Qu’est-ce qu’on regarde ce samedi soir, 22 mai ? “Ce cher mois d’août” sur OCS

Découvert à Cannes en 2008, Ce cher mois d’août de Miguel Gomes insuffle un sentiment de plénitude qui élève son auteur au rang des plus précieux jeunes cinéastes contemporains. Voilà un film coupé en deux, improvisé et composé sur le fil de...

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Découvert à Cannes en 2008, Ce cher mois d’août de Miguel Gomes insuffle un sentiment de plénitude qui élève son auteur au rang des plus précieux jeunes cinéastes contemporains. Voilà un film coupé en deux, improvisé et composé sur le fil de deux étés, dont la forme éblouissante, sans cesse réinventée, a pourtant les ruptures invisibles et la virtuosité discrète.

L’été portugais

Gomes y enregistre une chaîne d’embrasements aoûtiens. Celui de l’agreste paysage alentour, en proie à d’incessants feux de forêt. Celui d’une région au cœur du Portugal, désertifiée hors saison mais investie par la foule de celles et ceux qui chaque année y retournent franchir l’été entre canicule et bals de village dont les hymnes traditionnels, romances goguettes et tragédies sucrées rythment le récit. Celui finalement d’un incestueux trio amoureux, un père célibataire trop inconsolable et deux superbes ados dont l’irruption des émois gourds transfigure le film à mi-chemin.

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Docu de fiction

A l’amont de cette mue, il y a le cheminement documentaire de la caméra légère de Gomes, de places de villages en bals, de microfictions de comptoir en chasses au sanglier à la lueur des phares, de paysans en rois du karaoké – portraits dont le pittoresque délicat ne revêt jamais l’apprêt de la carte postale. D’une scène à l’autre s’écoule un climat d’épiphanie au traînant rêveur, où le gag se fait jour avec discrétion, dans les replis de la contemplation. Il s’agit d’épouser les langueurs d’août, d’en saisir la vibration et la vitesse.

On croit comprendre peu à peu que le film, c’est cela, ce territoire versifié par la ronde amusée des jeux, fanfares, incendies, concerts et légendes de piliers de bar. Mais en creux du flot tranquille du docu saisonnier s’informe une coulée de fiction, la palpitation d’un récit. Et à mesure que s’y déplacent les silhouettes de la 1ère partie, celles-ci se font soudain personnages d’un mélodrame de fête foraine.

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Le mélodrame clos dans un éclat de rire mêlé de larmes, le film s’achève sur une séquence tout à la fois très belle et très drôle, où Gomes se chamaille avec l’ingénieur du son qui, plutôt que d’enregistrer les scènes dans leur réalité nue et informe, s’acharne à en saisir des bruissements qu’il serait le seul à entendre, et qui de l’avis du réalisateur n’existeraient pas. Revêtir ainsi le masque réactionnaire d’un cinéaste du réel sans imaginaire pour, en un ultime instant, mieux célébrer le cinéma comme agent de réinvention du monde, voilà l’ultime tour facétieux inventé par Gomes – et quelle plus gracieuse façon de signer à pas feutrés sa sortie ?

Ce cher mois d’août de Miguel Gomes est disponible sur OCS.