Qui était Monte Hellman, cinéaste majeur et méconnu ?

Figure excentrée et secrète parmi les cinéastes qui forment le bataillon du Nouvel Hollywood, Monte Hellman laisse une œuvre trouée, à la beauté parfois aride, mais dont l’influence est inversement proportionnelle à sa notoriété. Ses admirateurs...

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Figure excentrée et secrète parmi les cinéastes qui forment le bataillon du Nouvel Hollywood, Monte Hellman laisse une œuvre trouée, à la beauté parfois aride, mais dont l’influence est inversement proportionnelle à sa notoriété. Ses admirateurs – Gus Van Sant ou Quentin Tarantino, par exemple – sont infiniment plus célèbres que lui, mais leur affection pour son cinéma dit forcément quelque chose de son importance souterraine et de la marque qu’il laissera dans une histoire moderne du cinéma encore en construction. 

Comme Joe Dante et Francis Coppola, le Californien Monte Hellman fait ses débuts, à la fin des fifties, dans l’écurie de Roger Corman, cinéaste, producteur et surtout découvreur de talents, avec un vrai film de série Z assez parodique, Beast from Haunted Cave (1959). Après avoir réalisé les extérieurs de The Terror signé par Corman himself, il enchaîne en 1964 avec deux films de guerre à petit budget, Back Door to Hell et Flight to Fury. Deux films dont l’action se situe aux Philippines et qui montrent déjà, en germe, le talent de metteur en scène du jeune Monte Hellman, qui vient tout juste de passer la trentaine. Deux films qui ont la particularité de voir figurer un acteur encore inconnu à leur générique : Jack Nicholson. C’est justement en étroite collaboration avec la future star que Monte Hellman enchaîne alors deux westerns cruciaux, The Shooting (1966) et L’Ouragan de la Vengeance (1965). Deux films qui, à l’époque, seront seulement diffusés à la télé américaine mais qui vont redéfinir les codes du genre et ouvrir des horizons insoupçonnés.

A travers ce dyptique, Hellman met en scène un Ouest complètement décharné, d’une sécheresse qui confine à l’abstraction et des personnages qui sont réduits à errer dans des paysages de plus en plus lunaires. On est plus près de Chantal Akerman que de John Ford. Il faut préciser qu’avant de rejoindre les productions Corman, Monte Hellman avait tout de même monté Beckett au théâtre. De sorte qu’on retrouve cette nudité existentielle, cette absence de transcendance et de finalité, ce sens de l’absurde, au cœur de ces deux westerns et, tout particulièrement, dans The Shooting, dont la fin hallucinée, anticipe, avec presque 40 ans d’avance, le Gerry de Gus Van Sant. 

>> A lire aussi : Monte Hellman, le mythique réalisateur américain de “Macadam à deux voies”, est mort à 91 ans

Road to nowhere

Inconnu du grand public, Monte Hellman devient pourtant un cinéaste culte, mais un cinéaste qui ne parvient pas à tourner. Après quelques menues activités de montage auprès de l’incontournable Roger Corman, Hellman finit tout de même par réaliser son film le plus célèbre, Two-Lane Blacktop (Macadam à deux voies) (1971). Un road movie habité par les ronflements de moteur autant que par les silences de ses personnages. Un film purement véhiculaire, qui traverse la fameuse Route 66 et qui ressemble, comme tous les grands films d’Hellman, à un chemin qui ne mène nulle part. Le culte dont ce film fait l’objet tient aussi à la présence minérale de James Taylor et Dennis Wilson (frère de Brian et membre des Beach Boys), deux pop-stars un peu secrètes elles aussi, aux côtés de l’acteur fétiche d’Hellman, le grand Warren Oates. La fin de Macadam à deux voies où l’on voit la pellicule se consumer sous nos yeux ébahis, est un moment incroyable, un véritable précipité de modernité. 

Après ce chef-d’œuvre, à côté duquel Easy Rider fait figure de bluette, Hellman tournera encore un autre grand film, Cockfighter (1974), toujours avec Warren Oates, génial en fanatique de combats de coq qui a fait vœu de silence. L’insuccès commercial à répétition aura raison de l’ambition du cinéaste. Dès lors, les années qui passent sont forcément erratiques. Après un bref retour au western (China 9, Liberty 37) et un léger compagnonnage avec Sam Peckinpah, un cinéaste avec lequel il a quelques affinités, Hellman finit par tourner Iguana (1988), où il renoue avec une certaine grandeur.

Un dernier film testamentaire

Film d’aventures maritimes en forme de conte cruel, troué de fulgurances, Iguana ne sera même pas distribué en France. Tout comme son film suivant, Silent Night Deadly Night : Better Watch out, une série B d’horreur non dénuée de charme. En 1992, grâce à Quentin Tarantino, un de ses grands admirateurs, le nom de Monte Hellman dépasse enfin le cercle des initiés. Tout simplement, parce qu’Hellman est un des producteurs de Reservoir Dogs. Son destin de cinéaste restera pourtant celui d’un marginal. Il lui faudra attendre 2010 pour tourner son dernier long métrage, un étrange film sur le cinéma en forme de testament, dont le titre, Road to Nowhere (qu’on peut traduire par en “route pour nulle part”) est la parfaite traduction de tout le cinéma de Monte Hellman.