Marine Quéméré : “Ce que j’aime dans la musique, ce sont les trouvailles que tu entends après avoir réécouté une chanson”

Marine Quéméré rentre tout juste de Grèce quand on la retrouve dans un café du XVIIIe arrondissement parisien. Depuis quelques mois, elle est l’une des voix de Nouvelle Vague, le groupe de Marc Collin qui revisite les standards de la new wave,...

Marine Quéméré : “Ce que j’aime dans la musique, ce sont les trouvailles que tu entends après avoir réécouté une chanson”

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Marine Quéméré rentre tout juste de Grèce quand on la retrouve dans un café du XVIIIe arrondissement parisien. Depuis quelques mois, elle est l’une des voix de Nouvelle Vague, le groupe de Marc Collin qui revisite les standards de la new wave, et parcourt les scènes du monde entier (Europe, États-Unis, Amérique latine). “Je reviens de loin, rigole-t-elle. Sur scène, j’étais d’une timidité maladive, comme recroquevillée derrière mon micro. Ne pas avoir besoin de me planquer derrière un instrument, n’être qu’une voix, m’a permis d’apprendre à occuper la scène différemment”.

De bon augure avant sa date de la Boule Noire, dans le cadre des Inrocks Super Club aux côtés de Samson (croisé chez Bolides) et Geagea (vue chez Jeanne Added).

La quête mélodique 

Il y a deux ans, on découvrait le single Hélicoïdal, pièce d’orfèvrerie en français, à la fois sophistiquée, merveilleusement arrangée, et instantanément pop, prélude à la sortie d’un EP, Bande annonce, dévoilé au mois de mai dernier. Une triangulation pas évidente, dans la langue de Pierre Vassiliu. La rythmique est empruntée à l’afrobeat, le chant au jazz, la mélodie, exigeante et au cordeau, à la chanson psychédélique made in France autant qu’au soft rock US. Une certaine mélancolie de bord de mer pointe le bout de son nez. De source sûre, cette chanson a tapé dans les oreilles des consœurs et confrères musiciennes et musiciens de Marine. L’histoire aurait pu s’arrêter là : de la musique pour musicien·nes, avec ses petits événements sonores bien trouvés et ses contrechamps malins, signes d’une maîtrise totale de la grammaire pop. Mais ce single avait plus de hauteur de vue que cela.

Marine nous met au parfum : “Ce que j’aime dans la musique des autres, ce sont les trouvailles que tu n’entends qu’après avoir réécouté une chanson. Je prends l’exemple de ce morceau de James Taylor, Walking Man. À la fin, il y a ce gimmick de Rhodes qui se détache de la ligne mélodique et qui, infine, fait toute la beauté du morceau. C’est ce que je m’efforce de faire”. Pour Hélicoïdal, elle a d’abord esquissé la mélodie à la basse, avant de se retrouver dans une impasse, vite déblayée : “j’ai eu un mal de chien avec ce morceau, parce que la ligne mélodique, c’était la basse d’origine. Il a donc fallu trouver une nouvelle ligne de basse. Il y a beaucoup de couches dans mes morceaux. Mais c’est plutôt cool pour mon bassiste, qui se retrouve avec de belles mélodies à jouer”

Pierre Vassiliu, St. Vincent et Rickie Lee Jones en références

L’EP, Bande annonce, sort dix ans après un coup d’essai, Splash (2015), un disque mis en boîte avec le concours du père de Marine, compositeur et arrangeur pour le cinéma : “Deux EP en dix ans c’est un bon rythme. Pour Splash, c’était une véritable collaboration, tandis que pour Bande annonce, j’ai voulu tout faire toute seule. J’ai d’abord enregistré sur GarageBand. Les démos avaient une couleur bedroom pop à la Mac DeMarco, avec des grosses nappes et une voix très en avant, ça donnait quelque chose d’intéressant. Puis j’ai tout réenregistré en studio, mais c’est devenu hyper propre. J’avais perdu les aspérités des démos. Alors j’ai recommencé à zéro”

Marine Quéméré a grandi dans le Vexin, dans une maison isolée, loin dans la campagne. Au milieu des instruments, nécessairement. Sitars, guitares arrangées, pianos. Au dernier étage, se trouvait le studio de son père. Sa mère, elle, écoute Michael Jackson, Richard Gotainer, Pierre Vassiliu. Son frère du reggae (“j’en pouvais plus”, plaisante-t-elle, même si le seul groupe dont elle a furtivement fait partie au lycée donnait dans le reggae. Une histoire de garçon) et son père James Taylor, Paul Simon et Crosby, Still, Nash & Young. Au sujet de Vassiliu, elle dit : “Bien sûr, il y a quelque chose de sulfureux chez lui, mais de très romantique aussi. Il a une chaleur dans la voix qui fait tout passer. J’ai essayé de reprendre Viens ma belle un jour, mais ça ne marchait pas. C’était presque gênant. Mais chez lui, ça passe”

Vocalement, ses modèles sont plutôt Rickie Lee Jones, “qui a un placement de voix un peu jazz”, et Suzanne Vega. Mais son modèle ultime, c’est St. Vincent : “Je voulais être St. Vincent ! Ses trois 1ers albums sont incroyables”. Côté instrument, c’est par le piano qu’elle commence. Elle prend des cours, mais s’emmerde sévère et raccroche le solfège au bout d’un mois. À l’âge de 14 ans, elle écrit ses 1ers morceaux : “j’ai posté sur MySpace ces démos mises en boîte avec mon père, qui sonnaient hyper old school. Un peu années 1980, semi-ringardes, mais elles avaient un certain charme. J’ai tout de suite eu des coups de téléphone de majors, j’ai même eu quelques rendez-vous, mais je n’étais pas prête pour ça. Je ne savais même pas dans quelle direction je voulais vraiment aller”

Particulièrement attentive aux arrangements de ses morceaux (“une manière de s’exprimer, de mettre de la couleur et d’exalter tes influences musicales”), Marine Quéméré cite quelques-uns de ses contemporains, dont elle admire le travail : Forever Pavot, Cesar Precio, Gaetan Nonchalant, Côme Ranjard (liste non-exhaustive). C’est bien au cœur de cette scène française talentueuse qu’on situait la musicienne. 

En attendant le 1er album, actuellement en cours d’enregistrement, on aura l’occasion de la découvrir sur la scène de la Boule Noire, dans le cadre des Inrocks Super Club. 

EP : Bande annonce (À l’ouest records/Kwaidan)

En concert : le mercredi 27 mai, à la Boule Noire (Paris XVIII), dans le cadre des Inrocks Super Club