Présidentielle 2022: Marine Le Pen peut-elle tenir son "en même temps"?

POLITIQUE - Et de deux. Après un 1er exercice virtuel l’an passé, Marine Le Pen est de nouveau contrainte ce samedi 1er mai de s’adresser à ses militants par visioconférence. Un meeting en ligne qui intervient à un an de l’élection présidentielle,...

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Marine Le Pen photographié à l'Assemblée nationale au mois de mars (illustration)

POLITIQUE - Et de deux. Après un 1er exercice virtuel l’an passé, Marine Le Pen est de nouveau contrainte ce samedi 1er mai de s’adresser à ses militants par visioconférence. Un meeting en ligne qui intervient à un an de l’élection présidentielle, et dans un contexte où la députée d’extrême droite voit sa cote progresser sondage après sondage.

Partie très tôt en campagne, la présidente du RN réussit pour l’instant à conserver sa place de 1ère opposante à Emmanuel Macron, en jouant autant que possible la carte de la “normalisation”. Des efforts de dédiabolisation que son soutien aux signataires de la tribune aux relents insurrectionnels publiée dans Valeurs actuelles peut mettre en péril, à en juger par les tirs de barrage venant de la majorité.

“Comment des gens -et Mme Le Pen en particulier- qui aspirent à exercer les responsabilités de l’État, peuvent-ils cautionner une initiative qui n’exclut pas de se retourner contre l’État?”, a interrogé le Premier ministre Jean Castex en conférence de presse. Avant de faire un clin d’œil appuyé au passé du parti d’extrême droite: “chassez le naturel, il revient au galop”. 

Dérapage révélateur ou risque calculé? Difficile à dire, car il est admis que Marine Le Pen a la cote chez les policiers et militaires, après avoir récolté 40% des voix de ce corps électoral en 2017. Le choix d’apporter son soutien à ces officiers retraités pourrait donc revêtir un caractère purement électoraliste. 

Le croisement des courbes en ligne de mire

“Pour que les courbes se croisent en sa faveur, il est nécessaire pour elle de grappiller partout, de travailler sur les gains marginaux. Jusqu’en 2022, elle va donc faire de la politique de segment, travailler sur tous les corps sociaux où elle est populaire, en espérant que l’addition de tous ces efforts lui permette de dépasser son socle dur, et de passer devant Emmanuel Macron si celui-ci dégringole”, analyse pour Le HuffPost Jean-Yves Camus, directeur de l’Observatoire des radicalités politiques à la fondation Jean Jaurès. 

Pour autant, estime le chercheur, “Marine Le Pen a sûrement surévalué ce qu’elle avait à gagner dans cette affaire”. En cause: l’absence de généraux prestigieux dans la liste des signataires, le fait que ces derniers lui soient déjà très probablement acquis et que ceux-ci ne comptent dans leurs rangs que 18 militaires d’active, dont un seul colonel. 

Dit autrement, un soutien précipité et aveugle apporté à des militaires qui sont soit marginaux, soit déjà identifiés comme gravitant dans les sphères d’extrême droite. Et tous désavoués publiquement par le chef d’État major des Armées, dont la parole d’autorité est rare. “Le bashing a été immédiat”, note Jean-Yves Camus. Ce qui offre à ses adversaires une formidable occasion de la ramener aux origines du Front national. “Marine Le Pen a gardé de son père le goût des bruits de bottes”, a justement cinglé le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. 

“Antisystème dans le système”

S’agit-il d’une initiative hâtive sapant tous ses efforts de “normalisation”? Pas forcément, juge l’historien Nicolas Lebourg, qui estime que cette séquence s’inscrit dans la stratégie d’équilibre qu’elle cherche à trouver.

“En récupérant ce côté ‘délitement de la nation’, elle veut causer à l’audience de Zemmour, dont les études Médiamétrie montrent qu’elle est largement composée de seniors et CSP+. Un électorat qui lui fait cruellement défaut”, explique le chercheur, qui souligne que Marine Le Pen ne change pas sur ses fondamentaux, mais uniquement sur les aspects économiques, comme récemment sur la sortie de Schengen ou sur la dette publique qu’elle voudrait rembourser. 

“Sa stratégie, c’est d’être antisystème dans le système, parce que c’est comme ça que gagnent les populistes. Elle n’a donc aucun intérêt à trop se normaliser, sinon elle perd sa plus-value. Mais en même temps, elle doit aussi causer au segment ‘zemmouro-filloniste’, lequel lui a toujours préféré la droite classique en raison des craintes qu’elle suscite sur sa capacité à gouverner et à préserver l’économie”, poursuit Nicolas Lebourg. Une ligne de crête qui n’est pas facile à tenir, en raison de la capacité des Républicains à défendre cet espace. Ce que l’épisode de la tribune publiée dans Valeurs actuelles a rappelé. 

“Plusieurs élus LR ont condamné sans détour l’initiative de ces militaires, tout en disant qu’il fallait entendre le constat qu’ils faisaient. C’est reprendre le rôle du ‘parti de l’ordre’ et priver Marine Le Pen de l’exclusivité des réponses à y apporter”, observe Jean-Yves Camus, qui prédit une reproduction de ce schéma à droite jusqu’au 1er tour de l’élection présidentielle.

Car “Marine Le Pen sait que s’il y a une demande de radicalité de la part de sa base, il faudra forcément qu’elle y réponde”, juge-t-il. Ce qui l’exposera forcément aux procès en diabolisation. Normaliser sans bafouer sa radicalité, un “en même temps” mariniste qui devra tenir encore 11 mois pour la députée du Pas-de-Calais. 

À voir également sur Le HuffPost: Castex tance Le Pen pour son soutien aux généraux dans “Valeurs Actuelles”