“Old” de M. Night Shyamalan : une fable horrifique et grinçante

The Visit, un précédent film de M. Night Shyamalan – qui marquait sa résurrection de cinéaste après plusieurs ratages (Le dernier maître de l’air, After earth) – aurait aussi bien pu s’appeler Old, tant le spectacle de la vieillesse y constituait...

“Old” de M. Night Shyamalan : une fable horrifique et grinçante

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The Visit, un précédent film de M. Night Shyamalan – qui marquait sa résurrection de cinéaste après plusieurs ratages (Le dernier maître de l’air, After earth) – aurait aussi bien pu s’appeler Old, tant le spectacle de la vieillesse y constituait le ressort majeur du déchaînement de la terreur. Symétriquement, Old aurait pu tout aussi bien s’intituler The Visit, puisqu’il fait le récit de la visite de quelques touristes d’un site isolé, une plage cernée par une roche très rare sur laquelle ils s’apprêtent à pique-niquer.

Comme les enfants de The Visit, les vacancier·es de Old ne tardent pas à comprendre que le lieu qu’ils visitent est un piège et qu’il y a de fortes chances qu’ils n’en ressortent pas indemnes. Et comme les enfants de The Visit, ils sont confrontés brutalement aux ravages de la sénescence humaine. Sauf que pour eux, il ne s’agit pas de celle de faux grands-parents séniles et violents : c’est celle qui s’empare de leur propre organisme de façon extrêmement accélérée à la suite d’un phénomène paranormal.

>> À lire aussi : “The Visit”: la résurrection macabre et grinçante de M. Night Shyamalan

Aging porn

La proximité des deux films dit assez à quel point cette obsession de la dégénérescence du psychisme et du corps humain obsède M. Night Shyamalan. Et même si le récit est adapté d’un roman graphique français (Le château de sable de Frederik Peeters et Pierre Oscar Levy), cette obsession constitue vraisemblablement le noyau dur de son inspiration auteuriste. Rien n’est plus effrayant que ce spectacle-là : celui des effets du temps sur notre espèce. Le film en organise un décompte presqu’exhaustif : progression foudroyante du développement d’une tumeur, d’une maladie cérébrale dégénérative, d’un problème osseux, ou même de la décomposition d’un cadavre. Le film est une sorte de aging porn qui amplifie, ausculte, visibilise par la vitesse des processus de dégradation généralement camouflés par leur lenteur.

Cette traversée express de tous les états d’un corps humain dans sa vie, Shyamalan l’orchestre de deux façons : externe et interne. Externe, par sa mise en scène, particulièrement élaborée, presqu’expérimentale, à coup de grands panoramiques circulaires où la caméra passe avec maestria d’un groupe à l’autre, masquant des transformations qu’elle révèle soudain dans un recadrage. Ou par un jeu très sophistiqué de focales où la dialectique entre le net et le flou ménage des coups de théâtre glaçants. Interne : le cinéaste, coutumier des micro-apparitions dans ces films, joue cette fois un personnage récurrent. Celui d’un employé du groupe organisant ces expériences en charge de les filmer. Le réalisateur du film joue donc un personnage qui filme et ce redoublement dit, de façon un poil appuyée, le caractère autoréflexif du film.

Condition humaine

Old est aussi un traité théorique sur le cinéma, qui est comme l’énonçait Jean Cocteau l’expérience de “la mort au travail”. Comme Prométhée a volé le feu aux dieux, le cinéma c’est le pouvoir dont se sont emparés les humains pour manipuler le temps. Le compresser, le dilater. Mais c’est un pouvoir qui se retourne aussi contre ceux qui s’en emparent puisqu’il enregistre la façon dont le temps modifie les humains, les abîme, les désagrège.

Il y avait aussi un personnage de cinéaste dans The Visit. Celui de la petite fille munie d’une petite caméra vidéo qui filmait son séjour chez ses grands-parents. À la fin, elle renonçait à la place de celle qui filme pour passer de l’autre côté de la caméra et consoler sa mère en larmes. Cette leçon très simple de morale cinématographique (renoncer au démiurgisme de la mise en scène) était bouleversante. La fin punitive de Old est plus conventionnelle. Mais entretemps, le film nous aura ébloui par ses visions d’effroi sur notre condition humaine.

Old de M. Night Shyamalan, en salle le 21 juillet

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