Rentrée scolaire : on a classé les films autour de l’école, du pire au meilleur
22. Les Choristes de Christophe Barratier En flattant une nostalgie des plus rances, Les Choristes offre à la France conservatrice une parfaite image d’Épinal de l’école. Difficile d’imaginer plus agaçant que les films infantilisants sur l’enfance,...
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22. Les Choristes de Christophe Barratier
En flattant une nostalgie des plus rances, Les Choristes offre à la France conservatrice une parfaite image d’Épinal de l’école. Difficile d’imaginer plus agaçant que les films infantilisants sur l’enfance, où le surplomb condescendant réduit les protagonistes à de mignons petits garnements qu’un instituteur autoritaire (mais juste) se doit de domestiquer. Le succès du film s’accompagnera d’un double châtiment : des générations d’enfants se coltineront à l’école l’insupportable chanson du film, tandis qu’une voie royale s’ouvre au genre de la comédie d’école régressive (Le Petit Nicolas, La Guerre des Boutons, L’élève Ducobu…). Robin Vaz
21. Le Cercle des poètes disparus de Peter Weir
“Ô Capitaine ! Mon Capitaine !” : cette réplique synthétise l’idée la plus conformiste que l’on puisse se faire de l’émancipation adolescente. Exit les voyous magnifiques à la James Dean, ici, les jeunes insolents vouent allégeance à un prof vaguement exubérant (sa grande leçon libertaire : carpe diem) et se réunissent dans une grotte pour se lire des poèmes en vêtements du dimanche. On a beau essayer de projeter un sous-texte homo à ce récit d’apprentissage aseptisé, rien n’y fait, il reste cet assommant pensum mielleux qu’on dirait tout droit sorti d’un fantasme de prof puritain. RV
20. Le Péril jeune de Cédric Klapisch
Pour son 1er long métrage, Cédric Klapisch met en scène ses souvenirs de jeunesse passés sur les bancs du lycée Rodin, à refaire le monde avec ses amis dans l’insouciance des années 1970. Dix ans après leur année commune de terminale, Maurice, Alain, Bruno et Léon se retrouvent et évoquent leurs souvenirs du temps des 1ers joints et des émois secrets. Le cinéaste relate au rythme des riffs kitsch de Ten Years After, les expériences d’une jeunesse pétrie de clichés dont les personnages sont trop souvent réduits à des simples échantillons sociaux. Arnaud Combe
19. La Journée de la jupe de Jean-Paul Lilienfeld, Esprit Rebelle de John N. Smith
Les deux films relatent le parcours d’une professeur confrontée à une classe d’adolescents dissipés et provocants issus pour la plupart du milieu populaire. Pour assurer l’épanouissement intellectuel de leurs élèves, Isabelle Adjani et Michelle Pfeiffer devront recourir à des méthodes peu orthodoxes. Pétris de clichés, les films ne proposent qu’un saupoudrage de réflexion partiale sur la jeunesse de banlieue et n’offrent qu’une vision grossière de la réalité sociale. Le discours alarmiste du film métaphorisé par la prise d’otage dans La Journée de la jupe ne parvient jamais à être constructif. AC
18. La saga Harry Potter
Le succès colossal de la saga Harry Potter tient sans doute à la brillante idée de son autrice de déployer l’imaginaire fantastique de la magie au sein d’un récit d’apprentissage à l’école, jouant ainsi au maximum avec l’identification des jeunes spectateurs. Malheureusement, une vaste entreprise d’aseptisation vient vider les protagonistes de toute aspérité pour en faire des enfants modèles agaçants (le désir : grand absent de ces huit films qui ne comptent que deux pauvres baisers). Plus encore que les dragons et les mages noires, ce sont peut-être ces enfants de papier qui sont les plus invraisemblables dans Harry Potter. RV
17. Être et avoir de Nicolas Philibert
Dans Être et avoir, Nicolas Philibert documente durant deux trimestres l’éducation en formation de treize enfants regroupés dans une classe unique d’un village reculé du Puy-de-Dôme. M. Lopez, instituteur paternaliste, éveille la curiosité des enfants par différents moyens d’apprentissage. La naïveté de cette troupe scolaire donne lieu à d’irrésistibles moments comiques dans un film souvent bouleversant. AC
16. Les Disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque
