“Méduse”, l’envoûtant 1er film d’une cinéaste à suivre

Dès ses 1ers plans, Méduse envoûte par un doux sortilège qui, loin de nous pétrifier, rend de plus en plus alerte. Deux jeunes femmes, dont on ne tarde pas à comprendre qu’elles sont sœurs, y dévoilent leur quotidien fait de rituels étranges...

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Dès ses 1ers plans, Méduse envoûte par un doux sortilège qui, loin de nous pétrifier, rend de plus en plus alerte. Deux jeunes femmes, dont on ne tarde pas à comprendre qu’elles sont sœurs, y dévoilent leur quotidien fait de rituels étranges et immuables, à l’intérieur d’une grande demeure qu’elles sont seules à occuper. Depuis un accident qui a coûté la vie à leur mère et son autonomie à Clémence (Anamaria Vartolomei), Romane (Roxane Mesquida) s’occupe de sa petite sœur, dans la maison de leur grand-mère placée en hospice.

D’hommes, il n’est ainsi jamais question dans ce gynécée où les jours s’écoulent tristement au rythme des “bonne journée, à ce soir !” lancés par l’aînée partant travailler et laissant sa cadette, catatonique, compter les heures jusqu’au soir. Jusqu’à l’arrivée dans cet environnement doucereux d’un pompier apollonien (Arnaud Valois), qui va briser l’équilibre en s’immisçant, pourtant sans malice, entre les deux sœurs.

Monstre castrateur

Une forme discrète de fantastique s’invite au long de Méduse, sans toutefois prendre le pas sur le réalisme psychologique, volontiers vénéneux. Sophie Lévy, dont c’est le 1er long métrage, cite la mythologie grecque : par le titre (qui fait écho au monstre castrateur par excellence), par des inserts sur des peintures (un peu sursignifiantes, seul bémol d’une mise en scène très élégante et subtile, tout en glissements soyeux) et par la présence appuyée d’une statue de Minotaure sur la terrasse. Soit.

Mais la force de son huis clos réalisé à l’économie est d’abord de ne jamais casser le fil (d’Ariane) qui nous tient suspendu·es aux soubresauts émotionnels de ses personnages, servis par un impeccable trio d’acteur·trices. À son meilleur, elle fait ressentir les choses plus qu’elle ne les explicite.

Si le dispositif peut rappeler Bergman, la présence de la trop rare Roxane Mesquida, délicieusement ambiguë, évoque immanquablement le cinéma de Catherine Breillat, qui l’avait révélée avec À ma sœur ! en 2001. Moins tonitruante mais tout aussi trouble que son illustre aînée, Sophie Lévy réussit en tout cas son entrée en matière et donne envie d’en voir plus.

Méduse de Sophie Lévy, avec Roxane Mesquida, Arnaud Valois, Anamaria Vartolomei (Fr., 2022, 1 h 26). En salle le 26 octobre.