Monsieur le Président, combien vaut la vie d’une femme?

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES — Monsieur le Président,Vous avez souhaité faire de la lutte contre les violences faites aux femmes une grande cause nationale.Votre volonté affichée lors du 25 novembre 2020, où vous avez rendu hommage aux femmes...

Monsieur le Président, combien vaut la vie d’une femme?

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Il faut des moyens financiers et humains pour que ces femmes soient réellement protégées et pour que la justice, la police et les associations soient à la hauteur de leurs missions. Ce n’est qu’au prix d’une meilleure prise en charge que nous éviterons la litanie des meurtres et des mutilations.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES — Monsieur le Président,

Vous avez souhaité faire de la lutte contre les violences faites aux femmes une grande cause nationale.

Votre volonté affichée lors du 25 novembre 2020, où vous avez rendu hommage aux femmes assassinées par leur compagnon ou ex, est depuis bien écornée.

Et pour vous le démontrer, rien ne vaut la réalité, de celle que nous vivons, ici dans le Puy-de-Dôme, comme cela pourrait être ailleurs en France.

Elle s’appelle M*., elle aurait pu être la 15e victime de féminicide depuis le début de cette année, venue gonfler la longue liste depuis le début de votre quinquennat: 532 femmes assassinées. (source collectif “Féminicides par compagnon ou ex”)

Madame a vécu 28 ans avec son compagnon. Sa vie de couple est ponctuée de violences psychologiques et d’humiliations. Elle décide de se séparer.

Elle a fait ce que vous lui avez dit. Elle est partie, mais elle est toujours en danger.

Mais monsieur ne supporte pas son départ. Il est fou de rage, c’est insupportable pour lui de perdre sa proie. Il va continuer les violences et les intimidations.

Madame dépose plainte, une première fois, suite à un guet-apens qu’il lui tend avec l’aide d’un complice où il l’agressera violemment. 

Puis il viendra caillasser ses fenêtres, la menacer de mort, et à chaque fois madame déposera plainte.

Elle a fait ce que vous lui avez dit. Elle a déposé trois plaintes, toutes classées sans suite. Elle est toujours en danger.

Madame prend alors une avocate et demande de l’aide à une association de victimes. 

Madame a peur, terriblement peur, elle sait que monsieur est capable de tout. Elle sait que monsieur est armé, qu’il est passionné par le tir, qu’il fabrique lui-même ses munitions… elle a peur.

Elle a fait ce que vous lui avez dit. Elle a cherché de l’aide, mais elle est toujours en danger.

L’avocate agit vite. Elle sent l’urgence et le danger imminent qui pèsent sur la vie de madame. Elle rédige une requête auprès du juge pour que madame se voie délivrer une ordonnance de protection. Dans la journée, elle obtient une date d’audience qui se tiendra cinq jours plus tard.

Il va lui tirer dessus, deux fois, dans le bas ventre. Son intention est claire, il veut qu’elle meure en tant que femme. C’est un féminicide. Elle va survivre, lui va se suicider.

À l’audience, monsieur est présent. L’avocate demande la confiscation des armes, ce que monsieur refuse avec force, expliquant que de toute façon, même confisquées, il saura en trouver d’autres.

L’audience est une victoire, l’ordonnance de protection est accordée. Elle prévoit l’interdiction pour monsieur d’approcher madame, la confiscation des armes qu’il possède et une demande de recours au bracelet anti-rapprochement. Monsieur refusera le port du bracelet…

L’ordonnance est transmise au Parquet de Clermont-Ferrand pour exécution. L’association qui l’accompagne fait une demande de téléphone grave danger au même Parquet.

L’avocate a fait son travail. Le juge a fait son travail. L’association a fait son travail. Madame pense qu’elle n’est plus en danger et pourtant…

Onze jours plus tard, monsieur va venir jusqu’à chez elle, armé.

Il va lui tirer dessus, deux fois, dans le bas ventre. Son intention est claire, il veut qu’elle meure en tant que femme. C’est un féminicide. Elle va survivre, lui va se suicider.

Onze jours plus tard, rien de ce qui a été prévu dans l’ordonnance de protection n’a été exécuté. Monsieur a gardé toutes ses armes en sa possession. Elle ne détenait pas de téléphone grave danger et il ne portait pas le bracelet anti-rapprochement puisqu’il l’avait refusé. 

