Martine Wonner, l'ex-LREM isolée par ses dérapages à tendance complotiste

POLITIQUE - La dernière aventure de Martine Wonner au Parlement ne fait plus sourire grand monde. La députée du Bas-Rhin, qui a siégé pendant trois ans aux côtés des marcheurs à l’Assemblée nationale, est aujourd’hui en passe d’être évincée...

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Martine Wonner, l'ex-LREM isolée par ses dérapages tendance complotiste

POLITIQUE - La dernière aventure de Martine Wonner au Parlement ne fait plus sourire grand monde. La députée du Bas-Rhin, qui a siégé pendant trois ans aux côtés des marcheurs à l’Assemblée nationale, est aujourd’hui en passe d’être évincée du groupe Libertés et Territoires, qui l’accueillait depuis juin 2020. En cause: une nouvelle sortie de route lors de la manifestation organisée à Paris, samedi 17 juillet, contre l’extension du pass sanitaire.

Présente aux côtés de l’ancien FN Florian Philippot ou du chanteur Francis Lalanne, celle qui, de “rebelle” en macronie est devenue égérie de la galaxie covido-sceptique au fil de la pandémie, a cru bon d’exhorter les participants à “faire le siège des causementaires” voire à “envahir leurs permanences” pour faire entendre leur désaccord. 

“Jamais nous n’accepterons cette dictature”, “nous devons refuser la ségrégation”, a ainsi clamé Martine Wonner depuis la tribune de cette manifestation aux slogans, parfois, très outranciers. Autant de mots qui ont en tout cas poussé le patron des députés LREM Christophe Castaner à souhaiter la saisine de la justice, tandis que le groupe causementaire Libertés et Territoires demandait à la députée de quitter ses rangs. Quoi qu’il en soit, son exclusion devrait être entérinée ce mardi 20 juillet. 

De l’aile gauche rebelle de LREM...

Si ses propos passent particulièrement mal au Palais Bourbon, c’est parce qu’ils interviennent à un moment où nombre de députés font l’objet de menaces de mort, depuis les mesures annoncées par Emmanuel Macron. Richard Ferrand, dont la permanence a été envahie, a d’ailleurs annoncé jeudi 15 juillet avoir porté plainte en sa qualité de président de l’Assemblée nationale, quand le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, demandait le lendemain le renforcement de la protection des élus locaux. 

Dans ce contexte pesant, Martine Wonner se défend d’avoir promu la force. “Est-ce que vous pensez vraiment que j’appelle à la violence?”, réagit-elle, ce lundi, auprès de RMC. “En fait, les citoyens m’ont interpellée et s’offusquent car ils n’arrivent jamais à joindre leur député. Ils n’ont pas de réponse, donc ce que je leur ai dit c’est d’aller au-devant des permanences”, explique encore la causementaire, en ajoutant toutefois: “le mot ‘envahir’ était peut-être sous le feu de l’action avec le micro en main”. 

Il n’empêche, l’élue du Bas-Rhin n’en est pas à son 1er dérapage ni, sans doute, à sa dernière incartade en marge de la crise sanitaire, qui marque un véritable tournant dans sa trajectoire de causementaire. Mais comment en est-elle arrivée là? Comment expliquer la radicalisation de cette psychiatre de formation dans son opposition à la politique d’un gouvernement qu’elle soutenait au début de son mandat?

À 57 ans, la députée, mère de trois enfants, se définissait, en juin 2020, comme “une femme de combat, de terrain et de convictions.” Une “rebelle”, selon ses propres mots, rapportés par Le Monde lors de son exclusion du groupe LREM. Elle venait de dire non au 1er plan de déconfinement, celui d’Édouard Philippe. De fait, bien avant ce crime de lèse-majesté, Martine Wonner a longtemps fait partie des députés “poil à gratter” de la macronie, votant contre la prorogation du glyphosate en mai 2018, tout comme contre la ratification du Ceta en juillet 2019, après s’être abstenue sur l’emblématique loi asile et immigration.

... au documentaire complotiste “Hold Up”

Mais c’est bien au travers de la pandémie de Covid-19 que l’élue alsacienne s’est faite un nom. Tour à tour, elle a pris position contre le masque (s’évertuant à porter une demi-visière dans l’hémicycle, quand les études prouvaient leur inefficacité) contre les vaccins à ARN messager (comme le sont ceux de Pfizer et Moderna) ou pour l’autorisation de l’hydroxychloroquine, avec le collectif “Laissons-les prescrire.”

