Panne des numéros d'urgence: un bilan humain difficile à établir
TECHNO - La panne qui a touché les numéros d’urgence hébergés par Orange dans la soirée et la nuit de ce mercredi pourrait avoir causé la mort de trois personnes, a annoncé ce jeudi 3 juin le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Un 1er...
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TECHNO - La panne qui a touché les numéros d’urgence hébergés par Orange dans la soirée et la nuit de ce mercredi pourrait avoir causé la mort de trois personnes, a annoncé ce jeudi 3 juin le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Un 1er bilan établi avec précaution car, comme l’a précisé le ministre, il est impossible de dire pour l’instant si ces personnes sont décédées à cause du temps d’arrivée des secours sur place et si ce délai “est imputable” à la panne.
Dans la matinée, Emmanuel Macron a lui-même confirmé qu’il était “trop tôt pour faire un bilan”, tout en se disant “très préoccupé”.
Lors d’une conférence de presse matinale, le ministre a indiqué qu’une personne souffrant d’une maladie cardiovasculaire “serait décédée” dans le Morbihan, faute d’avoir “pu joindre les services de secours à temps” et que “deux autres accidents cardiovasculaires” mortels ont eu lieu à la Réunion. Mais “je ne peux pas dire si le temps, car les secours sont arrivés, a été particulièrement long et s’il est imputable à ces numéros d’urgence”, a prévenu Gérald Darmanin.
La préfecture du Morbihan a annoncé l’ouverture d’une enquête administrative, précisant que la personne décédée “avait été conduite par un proche au centre hospitalier, au vu des difficultés techniques rencontrées pour appeler les services de secours (15, 112)”.
Alors que le PDG d’Orange Stéphane Richard a été convoqué au ministère de l’Intérieur pour donner des éclaircissements au gouvernement sur ces “dysfonctionnements graves et inacceptables”, l’enquête pour établir les responsabilités du service de télécom dans cette panne et son bilan humain s’annonce particulièrement complexe.
Ces décès sont-ils dus à une prise en charge insuffisamment rapide? Cette prise en charge a-t-elle été longue, plus encore que les délais habituels? Et si oui, l’a-t-elle été à cause de la panne? C’est à toutes ces questions qu’il faudra désormais essayer de répondre.
Une panne “pas généralisée”
Si elle a touché de très nombreux territoires en France hexagonale et dans les Outre-mer, la panne du réseau Orange n’était pas “généralisée”, comme l’ont affirmé très tôt les services du ministère de l’Intérieur. En Haute-Corse par exemple, le 15 et le 17 sont restés accessibles selon la préfecture du département.
Le réseau n’a donc pas été intégralement coupé, et les services d’urgence n’étaient pas complètement injoignables. Mais pour réussir à les contacter, il fallait par endroits réitérer plusieurs fois l’appel: “Ce qui est sûr, c’est que les personnes ont témoigné qu’elles ont essayé d’appeler plusieurs fois et qu’elles n’ont pas réussi tout de suite à avoir des opérateurs”, a expliqué Gérald Darmanin.
Sur BFMTV, François Braun, le président de Samu-Urgences de France, a expliqué qu’environ “un appel sur trois, un appel sur deux en fonction des endroits, n’a pas pu aboutir. Les gens rappelaient et au bout de trois fois, ils arrivaient à nous joindre donc c’est très compliqué à évaluer”, a-t-il estimé.
Les délais d’attente au Samu toujours longs
Dans une situation d’urgence, le délai d’intervention des services d’urgence peut s’avérer décisif. “Pour un certain nombre de patients, il y a sûrement eu ce qu’on appelle une perte de chance, c’est-à-dire un retard à l’intervention en cas de détresse vitale. Ce sont des morts évitables, malheureusement”, a déploré sur franceinfo Christophe Prudhomme, médecin au Samu 93 et porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France, également candidat LFI aux régionales.
Ne pas réussir à joindre le 15, le 18 ou tout autre numéro d’urgence reste assez rare. Mais dans une enquête d’octobre 2019, l’UFC Que Choisir pointait déjà “des délais d’intervention parfois préoccupants” chez les pompiers. En moyenne, le délai d’intervention pour un secours à la personne est en moyenne de 14 minutes en France, avec des disparités importantes selon les territoires: dans l’Aude, le délai monte à 21 minutes.
Au-delà de ce sujet, dénoncé régulièrement par les services urgentistes, une question difficilement soluble demeure: les décès auraient-ils pu être évités par une intervention rapide des urgences?
Le délai de prise en charge, entre autres facteurs
En 2019, des poursuites pour “homicide involontaire” avaient été engagées par la famille d’une sexagénaire décédée d’un infarctus: après 5 appels de la famille au Samu, il avait fallu une heure à ces derniers pour arriver sur place. “Si elle décède, ce sera de votre faute”, avait dit l’époux de la victime au Samu lors d’un appel.
Interrogé sur ce cas, François Braun avait estimé à l’époque qu’il était “très difficile de dire” si l’arrivée plus rapide des urgentistes “aurait changé quelque chose ou pas”.
Une analyse qui s’applique désormais aux trois décès rapportés ce jeudi. Car si le délai de prise en charge joue un rôle important dans la survie d’un patient, il est pas le seul à entrer en ligne de compte. La détection des symptômes, le temps de réaction de l’entourage ou de la victime, mais aussi et surtout l’état de santé général de cette dernière sont aussi des facteurs déterminants, notamment dans le cas des accidents cardio-vasculaires. En 2010, le gouvernement avait ainsi lancé un plan d’actions national AVC sur 4 ans pour améliorer la prise en charge mais aussi dans un objectif de prévention à l’égard de tous les Français.
Les investigations menées sur les trois drames rapportés ce jeudi (et potentiellement ceux qui pourraient être identifiés dans les jours à venir) devront donc s’attacher à éclaircir les raisons et les conditions de ces décès. En attendant d’établir les diverses responsabilités, à commencer par celle d’Orange.
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