Une fois encore, à l’image de nombreuses affaires similaires, la responsabilité de l’État est engagée, votre responsabilité Monsieur le Président.

A la presse, le Procureur de la République, Éric Maillaud, expliquera que tout était en train de se mettre en place, oui, mais quand? Le parquet n’a pas fait son travail.

Le même procureur qui explique dans un dossier sur les féminicides dans le Journal Le Monde du 2 juin 2020 (article abonnés, NDLR):  “Je n’ose plus le dire, mais tuer parce qu’on ne supporte pas d’être plaqué, c’est pas un meurtre par amour, mais c’est quand même moins grave que de tuer pour voler”

Quand un procureur de la République a intégré à ce point le déni de la réalité morbide des violences sur les femmes, quand il hiérarchise les meurtres pour leur motivation, et qu’il diminue la gravité d’un meurtre de femme parce que c’est un meurtre de femme… le parquet n’a pas fait son travail.

Tous les interlocuteurs ont été réactifs, comprenant la menace réelle que vivait madame, de l’avocate au juge, pas le Procureur de la République qui n’a rien fait pendant onze jours! Qui a laissé le temps à monsieur d’organiser son geste, de ruminer la manière dont il allait mettre fin aux jours de madame, onze jours.

Une fois encore, à l’image de nombreuses affaires similaires, la responsabilité de l’État est engagée, votre responsabilité Monsieur le Président.

Une fois encore, une femme va devoir survivre avec de lourdes séquelles parce que certains de nos magistrats ne se donnent pas l’obligation de résultat, en l’occurrence celle de sauver des vies.

Il est temps de rendre hommage en passant aux actes.

Il faut des moyens financiers et humains pour que ces femmes soient réellement protégées et pour que la justice, la police et les associations soient à la hauteur de leurs missions. Ce n’est qu’au prix d’une meilleure prise en charge que nous éviterons la litanie des meurtres et des mutilations.

Monsieur le Président, combien vaut la vie d’une femme? 

Combien faudra-t-il en sacrifier sur l’autel des vaines paroles? 

Cette situation d’urgence n’a que trop duré. 

Nous avons épuisé notre patience à attendre de véritables mesures et décisions qui n’arrivent jamais. 

Monsieur le Président, nous exigeons un milliard d’euros dédié à la protection et au respect des droits des femmes. Il est temps de rendre hommage en passant aux actes.

M* n’est pas le vrai prénom pour préserver madame.