Dans ce film populaire de l’entre-deux-guerres, l’école se transforme en vaste territoire de jeu de pistes alors que des disparitions se multiplient et qu’un énigmatique visiteur nocturne est entraperçu. Tout le charme du film de Christian-Jaque repose sur sa manière de faire de l’école le lieu d’une grande aventure épique, voilée d’une mystérieuse atmosphère conspirationniste. À noter que l’immense réalisateur Erich von Stroheim y tient un rôle important. RV
15. Entre les murs de Laurent Cantet
Palmé en 2006, Entre les murs est une adaptation du roman de François Bégaudeau, qui interprète lui-même, dans le film, le rôle du professeur de français autour duquel tout le long métrage s’organise, sans qu’on ne sache rien de sa vie personnelle et de son regard sur le métier d’enseignant. Le film arbore sans ambages les heurts verbaux entre ce professeur et sa classe de quatrième d’un collège parisien du XXe arrondissement pendant toute une année scolaire. Si Entre les murs entend mettre à jour le hiatus entre les classes populaires et le monde auquel l’école devrait leur permettre d’accéder, il tient garde de ne pas dévoiler les coulisses des jeunes protagonistes (et des professeurs) et préfère situer sa guerre de parole entre quatre murs. AC
14. Au-revoir les enfants de Louis Malle
Avec Lacombe Lucien, Au revoir les enfants compose un dyptique qui met la France face à son histoire (avec sa grande hache). Louis Malle y dissèque de façon on ne peut plus personnelle l’antisémitisme à hauteur d’enfant à partir d’un souvenir de jeunesse. Lion d’or à Venise, le film confronte Julien, pensionnaire d’un collège religieux dans une France occupée de 1944, à la perte de l’innocence et la découverte de l’injustice lorsqu’arrive Jean Bonnet alias Jean Kippelstein un collégien secret qui éveille sa curiosité. AC
13. Breakfast Club de John Hugues
Teen-movie culte des années 1980, Breakfast Club s’intéresse à l’école comme une grande fabrique d’archétypes (que le cinéma aura largement contribué à créer). Alors qu’une gothique, un sportif, un intello, un voyou et une fille à papa sont réunis, le temps d’une retenue, le film creuse ce bref intervalle temporel pour peu à peu estomper les oppositions et faire craquer le vernis social qui recouvre leurs interactions. Ce programme narratif deviendra lui-même un archétype du film d’école, dont certains cinéastes s’empareront et déplaceront avec talent, comme Yann Gonzalez dans ses Rencontres d’après minuit. RV
12. If… de Lindsay Anderson
Sorti en 1968, If… est alors l’un des films les plus en prise avec son présent. Un lycée britannique devient le lieu de l’insurrection libertaire qui enflamme la jeunesse européenne de l’époque. D’une acuité politique rare, le film met en scène l’éveil de l’homosexualité d’un jeune ado, tout en s’attaquant tous azimuts au conservatisme, à l’armée et la religion. Enfin, son final très référencé rend hommage au plus beau film d’école de l’histoire du cinéma (cf. le haut du classement)… RV
11. Les Beaux Gosses de Riad Sattouf
Trop nombreux sont les films d’école à lisser les figures enfantines et adolescentes au profit d’une image consensuelle et proprette de gentilles petites têtes blondes. Toute la réussite de la comédie des Beaux Gosses consiste à prendre à rebours cette logique pour se concentrer sur ce que le corps adolescent a de plus ingrat. En plus d’être l’une des comédies françaises teen les plus drôles de ces dernières années, le film aura révélé l’un des meilleurs acteurs de sa génération : Vincent Lacoste, qui débarque dans le cinéma français affublé d’un horrible pull en laine et d’une coiffure impayable. RV
10. Noce blanche de Jean-Claude Brisseau, La Belle Personne de Christophe Honoré
La relation entre un élève et son enseignant est un facteur clé de la réussite scolaire. Certes. Mais ces rapports conduisent parfois à des liaisons interdites. C’est le cas de l’amour interdit que vivent Bruno Kremer et Vanessa Paradis dans Noces blanches de Jean-Claude Brissaut. Bruno Kremer joue le rôle d’un professeur de philosophie qui s’enferre dans une relation amoureuse avec son élève Mathilde en situation d’échec scolaire en raison d’une existence désordonnée.
