Régionales 2021: sur les traces d'Éric Dupond-Moretti à Cousolre, son village d'enfance
ÉLECTIONS RÉGIONALES 2021 - Les optimistes y verront un rubis serti d’émeraudes. Les pessimistes de la vieille brique entourée de verdure. Cousolre, village de 2000 âmes à quelques kilomètres de Maubeuge, se situe à mi-chemin de la carte postale...
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ÉLECTIONS RÉGIONALES 2021 - Les optimistes y verront un rubis serti d’émeraudes. Les pessimistes de la vieille brique entourée de verdure. Cousolre, village de 2000 âmes à quelques kilomètres de Maubeuge, se situe à mi-chemin de la carte postale nordiste, avec ses vieilles maisons rouges, et de la brochure de classe verte, avec la campagne foisonnante qui l’entoure, flattée par un puissant soleil printanier.
C’est dans cette commune nichée dans le parc régional de l’Avesnois que l’actuel garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a fait ses 1ers pas. Un bourg aussi modeste que central dans le récit de self made man qu’il s’est construit. “Notre ministre”, comme on peut l’entendre les jours de marché, y a fait sa scolarité jusqu’à son entrée au collège. Sa mère y habite encore. D’ailleurs, tout le monde sait où elle habite. Ou plutôt croit savoir. “Mais si! En haut de la côte!”, essaie un client du Café de la Poste. “Ce n’est pas plutôt après le croisement sur la gauche?”, tente un autre. “Ma mère a même mangé à sa table”, renchérit un troisième.
À défaut d’adresse précise, une chose est sûre, l’image imposante de l’actuel locataire de la place Vendôme rôde dans les ruelles comme un fantôme. Absent physiquement, mais présent dans chaque conversation. La République en Marche l’a bien compris. Pourtant candidat dans la section départementale du Pas-de-Calais, c’est bien son visage qui apparaît aux côtés de Laurent Pietraszewski, tête de liste LREM dans les Hauts-de-France, sur les affiches placardées dans le secteur. Sur les murs du village, la photo demeure intacte. À l’inverse de celles des candidats RN, montrant Marine Le Pen et Sébastien Chenu, tous deux affublés au marqueur d’une mèche latérale et d’une mini-moustache façon point Godwin.
De quoi faire du village d’enfance d’Éric Dupond-Moretti un sanctuaire anti-RN? Pas vraiment. Au deuxième tour de l’élection présidentielle, la présidente du Front national l’avait largement emporté au 2e tour, avec 57,99% des voix. Il faut dire que la commune n’est pas épargnée par les maux qui rongent cette ancienne région industrielle. En 2015, l’Insee révélait que le secteur était le plus démuni du département. Sept communes entourant Cousolre comptent parmi les 100 plus pauvres de France.
“La région vivait du marbre dans le temps. Il y avait une vingtaine d’usines quand on était gamins. Le village est monté jusqu’à 3000 habitants, avec près de 30 estaminets”, se souvient Didier Lavoitte, adjoint au maire et cousolrezien depuis toujours, ayant partagé les bancs de l’école communale avec l’ex-star du barreau. “Maintenant, l’essentiel de l’activité est rural”, ajoute Albert Jallay, lui-même agriculteur de profession et maire fraîchement élu à l’issue d’un imbroglio électoral qui est remonté jusqu’au Conseil d’État. Une embrouille aux contours flous qui a conduit les habitants à retourner aux urnes dimanche 30 mai.
La seule chose que je dirai, c’est que Cousolre est extrêmement fière de son parcoursAlbert Jallay, maire de Cousolre
L’occasion pour le spectre de l’actuel garde des Sceaux (qui fut un temps l’avocat du maire sortant dans une affaire de gifle) de revenir planer sur les discussions. ”À ce qu’il paraît, il est venu voter. Ou en tout cas il devait venir. C’est ce qu’on m’a dit”, assure Olivier, le tenancier du Café de la Poste. Vérification faite auprès de l’édile: la signature du ministre ne figure pas sur le cahier d’émargement. D’ailleurs, le maire aimerait passer plus de temps à discuter de ses ambitions pour la commune que de commenter auprès d’un journaliste parisien la trajectoire du ministre de la Justice.
“La seule chose que je dirai, c’est que Cousolre est extrêmement fière de son parcours qui montre que dans la République, même quand on part petit, on peut arriver au sommet”, sourit Albert Jallay. Pour le reste, c’est silence radio. ”Éric veut avoir sa tranquillité quand il vient ici. Ça se respecte, et les gens d’ici le comprennent”, prévient Didier Lavoitte, pourtant à deux doigts de révéler le surnom Ch’ti donné au ministre quand il était petit, avant de se raviser.
Il a fait une connerie en entrant au gouvernement de Macron, le financierUn habitant de Cousole
Même mutisme observé auprès d’un commerçant décrit par plusieurs habitants comme ayant été proche de l’ex-avocat. Mais le problème avec le silence pudique de ceux qui veulent préserver l’image de la gloire locale, c’est qu’il laisse plus de place à ceux qui n’ont aucun problème à en dire du mal.
Exemple en terrasse, où un Cousolrezien à la moustache brunie par le tabac ne porte pas vraiment Éric Dupond-Moretti dans son cœur. “Il a fait une connerie en entrant au gouvernement de Macron, le financier. De toute façon je l’aime pas. C’est un sacré caractère, attention! Même petit je le trouvais mauvais. Il habitait juste en bas dans la ruelle chez sa grand-mère, allez voir! La maison est à vendre”, balance-t-il, en fier membre de ce causement du peuple cher à Balzac.
La politique au comptoir, voilà une autre occasion de recauser du prodige du droit pénal, qui n’est pas forcément donné gagnant dans le village. “Xavier Bertrand va l’emporter haut la main. Mais il ne gagnera pas seul”, pronostique un habitant, devançant les conclusions d’un sondage qui sortira le lendemain dans La Voix du Nord.
Notre ministre va se prendre une tôle!Un habitant de Cousolre
Une étude qui montre que pour l’emporter, le président sortant aura besoin du retrait de la liste LREM et que la présence d’Éric Dupond-Moretti ne produit à ce stade “aucun effet” sur les intentions de vote. “Notre ministre va se prendre une tôle”, rigole sous sa casquette un habitué du bistrot, la soixantaine passée.
C’est alors que Cyrille, une figure locale investie dans la vie de la commune, nous interpelle: “on m’a dit de source sûre qu’il viendra voter aux régionales. Notez-le et écrivez-le, vous allez voir! C’est un scoop que je vous donne”. Une affirmation qui fait son petit effet dans l’assistance, où on imagine déjà “le cortège, avec les flics, les motards et tout...” débouler sur la départementale 936 qui traverse le village.
Confirmation prise auprès de l’entourage du ministre, notre interlocuteur était bien informé. L’occasion, cette fois, de jouer pleinement son rôle de revenant et d’apposer sa signature sur le cahier d’émargement.
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