Rentrée scolaire: "Dire que les protocoles sanitaires sont rassurants est une contre-vérité"

Après plus d’une année et demie de crise sanitaire, la seule certitude que je peux avoir est celle de toutes les incertitudes qui se sont accumulées. Les une après les autres… Port du masque, salles aérées, demies jauges, mètres carrés par...

Rentrée scolaire: "Dire que les protocoles sanitaires sont rassurants est une contre-vérité"

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Le président Emmanuel Macron et le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer discutent avec des élèves lors d'une visite dans une école primaire à Melun, le 26 avril 2021, alors que les écoles primaires et maternelles rouvraient leurs portes après une fermeture de trois semaines visant à freiner la propagation du Covid-19. (Photo by THIBAULT CAMUS/POOL/AFP via Getty Images)

Après plus d’une année et demie de crise sanitaire, la seule certitude que je peux avoir est celle de toutes les incertitudes qui se sont accumulées. Les une après les autres… Port du masque, salles aérées, demies jauges, mètres carrés par apprenant dans les salles, virucides, gel hydro-alcoolique… plan de continuité d’activité, plan de reprise d’activité, dialogue social au sein des CoHS-CSE… Nous pourrions certainement élaborer un nouveau dictionnaire ou enrichir les existants avec ces nouveaux mots ou ceux tapis dans l’ombre, remis au goût du jour.

Concernant le protocole sanitaire de rentrée qui sera appliqué dans mon lycée agricole, les notes et documents commencent à être transmis aux établissements, après avoir été adressés aux recteurs, aux Directeurs Régionaux de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt, des Préfets départementaux et aux Directeurs des Agences Régionales de Santé… Fermez le ban! N’en rajoutez plus!

 

Soucieux du dialogue social, il m’est arrivé de devoir le contourner voire l’écorner, à mon grand regret.

 

Les incertitudes? Nous les avons gérées collectivement, parfois en nous exonérant des lourdeurs d’un système qui adore produire normes, textes, arrêtés, notes de service… Parfois, pour ne pas dire souvent, il m’est arrivé de les gérer dans le cadre de la solitude de la fonction et des responsabilités qui y sont attachées. Soucieux du dialogue social, il m’est arrivé de le contourner, de l’écorner à mon grand dam. Mais principe de réalité, gestion du temps, crise oblige,: il a fallu concilier sécurité sanitaire, sécurité éducative et pédagogique et être au rendez-vous des familles et surtout des jeunes, de leurs apprentissages, en s’appuyant sur une communauté éducative pleinement mobilisée et remarquable de dévouement.

Des protocoles pas assez détaillés, une nouvelle mission à assumer

Et voici qu’à bout de souffle, l’été arrivant, la mémoire a tendance à faire, comme on le dit en informatique, un “formatage du disque dur”, à permettre une mise des compteurs à zéro. Vaccination “fortement encouragée”, les clivages vont être au rendez-vous de cette rentrée scolaire. Les protocoles sont arrivés. Vous dire qu’ils sont rassurants et détaillés serait une contre-vérité. Vous dire qu’après avoir été “centre de tests” en fin d’année scolaire dernière, le lycée dont j’ai la charge pourrait devenir un lieu d’accueil pour vacciner les élèves “volontairement volontaires”… Une nouvelle mission à assumer donc!

Température de conservation des vaccins, équipes mobiles de vaccination, mots maladroits de certains ministres comparant la mise en place de bus conduisant des élèves pour se faire vacciner dans des établissements voisins à des sorties scolaires… La gestion de l’incertitude ou devrais-je dire des incertitudes est inhérente à la gestion de crise.

 

Après avoir été “centre de tests” en fin d’année, le lycée dont j’ai la charge pourrait devenir un lieu d’accueil pour vacciner les élèves “volontairement volontaires”…

 

Je crois néanmoins pouvoir dire que le chef d’établissement que je suis -expérimenté je l’avoue- est parfois inquiet, mal à l’aise, mais aussi le plus souvent serein malgré tout face à ce flot d’angles morts que je découvre, comme souvent, en m’appuyant sur un bon sens et une exigence qui sont des piliers rassurants. Ils constituent une boussole, celle qui donne du sens à ce que doit rester l’école en temps de crise. Lieu de transmission des savoirs, de l’émancipation, de la construction de la citoyenneté et de la vie, tout cela constitue une direction, un horizon afin que les personnels, les lycéens, étudiants, leurs familles, mais aussi les partenaires du lycée sentent, ressentent que le bateau n’est pas ivre, mais navigue, malgré des eaux tumultueuses, vers des temps plus apaisés.

Vaccination: un nouveau clivage qui pourrait fracturer l’école?

Je voudrais dire un mot à l’intention de tous les acteurs de mon établissement, et à travers eux, à toutes celles et ceux pour qui l’école est un lieu qui a encore quelque chose à dire à notre démocratie. Aux enseignants et personnels, dire à nouveau que le mot de communauté éducative en cette rentrée aura encore davantage de sens que lors des mois passés. Davantage de sens car au-delà des fractures sociales, éducatives, numériques que nous avions repérées, celle de la vaccination en est une nouvelle. Le débat est légitime mais ne doit pas être clivant au point de fracturer la vie de nos établissements.

Dire aussi que chacune et chacun a plus que jamais sa place et son rôle éminent à jouer dans la rencontre avec les jeunes et leur avenir. Concernant les nouveaux élèves d’abord, le chef d’établissement que je suis, comme de nombreux autres, y est attentif au plus haut point afin qu’ils se sentent reconnus, accompagnés, écoutés et nourris sur le plan pédagogique et éducatif. Concernant les familles, je souhaite dire que les jeunes qui viennent se construire au lycée seront accueillis dans des conditions qui allient sécurité sanitaire et éducative. Communiquer, c’est dire, c’est être honnête et franc. À tous les parents, qui sont des acteurs incontournables de la vie des établissements, je le leur dois, les établissements leur doivent cela. C’est ainsi que la confiance sera au rendez-vous. 

Concernant les acteurs publics, administrations, je sais que nous partageons les mêmes ambitions, le poids des incertitudes, les succès aussi. Parce que nous avons le bien commun comme ADN partagé, je sais que le travail quotidien est ainsi plus aisé.

Informer la communauté éducative avant les médias

Je m’adresse enfin aux responsables politiques en charge de l’essentiel: faites de la subsidiarité une démarche positive et non l’occasion de donner parfois le sentiment de “botter en touche” en transférant de nouvelles incertitudes, vos propres incertitudes. Dans une démocratie mature, et c’est ce que nous tentons de faire avec “nos jeunes”, il faut considérer chaque pièce du puzzle comme un acteur plein et entier. Respecter chaque acteur, c’est aussi considérer en 1er les personnes qui doivent être destinataires de l’information avant qu’elle ne soit livrée en primeur aux médias. Ce travers qui est devenu une mauvaise habitude est une faute. Reconnue et corrigée, elle serait pardonnée!

La période qui s’ouvre ne sera pas aisée. Sera-t-elle anxiogène? Cela dépend de nous toutes et tous. Les incertitudes seront-elles plus pesantes? Je ne le crois pas, pour peu que nous soyons pleinement associés, co-constructeurs de cette rentrée qui ne peut se faire sans les chefs d’établissements, ni leurs équipes! Cela peut sembler audacieux, mais certainement le gage d’une rentrée certes encore singulière, mais riche d’envies, de sens et d’ambitions pour l’école!

 

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