Primaire écologiste: les candidats veulent remettre la Terre au centre de l'espace
POLITIQUE - Un “trou dans la raquette” de la communication des candidats à la primaire écologiste? Yannick Jadot, Sandrine Rousseau, Éric Piolle, Delphine Batho et Jean-Marc Governatori s’affrontent à nouveau ce 10 septembre au soir lors d’un...
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POLITIQUE - Un “trou dans la raquette” de la communication des candidats à la primaire écologiste? Yannick Jadot, Sandrine Rousseau, Éric Piolle, Delphine Batho et Jean-Marc Governatori s’affrontent à nouveau ce 10 septembre au soir lors d’un débat sur Mediapart avant le vote pour les départager qui aura lieu du 16 au 19 septembre. Mais un sujet universel aux conséquences collectives reste abordé à la marge: la conquête spatiale.
Projets dantesques de mégaconstellations de satellites envoyées par des entreprises privées telles qu’Amazon, SpaceX et Oneweb, pollution lumineuse inquiétante selon les astronomes, débris spatiaux gravitant autour de la Terre par centaines de milliers, risque effrayant du syndrome de Kessler, colonisation et altération d’autres planètes, diffusion de publicité dans l’espace... Une longue liste qui démontre que si elle est le plus souvent étudiée sous le prisme du progrès scientifique, de la géopolitique ou de l’économie, la question de la conquête spatiale n’en demeure pas moins, aussi, un enjeu écologique.
Jean-Marc Governatori, important d’en causer
Peut-on être écolo et pour la conquête spatiale? Peut-on viser la présidentielle et ne pas s’exprimer publiquement sur le sujet? Nous avons posé ces questions aux cinq candidats de la primaire des Verts.
Candidat écolo centriste atypique, Jean-Marc Governatori, niçois de 62 ans qui a rallié la course à la primaire in extremis cet été après une décision de justice, l’avoue: il y a plusieurs trous dans la raquette des discussions écologistes actuelles et le spatial, la conquête et ses conséquences en font partie.
“C’est une erreur. C’est très important de causer d’espace, ça permet d’observer le climat, mais pas que. D’un point de vue géopolitique, d’un point de vue militaire, pour les transports... Avoir une réflexion spatiale doit faire partie du projet écologiste”, répond facilement l’ancien homme d’affaires fortuné qui a tout vendu pour se consacrer à l’écologie politique.
Aussi peu aborder le sujet, c'est une erreur.Jean-Marc Governatori
“On est trop dans les sujets classiques: la santé, l’environnement, le climat. Mais l’espace a toute sa place dans un futur projet écologiste. Il y a les bouchons terrestres, mais il y a aussi les bouchons spatiaux”, constate celui qui explique ensuite n’être pas un aficionados de la conquête de Mars. “Notre planète est accueillante pour tout le monde ici, il faut juste faire évoluer notre mode de vie”, pense-t-il. À ce sujet, il annonce au HuffPost qu’il va préparer ”un entretien avec [ses] équipes là-dessus”. À quelques jours de la primaire, l’univers pourrait donc prendre plus d’espace dans son discours.
Yannick Jadot, attention à la fuite
C’est le seul à avoir abordé le sujet médiatiquement. Mais l’aurait-il fait si le journaliste en face de lui ne l’y avait pas poussé? Dimanche 21 février, Yannick. Jadot, poids lourd des Verts était interrogé dans l’émission “Dimanche en politique” sur la conquête de l’espace tandis que le rover Perseverance se posait sur Mars pour en étudier le sol. Cet entretien sur France 3 a permis d’en savoir un peu plus sur la position du candidat écologiste de 54 ans.
Notre mission, c'est de protéger le vivant sur la Terre.Yannick Jadot, "Dimanche en politique", France 3, 29/02/2021
“Attention que ce travail sur Mars ne devienne pas une fuite, prévient ainsi l’eurodéputé. C’est très bien d’aller chercher s’il y a du vivant sur Mars, mais il ne faut pas oublier que notre vivant, c’est la Terre. Que notre mission, c’est de protéger le vivant.” À la “belle aventure spatiale”, Yannick Jadot préfère “notre grande aventure la Terre” et déplore une attitude comme celle d’Elon Musk dont “on a l’impression que le but est d’aller habiter sur Mars et de fuir la Terre”.