Ont également signé cette tribune:Organisations signataires du Puy-de-Dôme: Collectif Guérilla Girls, My Girl’s Street, Nous toutes 63, Osez le Féminisme 63
Personnes signataires:Maud Vian, avocate; Katy Nadolski, militante féministe; Gaëlle Caillot, militante féministe; Marie Costenoble, militante féministe; Caroline Gérald, présidente My Girl’s Street; Aurélies Gomes, co-fondatrice du Collectif Guérilla Girls; Leïla Chetih, porte parole Osez le Féminisme 63; Louise Midroit, étudiante; Caroline Gérald, présidente My Girl’s Street; Typhaine D, artiste féministe; Milena Dos Reis; Angélique Perichon, féministe; Sophia Antoine, militante féministe et activiste; Agathe Ripoche, Balle de sexisme; Magaly Glineur; Victoire Lami; Victor Serve; Eloise Lebourg; journaliste médiacoop; Alexane Avouac; Anne Corny, Artiste et autrice; Marielle Pommier, Chargée de missions; Lola Moreira Lopes, membre active Main violette Tarbes contre les violences sexuelles et sexistes; Manon Coste, Main violette Tarbes contre les violences sexuelles et sexistes; Mia Kieffer; Geneviève Thivat; Amaury Avouac; Fanny Fayolle; Gaëlle Tary; Isabelle Boufferet, Directrice Régionale; Léa Sauzeau, citoyenne; Dalie Farah, écrivaine; Eva Thomas, étudiante; Julie Gauderon; Marianne Maximi, conseillère municipale Clermont-Ferrand, France Insoumise; Emmanuelle Lancien, étudiante; Deborah Depardieu; Pauline Duval, psychologue; Magali Gallais, Adjointe au Maire à l’Égalité des Droits et aux luttes contres les discriminations à Clermont-Ferrand; Chloé Darochas, Conseillère fédérale du Parti Socialiste de l’Allier; Eva Darlan, comédienne; Émilie Geneix; Lise Bouvet, philosophe et traductrice féministe, Ressources féministes; Magali Arvis, citoyenne; Sandrine Mignot, citoyenne; Karine Chegran, militante associative; Marine Bruneau, dirigeante de Luce; Stéphanie Lamy, chercheuse, militante féministe, co-fondatrice du collectif Abandon de famille-Tolérance zéro; Pauline Arrighi, journaliste et écrivaine; Graziella Brunetti, Maire; Juliette Pech, militante féministe; Gaëlle Rouzeau, comptable; William Mouret; Franciella Paturot, militante féministe; Christel Benigno, professeure en collège; Paule Kingleur, artiste; Gwénola Sueur, Réseau International des Mères en Luttes; Corinne Acheriaux, infirmière, Génération. s ; Maxence Cordonnier; Annie Pradoux; Amélie Jutier, chargée de missions; Wendy Lafaye, conseillère municipale déléguée à la Ville de Clermont-Ferrand; Jean-Noël Lafaille, co-référent comité Génération. s, Btissam Chahid; Steve Maquaire-Beausoleil, conseiller municipal délégué à la Ville de Clermont-Ferrand; Joëlle rabaglia, adhérente Génération. s ; Laurence Pappalardo, citoyenne; Martine Figard; Karine Isambert, Productrice de théâtre; Danièle Carnino; Nadége Bonenfant; Anne-Lyse Morel, avocate, Femmes Solidaires; Ingrid Schaufelberger, militante féministe et survivantes aux violences conjugales; Tulay Ozkan, militante féministe; Lilamay Benoiton, militante Nous toutes 63; Annabelle Bourg, avocate; Stéphanie de Pasquale, agente territoriale, CGT fonction publique; Rachel Antonio, Conseillère conjugale et familiale; Angélique Lebediow, Monitrice, éducatrice; M. Lumat; Philippe Laville, militant Génération. s ; Eric Mauger; Carinne Rocha, AESH; Béatrice Dunaud; Lucie Lowet; Tiffanie Carles, militante contre les fémincides; Andréa d’Oliveira, militante My Girl’s Street; Noémie Defernez, Professeure; Catherine Coursière; Noukia Ahmed Attoumani, Présidente d’association; Stéphanie Pirés; Cécile Audet; Claire Rouart, assistante sociale; Pascale Pointard; Marie-Reine Mugabekazi Karera, étudiante et militante Nous toutes 63; Laurence Grona, Gérante; Claudia Urrutia, Artiste; Rachel Dufour, Metteuse en scène; Danièle Malochet, Femmes Solidaires; Pierre Saint-Amans; Marie-Catherine Caillot; Caroline Domingues, Maître de conférences; Aziza Elkasri, dessinatrice; Catherine Bethermin, militante féministe OLF 63; Agnès Arvati; Fatma Aslan; Nathalie Morenne, Professeure des écoles; Katia Rolland; Valérie Mansard, travailleuse sociale; Anne-Charlotte Brignou, féministe; Céline Vespasien; Marion Geoffroy; Marie-Paule Grossetete, co-présidente OLF 13; Myriam Zeboudj, féministe; Angelina Arulraj; Naoual Richou, étudiante ; Salomé Attia; Noura Beghou, agente administrative; Margaux Autissier; Elise Bernard; Céline Lagouarde; Carole Sapio, chargée de missions; Clémence Raguet, Put’Ain de Guerrières; Karine Bertrand, professeure, référente égalité à l’Education Nationale; Rose Papillon; Camille Dumonceau; Tiffany Bonnefoy, féministe; Clément Gouyon, étudiant; Stéphanie Foucault; Emma Charbonnel; Mathilde de Beaune, animatrice En parler; Charline Gautier, bénévole, Femmes de Mars; Annie Avouac; Sarah R.; Anne-Sophie Reynier; Amélie Vernette, étudiante; Elvia Hodin, étudiante; Léa Colin, OLF 76; Malika Leulm, directrice; Lucile Cillart-Laterra, sage-femme, militante féministe; Isabelle Soulet, psychologue; Muriel Salmona, psychiatre, Présidente de l’association Mémoire traumatique et victimologie; Frédérique Ghroum, OLF 31; Sarah S.; Blandine Deverlanges, professeure, militante féministe OLF 84; Pauline Spinazze, militante féministe; Afaf Bessa, étudiante.

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