Qu’est-ce qu’on regarde ce soir ? “Les Vacances de monsieur Hulot” sur Netflix

Inutile de s’attarder sur les raisons conjoncturelles de voir Les Vacances de monsieur Hulot : voir des gens gambader sur une plage ensoleillée sans masque sur le nez semble un argument solide qui ne nécessite aucune explication. Les Vacances...

Qu’est-ce qu’on regarde ce soir ? “Les Vacances de monsieur Hulot” sur Netflix

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Inutile de s’attarder sur les raisons conjoncturelles de voir Les Vacances de monsieur Hulot : voir des gens gambader sur une plage ensoleillée sans masque sur le nez semble un argument solide qui ne nécessite aucune explication.


Les Vacances de monsieur Hulot est le second long-métrage de Tati et celui où apparaît pour la 1ère fois le personnage de monsieur Hulot, tout en longueur (vers le haut), taillé à la serpe, éternel maladroit mal habillé, enfant quasi muet complètement paumé dans le monde des adultes auquel il ne comprend rien même s’il fait tout ce qu’il peut pour s’y adapter, accéder à la normalité. Bien sûr en vain.

Dans ce film qui est son dernier en noir et blanc, Jacques Tati, déjà 46 ans et une carrière de mime-fantaisiste de music-hall derrière lui, garde son cap, reste sur la ligne de conduite tracée dans son 1er, Jour de fête : un univers très particulier et patiemment installé, très cadré, presque rigide. Un comique contraire à toute idée d’easy-laughing : Tati ne cherche jamais à forcer le rire du·de la spectateur·rice, mais à obtenir sa sympathie et l’obtient à force de respect, de confiance dans son regard attentif.

>> A lire aussi : « Jour de fête » : le 1er film de Jacques Tati restauré

Le génie de Tati

Tati reprend à son compte l’héritage du burlesque muet en l’adaptant à son époque et surtout en tirant profit de l’existence du son, comme l’avait évidemment fait Chaplin, mais en développant encore davantage les paradoxes entre l’image et le son.


Robert Bresson a dit un jour “Le cinéma sonore a inventé le silence”– ce qui est un totalement faux, car il y a déjà des silences visibles et manifestes dan les grands chefs d’œuvre du muet, mais passons. La bande sonore, chez Tati, est pleine de bruits, de paroles (inutiles, sociales, vaines) et de musiques, et cette volonté fascinée de créer le chaos en décalant, mélangeant et insérant peu à peu les uns dans les autres les actions et les sons fait tout le génie, extrêmement précis, de Tati.

Filmer tout court


Tati fera des films de plus en plus logiques et systématiques, thématiques et théoriques (Playtime, Trafic), par conséquent de plus en plus cauchemardesques et de moins en moins drôles : le comique de répétition sera utilisé, démonté pièce par pièce, jusqu’à apparaître obsessionnel, infini, fou. Le gag visuel sera de moins en moins gag et de plus en plus visuel, un motif sur lequel travailler, non plus en artisan du rire, mais en artiste de cinéma et en mécanicien de sa syntaxe (il y a de fait dans tous les films de Tati la tentation de ne rien filmer en particulier, mais de filmer tout court). Hulot sera de plus en plus seul et de plus en plus petit dans un monde de plus en plus froid et inhumain.

Mais dans l’ensoleillé Les Vacances de monsieur Hulot, il y a encore l’espoir que le héros de Tati pourra lui aussi, un jour, avoir accès au bonheur, à la normopathie. Mais qui souhaite être normopathe ?

Les Vacances de monsieur Hulot de Jacques Tati sur Netflix

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