Qu’est-ce qu’on regarde en streaming ce samedi soir, 18 juin ? “Proxima” sur MyCanal
En déconstruisant le film d’astronaute, Alice Winocour prend à revers ce genre et l’amène ailleurs. On peut faire comme si de rien n’était, comme si ce n’était pas une révolution, une déconstruction. On peut y voir un effet tout juste remarquable...
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En déconstruisant le film d’astronaute, Alice Winocour prend à revers ce genre et l’amène ailleurs. On peut faire comme si de rien n’était, comme si ce n’était pas une révolution, une déconstruction. On peut y voir un effet tout juste remarquable de mise en scène – certain.e.s y verront même un motif d’ennui, une coquetterie. Mais en réalité, ce n’est pas rien, un film spatial cloué au sol. Cela requiert même une exigence folle, un sens de l’ascèse et de l’humilité, et un certain courage pour oser réinventer à ce point ce que le cinéma avait déjà véhiculé d’images et de récits de conquête galactique, de fusées triomphalement tendues vers le ciel, d’impérialisme interplanétaire et même, dernièrement, de quête œdipienne prise dans les rets de l’univers.
Un film terrestre, terrien et surtout humainCar qu’est-ce que Proxima, troisième long métrage de la cinéaste Alice Winocour, après les très remarqués Augustine et Maryland ? Un drame non pas perdu dans l’espace mais au contraire très terrestre et terrien, une aventure physique, plus que méta ; un film non pas d’aventure, mais sur le temps qui la précède, cet “avant” du départ, de l’arrachement à un lieu et du déchirement de la séparation. Cette épreuve, Sarah, astronaute, va la vivre, l’éprouver dans sa chair, elle qui est mère d’une fille de 7 ans. Choisie pour faire partie d’une mission sur Mars, elle devra s’acclimater à cette idée – quitter la terre, sa vie et son enfant pendant un an – au cours des quelques mois de préparation que le film relate.
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Tout comme Maryland était une fiction sur “l’après”, sondant les symptômes post-traumatiques d’un soldat revenu d’Afghanistan, Proxima se déplace sur la courbe des syndromes et explore cette fois les effets d’un entraînement physique à outrance sur le corps (blessures, vertiges…) et la psyché (la culpabilité), qui disent à la fois la vulnérabilité de l’humain mais aussi, bien sûr, sa formidable capacité d’adaptation, d’endurance et de transformation (vers un corps machine, encapsulé, blindé). Le tout revêtu d’une épaisse chair documentaire dans le Centre spatial de Cologne, la réalisatrice ne laissant aucune chance à nos fantasmes d’évasion, nous offrant les coulisses bien réelles de cet anti space opera.
L’héroïne, imposante Eva Green formée à dompter le flot de ses émotions (de mère, de femme, de terrienne), est l’anti-Soko : la jeune patiente hystérique d’Augustine était aussi peu maîtresse de son corps et de son destin que semble l’être, a priori, le personnage de Sarah. Pourtant, il s’agit bien, de l’une à l’autre, du même combat : tenir la dragée haute aux hommes (ici, un ex à moitié compréhensif et un coéquipier goguenard joué par Matt Dillon), combattre son propre sentiment d’imposture, celui de toute femme isolée dans un monde presque exclusivement masculin, rester en position de sujet de sa propre vie, ne pas faillir.
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Dans cet absolu hors-champ que représente le monde sidéral – cet infiniment grand auquel le film répond par de minuscules détails, une caresse, une lettre, le bruit de la pluie qui tombe – repose toute la magie de Proxima et sa foi en notre imaginaire. Les derniers instants presque volés de cet amour mère-fille se gonflent de l’infini qu’on ne voit jamais et qu’on a tant vu s’incarner de manière figurative ces dernières années au cinéma. Il brille ici modestement dans les yeux d’une petite fille prénommée Stella.
Proxima d’Alice Winocour est disponible en streaming sur MyCanal.