Quelle grille de lecture pour les films de Chabrol en 2021 ?
Derrière le masque patelin que s’est composé ce fils de pharmacien·nes, Claude Chabrol s’est imposé en héritier français de Fritz Lang, autrement dit en architecte d’une œuvre dont chaque “objet-film est un peu comme une maison : les différentes...
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Derrière le masque patelin que s’est composé ce fils de pharmacien·nes, Claude Chabrol s’est imposé en héritier français de Fritz Lang, autrement dit en architecte d’une œuvre dont chaque “objet-film est un peu comme une maison : les différentes pièces sont les séquences, et l’ensemble constitue la maison” (Conversations avec Claude Chabrol, François Guérif, éditions Payot, 2011). Un Fritz Lang dont un chirurgien aurait retiré tout suspense, selon une ablation analogue à celle par laquelle Gustave Flaubert s’opérait “du cancer du lyrisme” (Madame Bovary a été adapté par Chabrol en 1991).
La maison n’est pas une métaphore, encore moins un décor. Du taudis à l’appartement, incarnant l’ascension sociale d’une avorteuse sous la collaboration (Une affaire de femmes, 1988), en passant par les manoirs où la haute bourgeoisie perpètre ses crimes (Merci pour le chocolat, 2000, La Fleur du mal, 2003) ou en est la victime (La Cérémonie, 1995), la maison chabrolienne fait vivre à ses spectateur·trices une expérience organique, donc politique. Sous la caméra chabrolienne, comme sous la plume flaubertienne, l’organique, c’est-à-dire ce qu’il y a d’animal – et non d’inhumain – en l’homme, et le politique – c’est-à-dire l’architecture concrète de la lutte des classes – sont indissociables.
S’il y a une erreur humaine que Claude Chabrol condamne, c’est l’idéalisation
La maison chabrolienne n’est pas non plus l’utopie où Marguerite Duras imaginait les femmes cuisinant pour retenir les enfants et les hommes. Car l’utopie est un idéal, donc un risque – esthétique, politique – d’idéalisation. Or s’il y a une erreur humaine que Claude Chabrol condamne, c’est l’idéalisation. Dès Les Bonnes Femmes (1960), il démasque dans l’idéalisation de la femme le germe de toute misogynie. Son éthique de cinéaste, à l’instar de celle de Fritz Lang, tient en un mot : la lucidité. “La lucidité est vraiment la voie du bonheur.” Or, ajoutait-il, “beaucoup de gens aiment à croire que les choses sont différentes de ce qu’elles sont”.