Dans La Belle Personne, sorti la même année qu’Entre les murs, Christophe Honoré propose une lecture contemporaine du 1er roman moderne La Princesse de Clèves. Situé dans la haute sphère bourgeoise parisienne, La Belle Personne dévoile la lumineuse Léa Seydoux dans le rôle de la princesse Junie, qui se retrouve plongée dans une nouvelle classe dans laquelle plusieurs de ses camarades s’enamourent très vite d’elle. Après avoir accepté les avances d’Otto, elle est confrontée au grand amour, celui de Nemours, son professeur d’italien. La passion qui naît entre eux sera vouée à l’échec. Junie s’obstine à refuser le bonheur de peur qu’il ne se sauve. AC
9. La Mauvaise éducation de Pedro Almódovar, Les Risques du métier d’André Cayatte
Pedro Almódovar signe avec La Mauvaise Éducation un pur film noir sur les abus pédophilique dans l’école catholique traditionnelle, qui offre une éducation marquée par l’interdiction et l’emprisonnement intellectuel et conduit à une inexorable frustration sexuelle. Dans ce récit torve, le cinéaste madrilène met en scène, dans l’Espagne franquiste des années 1960, Ignacio et Enrique, deux pensionnaires d’une institution religieuse dirigée par le père Manolo. Les deux amis découvrent des sentiments aussi mélangés que la peur ou l’amour jusqu’à ce qu’Enrique soit exclu du collège sur intervention du redoutable père Manolo. Celui-ci, éperdument amoureux d’Ignacio, devient leur bourreau psychique et sexuel et n’hésite pas à exercer sur les adolescents une véritable torture physique pour faire régner l’ordre.
À rebours des abus commis par le corps professoral, Les Risques du métier (1967) d’André Cayatte relate le mensonge d’une jeune fille qui explique avoir subit les violences sexuelles de son instituteur joué par Jacques Brel. S’il pâtit d’un manichéisme trop souligné et d’un jeu d’acteur trop appuyé, le film documente justement les méandres de la justice en matière de pédophilie “scolaire”. AC
8. High School de Frederick Wiseman
Pour son deuxième documentaire, Fredercik Wiseman choisit de poser sa caméra pendant cinq semaines au cœur de l’institut scolaire américain, la “Northeast High School” de Philadelphie, pour filmer les rencontres formelles et informelles entre enseignants, élèves, parents et administrateurs, et révéler l’idéologie et les valeurs sociales de l’école. Car si le système scolaire a pour objectif de transmettre un savoir, il est également chargé d’inculquer des valeurs sociales, d’une génération à une autre. La caméra du documentariste plantée au centre de l’interaction entre élèves et professeurs permet de comprendre comment une génération a été conditionnée au cœur d’un système éducatif à majorité blanche.
