Régionales: cette règle sur les meetings en plein air bouscule la campagne

POLITIQUE - Que se passe-t-il à Montreuil? Depuis plusieurs jours, Clémentine Autain, la cheffe de file des Insoumis pour les régionales en Île-de-France, peste contre l’annulation de l’un de ses meetings dans cette ville de Seine-Saint-Denis....

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Cette règle sur les meetings en plein air bouscule les régionales (photo de Jean-Luc Mélenchon prise à Aubin le 16 mai dernier, lors d'un meeting en extérieur)

POLITIQUE - Que se passe-t-il à Montreuil? Depuis plusieurs jours, Clémentine Autain, la cheffe de file des Insoumis pour les régionales en Île-de-France, peste contre l’annulation de l’un de ses meetings dans cette ville de Seine-Saint-Denis. Initialement prévu sur la place Jean Jaurès le 13 juin prochain, il ne pourra se tenir à cause d’un nouveau décret instaurant une jauge d’affluence maximum pour les réunions électorales en plein air. 

Une règle injuste pour la candidate, rejointe dans son indignation par le reste des troupes LFI et par une partie de la classe politique locale, toutes sensibilités confondues. Clémentine Autain a même annoncé, mercredi 26 mai dans la soirée, déposer un référé-liberté devant le tribunal administratif contre la disposition “afin que la campagne puisse se tenir dans des conditions acceptables et respectueuses de nos principes démocratiques.”

Concrètement, le décret 2021-637 du 21 mai dernier sur les mesures pour faire face à la crise sanitaire introduit une dérogation à l’interdiction de se réunir à plus de 10 personnes sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public, portant la jauge, s’agissant des réunions électorales organisées en plein air, à 50 personnes au plus.

Des doutes sur la pertinence sanitaire

Cela veut dire, sur le terrain, que si tous ces évènements ne sont pas proscrits à proprement causer, ils ne pourraient ainsi rassembler qu’une poignée de personnes. De quoi en réduire nettement leur intérêt. “Ils n’ont pas prononcé le mot interdiction, mais c’est une interdiction de fait. On n’a pas le droit de faire ce meeting. C’est jouer sur les mots. J’avais demandé au préfet si c’était possible d’organiser ce meeting, il m’a dit oui. Il estimait à ce moment-là que ça ne posait pas de problème si c’était dans le respect des gestes barrières. Puis il m’a rappelé hier, car entre-temps, il y a eu un nouveau décret”, racontait Clémentine Autain à Libération le 26 mai, soit cinq jours après la rédaction de cette nouvelle disposition. 

La députée de Seine-Saint-Denis demande donc à la justice de se prononcer sur cette règle à la “légalité discutable”, selon ses mots. Mais au-delà de ce débat juridique, se posent également des questions politiques et sanitaires. 

Pourquoi, par exemple, limiter aussi drastiquement l’affluence dans les meetings en plein air, à l’heure où la jauge dans les différents lieux clos tend à s’assouplir? La barre est même fixée, depuis le 19 mai dernier, à 800 personnes pour les gymnases et autres salles, ou 1000 dans les stades. C’est pourquoi le parti socialiste a pu organiser, mercredi 26 mai au soir, un meeting à La Bellevilloise, dans un lieu clos, rassemblant plusieurs dizaines de personnes.

Incohérent? C’est en tout cas ce qu’estiment plusieurs élus locaux. ”À l’air libre, avec des masques et des gens qui respectent une certaine distanciation, ça a déjà été fait sans problème”, fait valoir Clémentine Autain, toujours auprès de Libération, alors qu’il est désormais acté que les risques de transmettre le Covid-19 sont bien moins élevés à l’extérieur qu’en intérieur. Même le camp Pécresse, candidate à sa réélection en Île-de-France face à la liste de l’élue insoumise, n’est pas franchement convaincu.

Darmanin accusé de s’immiscer dans la campagne

“Cela n’a aucun sens”, estime Jean-Didier Berger, le maire (Libres!) de Clamart, dans les Hauts-de-Seine et directeur de campagne de la présidente (ex-LR) sortante dans Le Parisien. “On peut réunir 650 personnes dans une salle, mais pas 51 personnes en extérieur? Sur quel avis du conseil scientifique se fonde cette décision?”, interroge-t-il.

L’édile pointe même la main de Gérald Darmanin derrière cette affaire. “Plutôt que de déposer plainte le lundi pour rétropédaler le mercredi, le ministre de l’Intérieur ferait mieux de se préoccuper de la bonne organisation des élections”, s’agace-t-il, en référence à l’action en justice annoncée par le locataire de la Place Beauvau à l’encontre d’Audrey Pulvar, la cheffe de file socialiste en Île-de-France. 

De quoi apporter de l’eau au moulin des Insoumis qui dénoncent une nouvelle “dérive démocratique” en Macronie dans un contexte déjà compliqué pour les candidats aux régionales. “Quel pays! Quel régime! Le meeting de Clémentine Autain à Montreuil interdit par Darmanin via son préfet. Jusqu’où, jusqu’à quand l’État Macron?”, s’emportait Jean-Luc Mélenchon, mercredi, sur les réseaux sociaux. La veille, le député Éric Coquerel sonnait déjà la charge au Parlement contre le “paradoxe stupide” de voir les manifestations revendicatives autorisées, au 1er rang desquelles le rassemblement polémique des policiers devant l’Assemblée nationale, quand les meetings en plein air sont empêchés. 

“La démocratie, ça ne peut pas être à la tête du client”, ajoute encore Ian Brossat sur les réseaux sociaux, l’adjoint PCF au Logement à la mairie de Paris, en réclamant, ce jeudi, l’autorisation de l’événement autour de Clémentine Autain. Deux options pour cela: que la justice tranche en faveur de la candidate Insoumise. Ou que le gouvernement renonce de lui-même à son décret publié à un mois de la fin d’une campagne électorale déjà largement tronquée par la crise sanitaire.

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