Sandrine Rousseau, une découverte spatiale contrôlée
La conquête spatiale, si c’est pour finir “en course à l’échalote” pour des “questions de puissance”, merci, mais non merci prévient l’ancienne secrétaire d’EELV. Découvrir pour apprendre, oui, conquérir et exploiter de nouvelles ressources, non. Sandrine Rousseau préfère d’ailleurs l’expression “découverte spatiale”. Seule cette découverte est acceptable, mais à condition qu’elle soit contrôlée. La candidate plaide ainsi pour des missions triées sur le volet. “On ne peut plus gâcher du CO2 sans vraiment y réfléchir”, explicite-elle au HuffPost. Sur ce sujet, elle est la seule à avoir un positionnement plutôt critique à l’égard de Thomas Pesquet et de ses douze missions scientifiques qu’il mène à bord de l’ISS depuis le 23 avril.
“Il brouille le message”, analyse-t-elle encore pour Le HuffPost. ”À la fois il envoie des photos de la Terre qui sont belles et qui sensibilisent à la nécessité de la préservation de l’environnement...Et en même temps il génère une pollution qu’on ne peut ignorer”, continue-t-elle. Une pollution spatiale telle, que certains causent déjà de l’espace comme d’une poubelle géante.
La gestion de ces déchets, “c’est une question de bien commun”, pour l’économiste qui plaide, pourquoi pas, pour l’instauration d’une agence publique. Démocratique et indépendante du monde de recherche, elle pourrait contrôler ou émettre des avis sur la nécessité ou non des missions spatiales à venir. Et mesurer leur impact sur l’environnement.
On ne peut plus gâcher du CO2 sans vraiment y réfléchir.Sandrine Rousseau
Delphine Batho, priorité à la recherche, exit les intérêts privés
Dans le camp Batho, on affirme que le sujet est largement intégré à la réflexion. Avec le mathématicien Cédric Villani dans son équipe de campagne, la benjamine de cette primaire l’affirme: “la conquête spatiale n’est pas du tout un trou dans notre raquette. On hiérarchise les urgences tout simplement.”
L’ancienne ministre de l’Écologie et du développement durable pendant le quinquennat Hollande fonde sa réflexion sur le spatial en faisant une grande différence entre la recherche scientifique et “les projets hors-sol des milliardaires”. “La priorité doit être donnée au progrès scientifique. Pas aux intérêts privés”. Point. “Plus d’argent public doit nourrir la recherche, l’agence spatiale européenne et le centre national d’études spatiales”, ambitionne à ses côtés Cédric Villani.
Plus d’argent public doit nourrir la recherche, l’Agence spatiale européenne et le Centre national d’études spatiales”Cédric Villani
L’astrophysique, le progrès scientifique et l’écologie sont liés et se nourrissent les uns les autres. À l’instar de la célèbre photo “La bille bleue”, photographiée par l’équipage d’Apollo 17 en 1972 qui a émerveillé en montrant pour la 1ère fois la Terre entièrement éclairée dans toute sa finitude, Delphine Batho croit profondément que la “découverte spatiale” -elle aussi préfère ce terme- conscientise à la préservation du vivant. Et qu’elle doit continuer à le faire.
Quant à la pollution générée par la découverte spatiale, le mathématicien et homme politique en relativise la responsabilité: “L’Europe gaspille beaucoup moins que l’exploration américaine, explique Cédric Villani. Je ne pense pas que l’agence spatiale européenne doit vraiment évoluer là-dessus. L’urgence, c’est de contrôler le délire américain”. En renforçant le pouvoir de la recherche, l’Europe pourrait peser davantage dans les négociations internationales et rappeler certaines puissances à l’ordre sur l’utilisation de l’espace à des fins commerciales par certaines entreprises. “Comme les pôles, comme les océans, l’espace est un bien public qui doit être traité avec la plus grande délicatesse. Avec la recherche comme seule fin”, rappelle le camp Batho.
Éric Piolle ne nous a pas répondu
Malgré nos nombreuses sollicitations, le candidat de 48 ans et actuel maire de Grenoble n’a pas répondu à notre demande d’entretien.
Une agence démocratique pour contrôler les missions spatiales, plus d’argent attribuée pour des agences existantes...Dans le discours de certains candidats, des réponses politiques concrètes tentent d’émerger. Dans d’autres, la réflexion fait son chemin, entre considération philosophiques et appréhension progressive du sujet. Pour l’instant, la priorité des écologistes, c’est la primaire, nous dit-on surtout. La conquête spatiale et la nécessité de penser politiquement ces dérives apparaît dès lors plutôt comme un thème de campagne présidentielle,
Pourrait-on s’attendre à voir un ou une candidate écologiste affirmer avec l’étoffe des héros, lors du débat de l’entre-deux tours, “Moi président ou présidente, je serai très ferme envers la Chine et les États-Unis dans les sommets spatiaux et j’appellerai les entreprises du “new space” à prendre leur responsabilités”? À condition d’être travaillé en profondeur, le thème de la conquête spatiale pourrait s’imposer dans quelques mois. Et faire la différence entre plusieurs candidats.
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