sur le plan cognitif, les effets sont désastreux”, rappelle-t-il en évoquant notamment les risques de déscolarisation chez les “jeunes”.
Quand Macron vantait les mérites de la dépénalisation
Pourtant, avant de développer cette ligne dure de tolérance zéro, le président de la République, qui a fait, de la sécurité une priorité pour la fin de son quinquennat, avec l’omniprésent Gérald Darmanin, a longtemps entretenu le flou quant à sa position sur ce débat sensible.
Emmanuel Macron candidat était effectivement bien moins catégorique. En septembre 2016, quelques jours après son départ du gouvernement et alors qu’il n’était pas officiellement dans la course à la présidence, il évoquait sur France Inter “l’efficacité” que la légalisation pourrait avoir sur la consommation de cannabis et les trafics, avant de plaider plus clairement, en novembre, dans son livre Révolution, pour la “dépénalisation”. “Il faut écouter les professionnels [qui expliquent qu’il] est vain de pénaliser systématiquement la consommation de cannabis”, disait-il, avançant la thèse d’une contravention pour les petites quantités.
Le 1er revirement date de février 2017. Dans une entrevue au Figaro, Emmanuel Macron se prononçait finalement pour la tolérance zéro, expliquant que “la dépénalisation des ‘petites doses’” ou les “peines symboliques (...) ne règlent rien.” Problème, son équipe de campagne expliquait alors que le candidat était favorable à la “contraventionalisation”. En clair, une contravention systématique pour les consommateurs, excluant de facto les poursuites judiciaires et donc la pénalisation.
“La drogue, c’est de la merde”
Une fois aux responsabilités, Emmanuel Macron avait définitivement tranché, en faveur de l’expérimentation de l’amende forfaitaire. Avec ce dispositif, le consommateur de cannabis est nécessairement condamné à payer immédiatement une amende (ce qui vise à désengorger les tribunaux et acte l’interdit) mais les forces de l’ordre ont tout de même la possibilité d’engager des poursuites pénales à son encontre.
Mais depuis que Gérald Darmanin est devenu ministre de l’Intérieur, et qu’Emmanuel Macron investit le terrain sécuritaire, l’exécutif joue surtout la carte de l’intransigeance totale. Le locataire de la place Beauvau martelait par exemple, “la drogue, c’est de la merde” en septembre 2020 sur LCI, en qualifiant la légalisation du cannabis comme de la “lâcheté intellectuelle.” Deux mois auparavant, en juillet 2020, Jean Castex avait annoncé, depuis Nice, la généralisation de l’amende forfaitaire, dans un contexte de recrudescence des violences.
▶️ #Cannabis.
— LCI (@LCI) September 14, 2020
???? @GDarmanin est "absolument contre" la légalisation. "Pour moi, c'est une lâcheté intellectuelle [...] 'La drogue, c'est de la merde', disait le spot télé. Eh bien on ne va pas légaliser cette merde".
???? L'Interview d'@EliMartichoux sur #La26. pic.twitter.com/gpAzvSa6Hu
Désormais, Emmanuel Macron assume de faire de la lutte contre les trafics et la consommation de drogue la pierre angulaire de sa stratégie pour assurer “un droit à une vie paisible”, selon ses mots. “Nous avons décidé d’accentuer notre action contre les trafics de stupéfiants, qui explosent. Christophe Castaner, Laurent Nuñez ont lancé ce travail, Gérald Darmanin l’a décliné sur tout le territoire national”, fait valoir le chef de l’État dans son entrevue au Figaro, publiée dimanche.
“On se roule un joint dans son salon et à la fin...”
Pour lui, “ces trafics forment la matrice économique de la violence dans notre pays. Les éradiquer par tous les moyens est devenu la mère des batailles, puisque la drogue innerve certains réseaux séparatistes mais aussi la délinquance du quotidien, y compris dans les petites villes épargnées jusqu’ici.”
“Ne laisser aucun répit aux trafiquants de drogue, c’est faire reculer la délinquance partout”, martèle encore le chef de l’État, allant jusqu’à pointer le rôle des consommateurs de cannabis: “on se roule un joint dans son salon et à la fin on alimente la plus importante des sources d’insécurité”.
On est loin de la thèse libérale développée à l’été 2016. Mais si elle illustre, sans doute, une forme de droitisation plus globale de la part d’Emmanuel Macron depuis le début de son quinquennat, cette position pourrait finalement se révéler à contre-courant.
Le débat sur la légalisation n’est effectivement plus le monopole des écologistes ou de formations de gauche. Il fait du chemin à droite. Dans une tribune publiée par le JDD en septembre 2020, trois maires Les Républicains (Châteauroux, Reims, Charleville-Mézières) appelaient à légaliser la consommation de cannabis, au nom de la “sécurité et de la salubrité publique.” Mais également dans la population. En mars dernier, 80% des Français ayant participé à une enquête menée par plusieurs députés LREM, se disait favorable à cette ouverture.
À voir également sur Le HuffPost: La légalisation du cannabis expérimentée à Reims? On est allé voir sur place