On y était : la masterclass de Bong Joon-ho au Grand Rex
On a eu peur qu’il ne vienne pas. Suite à deux tonnerres d’applaudissements inféconds, une incrédulité générale a gagné la grande salle du Rex ce dimanche 26 février, alors que commençait le “Bong Joon-ho Day” organisé par The Jokers. On se...
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
On a eu peur qu’il ne vienne pas. Suite à deux tonnerres d’applaudissements inféconds, une incrédulité générale a gagné la grande salle du Rex ce dimanche 26 février, alors que commençait le “Bong Joon-ho Day” organisé par The Jokers. On se retourne, on se regarde, on sourit dubitativement : Bong Joon-ho n’est pas là.
Il est 15 h pourtant, et les près de 3000 spectateur·ices présent·es dans la salle l’attendent de pied ferme. Certain·es ont commencé à faire la queue il y a déjà de plus de quatre heures : on jurerait qu’il s’agit de l’avant-1ère d’un blockbuster inédit. La Palme d’or et les deux millions d’entrées de Parasite ont bel et bien fait changer de dimension le cinéaste de 53 ans : plus qu’un monument cinéphile, il est désormais une grande figure populaire. Et le voilà qui entre enfin dans la salle, son sourire joueur aux lèvres, pour nous présenter la toute nouvelle version restaurée de son chef-d’œuvre de 2006, The Host.
Deux heures et un générique de fin plus tard, alors que bouillonne en nous l’idée que la flamboyance du métrage n’a pas pris le début d’une ride, le réalisateur remonte sur scène accompagné de Thierry Frémaux. S’est ensuivie une masterclass d’une heure, au cours de laquelle le cinéaste nous a offert quelques clés pour mieux comprendre d’où vient The Host, et plus généralement son cinéma.
L’art de la satire
“À l’origine, j’avais juste envie de faire un film où il y aurait un monstre, puis en réfléchissant aux personnages humains qu’il allait rencontrer, je me suis dit que je voulais prendre à contrepied les attendus du genre, les militaires et les scientifiques, en me concentrant plutôt sur un père un peu bête, sur une famille loufoque, je me suis dit que cela pouvait être drôle. Ce serait une famille faible, qui ferait face à un système qui ne les aide pas, qui leur met des bâtons dans les roues. La satire politique vient de là.”
Cette satire, sous diverses formes, a toujours été un élément moteur dans la filmographie de Bong Joon-ho, de ses débuts dans Barking dog et Memories of Murder jusqu’à Parasite, où elle trouve une forme d’apothéose. “Je n’ai pas du tout étudié professionnellement la politique, l’économie ou la société, mais j’essaie de les exprimer dans mes films. Quand on ne maîtrise pas ces sujets, on en a peur, et c’est cette peur que je veux montrer.”
Combler le vide
À l’image de la petite Hyun-seo, il passe une grande partie de sa jeunesse devant la télé, dans une Corée du Sud étouffée par la dictature militaire. C’est là qu’il découvre nombre de films, souvent censurés, dont il n’apprendra que bien plus tard qu’ils étaient de Hitchcock, de Clouzot et d’autres cinéastes occidentaux.
“La télé a été ma 1ère cinémathèque. C’est là que je voyais tous les films. Je me rappelle que j’étais extrêmement concentré sur ce que je regardais car quand bien même j’étais un enfant, je voyais bien que des scènes très violentes étaient coupées. Je m’attendais à voir du sang gicler et tout à coup on passait à un autre plan. Même dans mon enfance, je voyais que quelque chose clochait dans le montage. Cela a permis de développer mon imaginaire, je me demandais toujours quel plan manquait.”
De montage, il est désormais question concernant son prochain film, Mickey 17 avec Robert Pattinson, attendu le 27 mars 2024 dans les salles françaises. “Le tournage s’est très bien passé. Je me concentre sur le montage maintenant. À ce titre, il me semble que Kubrick disait que le montage est la seule authentique forme d’art cinématographique, le tournage étant une sorte de cirque, comme si on écrivait du Tolstoï dans des auto-tamponneuses !” S’il est considéré comme un maître depuis longtemps, Bong Joon-ho n’a semble-t-il pas oublié d’avoir lui aussi des maîtres.
The Host de Bong Joon-ho, la version restaurée en 4K, en salles le 8 mars 2023.