Réouverture des bars et restaurants: un casse-tête pressant pour les établissements
CORONAVIRUS - “On est fermés depuis le 30 octobre. Or c’est comme une voiture qui n’aurait pas roulé depuis longtemps: des choses peuvent dysfonctionner...” Depuis le discours du 31 mars d’Emmanuel Macron, les restaurateurs et cafetiers de...
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CORONAVIRUS - “On est fermés depuis le 30 octobre. Or c’est comme une voiture qui n’aurait pas roulé depuis longtemps: des choses peuvent dysfonctionner...” Depuis le discours du 31 mars d’Emmanuel Macron, les restaurateurs et cafetiers de tout le pays ont les yeux rivés vers l’Élysée et Matignon, dans l’attente d’une date de réouverture de leurs établissements.
Dans son allocution, le chef de l’État avait évoqué la mi-mai. Une échéance qui a depuis été conditionnée par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire à l’évolution de la situation sanitaire, avant d’être rendue encore un peu théorique par le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, qui a évoqué l’horizon du 15 mai à grand renfort de précautions oratoires.
“Pour l’instant, on n’a aucune date précise”, confirme au HuffPost Hervé Dijols, le président du SNRTC (Syndicat national de la restauration thématique et commerciale), l’une des quatre organisations servant d’intermédiaires entre la profession et les autorités. Entre le secret auquel sont tenus les ministres qu’ils rencontrent et le manque d’information dont ils disposent de toute façon, le syndicaliste explique ainsi n’avoir pour l’heure aucune perspective. “On est dans la pénombre, on ne sait pas encore ce qui va advenir.”
100.000 employés manquants?
Or redémarrer tout le secteur -et ce même si cela concerne les seuls établissements qui disposent d’une terrasse, si tant est qu’ils soient tous inclus-, cela ne se fait pas en un claquement de doigts. Raison pour laquelle Hervé Dijols et ses homologues ont exigé du Premier ministre Jean Castex un “délai de prévenance” de trois semaines avant la date de réouverture.
Il y a tout d’abord le problème de la main d’œuvre. Sur un secteur qui employait avant la crise 700.000 personnes, le représentant syndical nous explique que 100.000 salariés ont été perdus de vue, désireux de trouver une activité rémunératrice en période de crise ou dont on ne sait pas s’ils reviendront une fois que les aides s’arrêteront et qu’il faudra recommencer à travailler.
Comme l’expliquait sur Europe 1 Didier Chenet, président du Groupement national des indépendants de l’hôtellerie et de la restauration, un autre syndicat, de nombreux serveurs, commis ou maîtres d’hôtel ont découvert, en un an d’activité au mieux très partielle, qu’une autre vie que celle de l’hôtellerie-restauration était possible. Et il y a fort à parier que certains employés expérimentés du secteur se sont réorientés durant les fermetures successives.
Rouvrir, oui. Mais pas à n’importe quel prix...
Vient ensuite le problème de la constitution des stocks pour les bars et restaurants qui voudront rouvrir. Beaucoup d’établissements ont soit perdu leur stock depuis le début de la pandémie, quand ils n’ont pas réussi à les écouler grâce à la vente à emporter. Il leur faut donc racheter de l’alcool, des produits frais, du matériel. À cet égard, nos voisins belges assistent par exemple une pénurie de chaufferettes, les restaurateurs souhaitant préparer leur réouverture dans un marché qui n’est pas encore prêt. Et pour les établissements qui font tout maison, nous précise encore Hervé Dijols du SNRCT, il faudra tout fabriquer avant de pouvoir accueillir à nouveau du public.
Ce qui explique une autre condition posée par les syndicats de la restauration aux autorités: stop au stop-and-go. C’est-à-dire pas de réouverture tant que le spectre d’une nouvelle fermeture plane toujours. “Lors du 1er confinement, on a eu quatre heures pour fermer”, explique Hervé Dijols. Ce qui a contraint les restaurateurs français à jeter des tonnes de marchandise, les bonnes œuvres auxquelles ils auraient pu les donner se retrouvant très vite dépassées par l’afflux massif de denrées et par conséquent obligées de les refuser. Or pour l’instant, “on n’a aucune garantie qu’il n’y aura pas de nouveau confinement en juillet, ou un peu plus tard”, poursuit le syndicaliste.
Ce qui rejoint une autre problématique pour le secteur: comment les bars et restaurants pourront-ils rouvrir? “On a fait savoir qu’on ne voulait pas entendre autre chose que le protocole qui était en vigueur jusqu’au 30 octobre”, insiste Hervé Dijols, selon qui des mesures renforcées empêcheraient mécaniquement les établissements d’être viables. “On a des seuils de rentabilité à atteindre, donc rouvrir pour ne même pas être rentable, ce n’est pas la peine.”
Quid des zones touristiques?
La rentabilité, c’est justement le nerf de la guerre dans cette vaste problématique de la réouverture des bars et restaurants. Dans le plan ébauché par Emmanuel Macron, ne seraient concernés que certains des établissements possédant une terrasse. Et aux syndicalistes, Jean Castex a tracé les contours d’une reprise totale en trois phases, chacune espacée de quatre semaines. Un délai intenable pour la profession. “Si on respecte les quatre semaines entre chaque étape, ça va emmener certains -si le point de départ est bien le 15 mai- vers des dates auxquelles la réouverture ne sera pas rentable”, insiste Hervé Dijols.
Car rouvrir ne suffit pas, il faut aussi qu’il y ait des clients pour faire tourner la boutique. Dans certaines zones du pays, sur les littoraux notamment, une fois passée la saison touristique, ou si celle-ci est trop avancée au moment de la réouverture (qui se fera en plus avec un protocole sanitaire), impossible de faire un chiffre suffisant pour garder les affaires à flot. Et donc inutile d’accueillir à nouveau du public si celui-ci ne peut plus voyager, ni prendre l’avion pour venir de l’étranger.
C’est notamment pour cette raison que les syndicats plaident pour un statut spécifique pour la ville de Paris, une ville où les bars et restaurants ne sont rentables qu’en présence de touristes. “L’an dernier, durant la réouverture de l’été, on a fait -65%”, se souvient Hervé Dijols. “Imaginons que nous rouvrions courant juin: les Parisiens vont partir en vacances, les touristes ne seront pas là,” prévient-il, lui qui avait fait le choix, à l’été 2020, de garder portes closes jusqu’à la rentrée pour ne pas fonctionner à grandes pertes pendant la période estivale. Un choix qui l’avait laissé moins durement touché que certains confrères qui s’étaient empressés de rouvrir. “L’année dernière, avec le protocole sanitaire et le manque de clientèle, il était tout simplement impossible d’atteindre le seuil de rentabilité à Paris.”
Une situation qui ajoute une dernière donnée au casse-tête de la réouverture: le besoin de maintenir un soutien différencié pour l’hôtellerie-restauration, même après la réouverture des terrasses. “On demande que les aides ne s’interrompent pas du jour au lendemain, pour soutenir ceux qui n’ont pas de terrasse, ceux qui ne vont pas pouvoir bien travailler s’ils rouvrent.” D’ici au 15 mai, il ne reste plus que quelques jours au gouvernement s’il veut accorder le délai de trois semaines réclamé par la profession. Ce qui laisse à penser que la situation va devoir se décanter rapidement.
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