7. Les 400 coups et L’Argent de poche de François Truffaut
Le regard noir d’Antoine Doinel/Jean-Pierre Léaud demeure l’un des plus perçants de l’histoire du cinéma, où se lit toute la rage indocile de l’enfance. Avec son 1er long métrage largement autobiographique, Truffaut accompagne l’émancipation de son jeune personnage et sa quête d’affirmation identitaire, tout en atomisant l’image doucereuse de l’enfant innocent charriée par le cinéma de la qualité française. Plus de quinze ans plus tard, Truffaut retournera dans les cours d’école avec L’Argent de poche : sa bienveillance, dépourvue de toute condescendance, fera à nouveau merveille. RV
6. L’Esquive d’Abdellatif Kechiche
L’écueil principal des films de fiction se déroulant dans une école consiste à tomber dans l’illustration sociologique, où les enfants ne feraient que figurer les déterminismes et mécanismes sociaux au cœur de l’institution. Avec une direction d’acteur souveraine (qui dévoile Sara Forestier), Kechiche contourne magistralement ce piège et livre un très grand film sur la parole. Alors que des lycéens de banlieue parisienne doivent jouer en classe Les Jeux de l’amour et du hasard, l’école devient le lieu de rencontre entre la langue de Marivaux et celle de ces jeunes, où tout l’enjeu sera de parvenir à exprimer son individualité. RV
5. Carrie au bal du diable de Brian De Palma
Dans cette fable cruelle sur les affres de l’âge ingrat, Brian De Palma inverse les codes du genre horrifique en transformant son monstre Carrie en victime qui doit faire face aux brimades de ses camarades et à la tyrannie impitoyablement puritaine de sa mère. Forcée par la bigoterie de celle-ci, la jeune adolescente doit se soumettre aux préceptes religieux. La découverte effroyable de sa menstruation dans les douches d’un vestiaire lycéen devient le symbole d’une mort à venir. Alors que Carrie est invitée par un garçon au bal de promo de fin d’année, la caméra laisse apparaître les coulisses d’une farce atroce. Tâchée de sang, Carrie n’aura plus qu’à s’émanciper par le Mal. AC
4. En rachâchant de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub et Les Enfants de Marguerite Duras
“Je ne retournerai pas à l’école parce qu’à l’école on m’apprend des choses que je ne sais pas.” Dans ces paroles du petit Ernesto, toute l’insoumission farouche de l’enfance s’oppose à la pédagogie abrutissante qui présuppose que l’adulte serait le détenteur absolu du savoir. Resserré en un court métrage de 6 minutes, où toute la précision du cadrage et du découpage de Straub et Huillet touche à la perfection, le texte de Duras, Ah ! Ernesto, se déploiera dans Les Enfants, long métrage réalisé par l’écrivaine elle-même (Les Enfants) : deux films d’une profondeur inouïe sur la pédagogie. RV
3. Elephant de Gus Van Sant
Inspiré par la fusillade par deux adolescents dans le lycée Columbine en 1999 qui avait fait 13 morts, Elephant, Palme d’or et prix de la ise en scène à Cannes en 2003, suit le parcours labyrinthique de plusieurs étudiants dans un lycée de Portland au cours d’une journée, avant que n’éclate, comme un orage, l’enfer d’une tuerie menée par deux de leurs camarades, Alex et Eric, tous deux animés par un désir de revanche sociale. Le lieu, censé promouvoir le savoir et assurer l’épanouissement personnel, n’est qu’illusoire. À l’instar de leur camarade Michelle, les assaillants souffrent de l’isolement social. Elephant s’apparente à un signal d’alerte pour protéger la jeunesse des travers d’une société isolatrice et ultra-violente. AC
2. Où est la maison de mon ami ? d’Abbas Kiarostami
Les nombreux films (courts et longs, fictions et documentaires) produits par la Kanoon jusque dans les années 1990 font de l’école le lieu privilégié du cinéma de Kiarostami. L’autorité des enseignants, tout comme les dispositifs de mise en scène, se heurtent à la spontanéité irréductible des enfants : ils sont l’imprévisibilité faite cinéma. Mais loin de tout angélisme béat, l’enfance est aussi le lieu de l’adversité : l’épreuve de la peur est alors consubstantielle à l’apprentissage permettant aux jeunes personnages de faire face au monde. La justesse de ce regard, éblouissante dans Où est la maison de mon ami ?, fait de Kiarostami le plus grand cinéaste de l’enfance. RV
1. Zéro de conduite de Jean Vigo
Chef-d’œuvre anarchiste, Zéro de conduite met en scène la rébellion de l’enfance contre l’autoritarisme arbitraire du système éducatif – inaugurant de façon magistrale l’un des thèmes centraux du film d’école. L’émancipation libertaire n’y est jamais réduite au statut d’enfantillages puérils, mais participe d’un véritable être au monde. Lorsqu’une lute de polochons vire à l’insurrection et que les enfants imposent leur rythme en s’emparant du défilement de la pellicule avec un sublime ralenti, Vigo nous offre la plus belle image de l’enfance de l’histoire du cinéma. RV