TEMOIGNAGE. Arnauld Miguet : "À Wuhan, la moindre fièvre vous rend suspect"

Télé star : Vous dites être resté à Wuhan pour le meilleur et pour le pire. Êtes-vous prêt à mourir pour votre métier ?ARNAULD MIGUET : Non. Il y a des risques dans ce métier quoi qu'il arrive. Il faut les évaluer mais vous pouvez toujours...

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Télé star : Vous dites être resté à Wuhan pour le meilleur et pour le pire. Êtes-vous prêt à mourir pour votre métier ?

ARNAULD MIGUET : Non. Il y a des risques dans ce métier quoi qu'il arrive. Il faut les évaluer mais vous pouvez toujours vous retrouver au mauvais endroit au mauvais moment. Un journaliste doit avoir de la chance, être en bonne santé. J'étais dans le même bateau que les onze millions d'habitants de Wuhan et nous allions nous en sortir ensemble. J'avais de l'empathie pour eux. Gaël (son cadreur, ndlr) et moi ne sommes pas des héros, juste des journalistes qui font leur boulot. Il y avait une actualité brûlante et effrayante à Wuhan. C'était là qu'il fallait être.

En restant, vous n'étiez plus seulement un messager, vous étiez aussi le sujet des infos...

Je ne me rendais pas compte. Le rythme de travail était frénétique. Mais c'est une évolution du journalisme où de temps en temps, on vous fait parler à la première personne. Nous avons vécu une expérience incomparable. Être sollicité pour la raconter est normal.

N'aviez-vous pas peur ?

Jean-Paul Sartre a dit : "Qui n'a pas peur, n'est pas normal." Vous vous posez la question mais vous êtes là pour que les gens vous racontent des choses, pas pour avoir des états d'âme sur vous-même. Vous les avez plus tard. C'est cependant toujours anxiogène de savoir que la moindre fièvre vous rend suspect et vous expose à être embarqué dans une "clinique de la fièvre". Il fallait surtout qu'il ne nous arrive rien d'un point de vue santé car en Chine le moindre problème se soigne à l'hôpital. Et ils étaient tous réquisitionnés pour la Covid-19.

Aviez-vous toute liberté pour faire votre travail ?

En Chine, la carte de presse ne veut rien dire. Vous ne pouvez pas toujours faire ce que vous voulez, même accrédité par les autorités chinoises. Nous avons la chance que nos sujets soient diffusés en France, et non en Chine. La grande muraille numérique ne permet pas de voir ce qui est diffusé ailleurs que sur les médias autorisés en Chine. Nous étions surveillés forcément. Il fallait prévenir de nos allées et venues même si nous ne disions pas toujours exactement ce que nous allions faire. Mais nous avons pu faire des choses. Est-ce un écran de fumée ? Je ne sais pas.

Prenez-vous les informations chinoises officielles avec précaution ?

Pour un journaliste, tout est sujet à caution. Il faut essayer de tout vérifier et quand c'est impossible, le dire. Je sais que la Chine cache des choses, en révèle d'autres tardivement. C'est aussi vrai partout, même en France.

*Le livre d'Arnauld Miguet,133 jours à Wuhan, sera publié en mai dans la collection Le 1 en livre, aux éditions de L'Aube.

Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © CAPTURE D'ÉCRAN FTV Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © CAPTURE D'ÉCRAN FTV Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © © AirStyle Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © © Elysee Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © © Caméra Subjective Le monde en face : Covid : aux origines d'une crise mondiale © © Caméra Subjective