En novembre 2020, la députée disait également “assumer” sa participation au documentaire sulfureux “Hold-up”, un pêle-mêle de près de trois heures offrant une tribune aux récits complotistes de médecins, chercheurs et sociologues soutenu par un montage rythmé, le tout sur fond de dénonciation d’une supposée manipulation mondiale. À tel point que plusieurs cautions politiques ou scientifiques du film, comme l’ancien ministre de la Santé Philippe Douste-Blazy, s’en sont désolidarisés. Pas Martine Wonner.

Alors complotiste, la médecin? “Dès que l’on s’écarte de la stratégie gouvernementale, dès que l’on remet en cause la parole d’Olivier Véran, de Jean Castex ou du président de la République, on est immédiatement catégorisé complotiste ou conspirationniste”, regrettait-elle auprès de L’Obs quand le documentaire affolait les compteurs de visionnage, ajoutant: “je vais vous dire, je suis en train de me dire que ça devient un adjectif de qualité. Douter, c’est fondamental”. Quelques semaines plus tard, elle demandait à Conspiracy Watch, le site de l’Observatoire du conspirationnisme et des théories du complot, de retirer toute publication la concernant.

Mais, bien davantage que ses interrogations, force est de constater que Martine Wonner s’est surtout faite le relais de nombreuses contre-vérités au Palais Bourbon. Dans la nuit du 1er au 2 octobre derniers, elle avait par exemple, en trois minutes d’interventions, affirmé que le virus perdait en virulence, que l’agence sanitaire américaine estimait que les masques “ne servent à rien” ou que la Belgique allait autoriser l’azythromycine et l’hydroxychloroquine. Tout faux. 

Le ministre de la Santé s’est d’ailleurs fait une spécialité de recadrer son ancienne collègue dans l’hémicycle. Toujours en octobre dernier, Olivier Véran jugeait ses propos d’une “gravité totale”, quand elle l’accusait de “souhaiter faire mourir des patients en réanimation” avec sa gestion de l’épidémie de coronavirus. Rebelote quelques mois plus tard, en février lorsqu’il avait dressé la liste de ses prises de position pour le moins controversées.

“Elle ne dit que des conneries”

Mais au-delà du monde politique, la députée du Bas-Rhin, qui devrait donc quitter son troisième groupe à l’Assemblée en quatre ans (en comptant le groupe éphémère EDS), est également dans le viseur de la communauté scientifique. Début juin, le collectif de médecins #NoFakeMed, qui lutte contre la désinformation en santé, a ainsi demandé à l’Ordre des médecins de se pencher sur son cas, quand plusieurs chercheurs en pointe sur le Covid-19 s’attachent sur Twitter à dézinguer pied à pied ses prises de parole. 

“Elle est psychiatre et députée. Elle a donc, hélas, une légitimité. Mais depuis le début de la crise, elle ne dit que des conneries”, grince auprès du HuffPost Mathias Wargon, directeur de l’Observatoire régional des soins non programmés d’Île-de-France et chef du service des urgences à Saint-Denis, qui pointe, lui aussi, les nombreux sujets sur lesquels l’élue du Bas-Rhin a été épinglée par la communauté scientifique. “Sur les masques elle a dit n’importe quoi, comme sur l’hydroxychloroquine ou le remdesivir”, poursuit le médecin, pas étonné de la voir dorénavant aux côtés des Florian Philippot, Francis Lalanne “ou autres populistes adeptes de la désinformation.”

Pour Mathias Wargon, “le vrai problème, c’est l’absence de réaction pendant plus d’un an”, notamment du côté du Conseil de l’Ordre des médecins ou de son groupe à l’Assemblée nationale. “Elle disait n’importe quoi, mais comme elle disait qu’elle était médecin, ça passait. Or, sur le plan purement scientifique, c’est que dalle Martine Wonner”, poursuit l’urgentiste, rappelant l’anecdote de son ”étude bidon” sur l’hydroxychloroquine publiée avec la gynécologue Violaine Guérin dans Asian Journal of Medicine and Health. Une revue méconnue que les détracteurs de la députée controversée ont piégée en y faisant paraître un papier loufoque sur l’hydroxychloroquine et les accidents de trottinette pour démontrer le manque de sérieux de cette publication.

Sollicitée par Le HuffPost pour répondre à ces nombreuses critiques, Martine Wonner n’a pas donné suite. Tout comme plusieurs de ses futurs ex-collègues au groupe Libertés et Territoires. L’un d’entre eux nous a toutefois répondu en dressant la liste des sujets “bien plus importants” à ses yeux, comme un espoir de voir ces polémiques bientôt derrière lui et les siens. Qu’ils se rassurent, la députée du Bas-Rhin a été élue en 2017 avec la promesse de ne pas aller au-delà de son mandat.

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