Régionales: Dupond-Moretti et le triple défi d'une candidature commando
POLITIQUE - Un marché, une bouchée de pastèque, des échanges musclés par médias interposés: Éric Dupond-Moretti est bel et bien en campagne. Le garde des Sceaux, propulsé en 1ère position de la liste de la majorité dans le Pas-de-Calais menée...
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POLITIQUE - Un marché, une bouchée de pastèque, des échanges musclés par médias interposés: Éric Dupond-Moretti est bel et bien en campagne. Le garde des Sceaux, propulsé en 1ère position de la liste de la majorité dans le Pas-de-Calais menée par Laurent Pietraszewsksi pour les régionales de juin prochain, vit ses 1ères heures de candidat.
L’ancien ténor du barreau, qui a mis la fougue de ses plaidoiries au service d’Emmanuel Macron et du gouvernement depuis dix mois, était à Lens ce samedi 8 mai pour ses 1ères poignées de main. Le but de la manœuvre: redonner un coup de fouet à la liste de la majorité dans les Hauts-de-France, à l’heure où elle plafonne aux alentours des 10%, loin derrière celle du président sortant Xavier Bertrand.
Mais au-delà de ces difficultés dans les sondages, la candidature de l’un des rares “boxeurs” de la macronie permet au chef de l’État de tenter un coup de billard à trois bandes: affaiblir deux de ses principaux rivaux en vue de 2022, tout en permettant à son ministre de se faire les dents sur une 1ère campagne électorale, à un an de la présidentielle.
Viser Marine Le Pen...
Car c’est assumé, celui qui était surnommé “acquittator” dans une autre vie vient défier Marine Le Pen, et le Rassemblement national dans son fief. Sans y être parachuté pour autant. Natif de Maubeuge, Éric Dupond-Moretti a commencé au barreau de Lille avant de se faire connaître du grand public à travers le procès Outreau, une affaire pour laquelle il défendait l’une des treize personnes finalement acquittées.
“Je serai au 1er rang dans le Pas-de-Calais sur la liste de Laurent Pietraszewsksi”, le secrétaire d’État chargé des retraites, a ainsi expliqué le ministre, vendredi, à La Voix du Nord, “parce que je ne veux pas que cette terre file entre les mains du Rassemblement national.” “Madame Le Pen refuse de débattre avec moi. Elle ne veut pas venir à moi, alors je viens à elle”, a-t-il encore insisté, et ce même s’il ne croisera pas directement le fer avec la présidente du Rassemblement national, candidate, pour sa part, aux élections départementales.
À la différence de monsieur Bertrand, je ne veux pas chasser sur les terres du Rassemblement national. Je veux chasser le Rassemblement national de cette terre.Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice et candidat aux régionales
Mais malgré cette opération commando, force est de constater que rien ne sera simple pour enrayer la dynamique de l’extrême droite dans ce territoire. La région Hauts-de-France est (avec la région PACA) la seule où le RN est l’unique opposant dans l’hémicycle, après le désistement aux régionales de 2015 de la liste PS pour faire barrage à une Marine Le Pen arrivée en tête au 1er tour avec 40,6% des voix. Quatre des sept députés RN sont issus de ce territoire, où le parti d’extrême droite dirige aussi trois communes.
...sans oublier Xavier Bertrand
Un enracinement confirmé par deux sondages récents: la liste de Sébastien Chenu y talonne celle de Xavier Bertrand au second tour, de très près dans le cas d’une quadrangulaire si La République en marche passait la barre des 10%. Qu’à cela ne tienne, Éric Dupond-Moretti “veut convaincre que le Rassemblement national est une impasse.”
”À la différence de monsieur Bertrand, je ne veux pas chasser sur les terres du Rassemblement national. Je veux chasser le Rassemblement national de cette terre”, lançait-il encore à La Voix du Nord, entre autres petites phrases acerbes, visant à la fois la députée du Pas-de-Calais et le président de région sortant.
Car l’offensive Dupond-Moretti vise bien, au-delà du RN, à fragiliser Xavier Bertrand, candidat déclaré de la droite dans la course à l’Élysée depuis le 13 avril. Il prend “les Hauts-de-France comme le brouillon de son ambition présidentielle (..) C’est se moquer des électeurs, ça”, attaque déjà frontalement le garde des Sceaux, alors que l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy commence à faire son trou dans les intentions de vote pour 2022.
Dans la majorité, on salive déjà à l’idée de le voir contraint à une alliance avec La République en marche pour faire barrage au Rassemblement national dans la région. Ce “serait le bon candidat pour faire un meilleur score que Pietraszewski et forcer Xavier Bertrand en vue de la triangulaire (voire quadrangulaire) du second tour”, se réjouissait une source ministérielle auprès de l’AFP ce samedi.
Et si ça se passe mal?
Mais pour cela, pour provoquer l’embarras d’un Xavier Bertrand alors obligé de s’allier avec des troupes qu’il pourfendrait quelques mois plus tard à la présidentielle, il va falloir que la candidature de la majorité décolle dans les Hauts-de-France.
Et si ce n’est pas le cas, en revanche, c’est la stature d’un poids lourd de la macronie qui pourrait être écornée à quelques encablures de la course présidentielle. D’autant que le garde des Sceaux a plusieurs dossiers chauds sur la table à l’heure où les thèmes sécuritaires s’imposent toujours davantage dans le débat public, dans le sillage de plusieurs drames ou polémiques politiques. “Je suis pleinement ministre de la Justice et je serai pleinement engagé dans cette campagne”, a d’ailleurs promis Éric Dupond-Moretti, toujours dans son entretien à La Voix du nord, comme pour anticiper les critiques.
Marine Le Pen, elle, fait mine de s’étonner de “l’obsession” de l’ancien avocat à son égard. Depuis Hénin-Beaumont, la patronne du Rassemblement national a jugé bon d’ironiser sur le féminicide terrifiant de Mérignac, en expliquant ce samedi, dans un sourire, qu’elle était “preneuse” d’un “bracelet anti-rapprochement en rab.”
Réponse du garde des Sceaux: “Cette terre d’immigration, de travail, de générosité mérite mieux que la haine que propage le Rassemblement national.” “Marine Le Pen préfère ses blagounettes scandaleuses qu’un vrai débat. (...) C’est l’opportunisme de se nourrir du malheur”, a-t-il ajouté depuis le sommet de l’un des terrils de Loos-en-Gohelle, pour son 1er déplacement comme candidat. Ou le début d’une campagne qui sent le souffre.
À voir également sur Le HuffPost: La comparaison douteuse de Marine Le Pen après la candidature de Dupond-Moretti aux régionales