“The Witness”, le nouvel envol des Suuns
De passage à La Route du Rock en 2016, Ben Shemie et Joseph Yarmush nous prédisaient que leur musique allait prendre un virage “moins mainstream”. Venus défendre en terre bretonne leur encore krautrock et parfaitement anxiogène Hold/Still (2016),...
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De passage à La Route du Rock en 2016, Ben Shemie et Joseph Yarmush nous prédisaient que leur musique allait prendre un virage “moins mainstream”. Venus défendre en terre bretonne leur encore krautrock et parfaitement anxiogène Hold/Still (2016), les Canadiens avaient tenu parole en dévoilant deux ans plus tard un effort des plus abrupts, l’expérimental Felt, qui exploitait une multitude d’idées à leur stade embryonnaire.
Après un EP au titre idoine en 2020 – Fiction, lâché en plein reconfinement d’octobre –, le groupe revient perpétuer sa prophétie autoréalisatrice avec The Witness. Un nouvel effort qui entretient la douce rupture des musiciens avec le post-punk qui a fait le succès de leur début de carrière (notamment sur les acclamés Zeroes QC et Images du futur, leurs deux 1ers disques) revendiquant une “mentalité jazz” dans l’écriture et l’enregistrement, une démarche grossièrement incarnée ici par le saxophone entendu sur le titre Clarity censé s’intègrer dans un projet pensé pour sonner “comme une seule chanson”. Un comble, alors que celui-ci a été composé et enregistré en 2020, quand la crise sanitaire a rendu prééminent le travail en distanciel, qu’on imagine peu compatible avec un mode de composition jam – pourtant privilégié par le registre jazz que le groupe convoque.
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Intelligence artificielle détraquéeLa distance, c’est aussi celle à laquelle réfère le titre : la place de témoin, par la passivité qu’elle institue, atteste d’un écart qu’exploitent les Canadiens aussi bien dans le storytelling du disque que directement dans leur musique. Distance par rapport à la réalité déformée de la crise sanitaire et écarts modulés au vocodeur de la voix de Ben Shemie, dont le chant flegmatique atteint ici des sommets de morosité, sonnant presque comme la parole d’une intelligence artificielle détraquée.
Un constant pessimiste en signature, car la patte de Suuns demeure reconnaissable malgré son tournant stylistique, avec les mornes synthétiseurs de Max Henry (en intérimaire depuis son départ du groupe en 2018), les riffs saturés de Joseph Yarmush et les rythmiques ankylosées de Liam O’Neill : la nouvelle brique du labyrinthe mental de Suuns est définitivement posée.
The Witness (Joyful Noise Recordings/Modulor). Sortie le 3 septembre