Qu’est ce qu’on regarde ce samedi soir, 24 avril ? “Judas and the Black Messiah” sur Canal+

On est en 1969, au moment où, quelques mois après l’assassinat de Martin Luther King, le mouvement des droits civiques se durcit, en même temps que sa répression par l’impitoyable J. Edgar Hoover (joué par Martin Sheen à contre-emploi, vicelard...

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On est en 1969, au moment où, quelques mois après l’assassinat de Martin Luther King, le mouvement des droits civiques se durcit, en même temps que sa répression par l’impitoyable J. Edgar Hoover (joué par Martin Sheen à contre-emploi, vicelard comme jamais) et ses G-Men. Le FBI a en effet mis en place un programme secret, Cointelpro (Counter Intelligence Program), visant à infiltrer et décrédibiliser plusieurs groupes d’activistes, dont le Black Panther Party. Tandis que ses deux fondateurs (Bobby Seale et Huey P. Newton) sont en prison, c’est un jeune et charismatique leader chicagoan de 21 ans, Fred Hampton, qui porte les espoirs du parti.

Il est le Black Messiah du titre, et Daniel Kaluuya lui prête avantageusement ses traits, sans tomber dans les pièges habituels du rôle à biopic (imitation servile, jeu ostentatoire). Il survole sa partition, et devient, à l’évidence, un acteur qui compte. Face à lui, le toujours excellent Lakeith Stanfield compose un Judas (nommé Bill O’Neal) terriblement touchant avec ses grands yeux tristes et son air de ne jamais y toucher.

>> A lire aussi : Notre rencontre avec Daniel Kaluuya

Une autre panthère noire

Shaka King, auteur d’un seul long-métrage inédit en France (Newlyweeds en 2013), fait le choix payant d’humaniser cette figure controversée qui n’a jamais admis sa faute,  en travaillant sur des zones d’ambiguïté, à l’opposé par exemple du manichéisme d’un Spike Lee dans BlacKkKlansman.

Il fait preuve d’une grande maîtrise, tant dans la mise en scène que dans la conduite du récit, et rend tout aussi captivantes les scènes d’intimité entre camarades que celles de prédication et d’organisation. King n’est pas encore un cinéaste de la trempe d’un Soderbergh (dont le Che, en 2008, reste un chef-d’œuvre sur ce qu’est le travail révolutionnaire), mais il fait là ses preuves.

>> A lire aussi : “Judas and the Black Messiah” ou la mémoire ravivée d’un leader des Black Panthers

Même si son marxisme est quelque peu édulcoré (il s’agit, après tout, d’un film de studio), Judas and the Black Messiah brille par son radicalisme et sa volonté de redonner le pouvoir au peuple (“Power anywhere where there’s people” était la devise de Chairman Fred). La révolution n’est pas pour demain, mais on progresse.

Judas and the Black Messiah de Shaka King, avec Daniel Kaluuya, LaKeith Stanfield, Jesse Plemons (E.-U., 2020, 2 h 06), sur Canal+ le 24 avril