Rencontre avec Girl in Red, sensationnelle révélation bedroom pop

La dernière fois que Les Inrockuptibles avaient croisé sa route, en mai 2019 à l’occasion de son passage à La Boule Noire à Paris, Girl in Red confiait avoir besoin d’une pause. En pleine tournée, venue défendre un 1er ep paru l’année passée,...

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La dernière fois que Les Inrockuptibles avaient croisé sa route, en mai 2019 à l’occasion de son passage à La Boule Noire à Paris, Girl in Red confiait avoir besoin d’une pause. En pleine tournée, venue défendre un 1er ep paru l’année passée, la musicienne – alors âgée de 20 ans – enchaînait les dates européennes, préparant en parallèle la sortie d’un deuxième maxi plus tard dans l’année. “Je me rappelle que c’était éprouvant, mais c’est sûr que ça fait bizarre d’y repenser après une année et demie sans concert”, remarque aujourd’hui Marie Ulven, de son vrai nom.

Une pandémie plus tard, c’est dans un contexte bien différent que l’on retrouve la chanteuse, assurant la promo de son 1er disque if i could make it go quiet depuis son Oslo natale, forcément plus reposée. “Je ne veux pas dire que la pandémie a été une chance pour moi, mais ça m’a permis de souffler à un moment où j’en avais besoin, relativise-t-elle. Ce break a été l’occasion de digérer ce qu’il m’arrivait à tête reposée, et de prévoir calmement la suite.” Un chamboulement dont Marie a su tirer avantage, car il fallait bien du temps pour s’atteler à la conception d’un album alors que le succès venait presque de lui tomber dessus, deux ans seulement après avoir posté sa 1ère vidéo sur YouTube.

>> A lire aussi : Girl in Red, future rock star bienveillante

Succès risqué

C’est que, de l’extérieur, la réussite que conjugue Marie à chaque étape de sa carrière pourrait avoir quelque chose d’effrayant : car avec l’accumulation de plusieurs centaines de millions d’écoutes sur les plateformes de streaming apparaissent inévitablement les risques de trajectoire, celui du one-hit wonder ou de la gestion du statut de personnalité publique… Autant de responsabilités que tout·e artiste doit apprendre à manipuler le succès venant, à l’image – probablement la plus parlante au cours de ces dernières années – des précautions prises par Billie Eilish concernant sa vie privée et son apparence physique, en prévention de son hypersexualisation.

Mais chez Girl in Red, le succès n’est rien d’autre qu’une force : “Pour être honnête, c’est encore quelque chose que je ne sais pas gérer, avoue-t-elle, mais ça ne m’effraie pas.” Et pourtant son triomphe ne se traduit pas qu’en nombre d’écoutes, mais se manifeste bien avec passion chez des fans qui ont sacré Marie icône lesbienne (“Do you listen to Girl in Red ?” est même devenue une catchphrase du TikTok queer), au risque qu’elle aurait pu désirer garder privé cet aspect de sa vie. Mais là encore, rien d’essentialisant à ses yeux : Marie Ulven a déjà réglé ses comptes et semble aujourd’hui manipuler avec autant de dextérité son succès que sa guitare.

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Car il faut bien y venir : ce 1er album compose la dernière réussite en date de Girl in Red. if i could make it go quiet s’impose comme un très solide debut, dont même les adorables défauts jouent en sa faveur. Les mélancoliques ballades d’imaginaire bedroom puisent dans des influences plus hétérogènes qu’à l’accoutumée, même si on aurait apprécié la voir pousser jusqu’au slowcore à la façon d’une Nicole Dollanganger. Et la chanteuse cristallise à son meilleur un songwriting toujours porté sur la santé mentale (un créneau que seules les mauvaises langues qualifieront d’éculé).

Label indie

La tendance évolutive de sa musique est peut-être bien un autre effet de la pause imposée par la pandémie : “Je ne suis plus sûre de connaître mes goûts”, plaisante même Marie, qui est allée chercher FINNEAS, frère et producteur multi-récompensé de Billie Eilish (car le monde est décidément petit) pour travailler sur le single phare de son album, Serotonin. En osant timidement emprunter au hip-hop ou à la pop (on croirait presque entendre Lorde sur certains titres), elle met à distance l’étiquette de “nouvelle tête de la scène indie” labellisée Pitchfork qui aurait pu lui tomber dessus.

Car si être listée aux côtés de Beabadoobee, Clairo, Snail Mail, Soccer Mommy et autres Phoebe Bridgers n’aurait rien de péjoratif – Marie déclare même volontiers les trouver inspirantes, bien consciente de ce que leur récent succès révèle des évolutions de l’industrie musicale –, le créneau ne rendrait simplement pas vraiment hommage à la façon dont la musique de Girl in Red est tout aussi proche de celle des Smiths ou des Drums (son songwriting évoque presque inévitablement celui de Jonny Pierce).

Qu’on ne s’y trompe pas, Girl in Red est donc bien plus qu’une poignée de références ou qu’une icône queer, et c’est peut-être bien ce dont cet album est garant. Depuis ses débuts, les confessions de Marie Ulven résonnent sans fausse note et avec une constance que la chanteuse semble ici promettre de maintenir.