Ultime rentrée scolaire de Jean-Michel Blanquer: un quinquennat de régressions pour l'école
Cette ultime rentrée scolaire du “quinquennat Blanquer” est marquée du sceau d’un record: celui d’un ministre qui aura tenu son poste rue de Grenelle pendant les cinq années de la présidence Macron.Nulle prétention ici de balayer l’ensemble...
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Cette ultime rentrée scolaire du “quinquennat Blanquer” est marquée du sceau d’un record: celui d’un ministre qui aura tenu son poste rue de Grenelle pendant les cinq années de la présidence Macron.
Nulle prétention ici de balayer l’ensemble des éléments, événements, décisions qui ont impacté durablement notre système éducatif sous l’action de Jean-Michel Blanquer: l’exercice serait long et fastidieux.
Pour autant, à l’aube d’une campagne présidentielle dont on peut souhaiter, contrairement à la précédente, qu’elle place l’éducation au cœur des grands enjeux de notre société pour les années à venir, il est utile de braquer les projecteurs sur au moins trois caractéristiques de la politique éducative du ministre Blanquer qui resteront comme des marqueurs d’une certaine idée de l’École.
“Je ne change rien, je change tout”
17 mai 2017: lors de la cérémonie de passation avec Najat Vallaud-Belkacem rue de Grenelle, le tout nouveau ministre Blanquer déclare: “Il n’y aura pas une énième loi ou réforme...”. Et d’ajouter vouloir engager une “démarche pragmatique” en conservant “ce qui fonctionne”. Engagement qu’il confirme le 26 mai 2017 lors de son discours au 94ème congrès de la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP): “Il n’y aura pas de loi Blanquer, j’en serai fier.”
En totale contradiction avec ses déclarations de bonnes intentions, le ministre engage aussitôt le démantèlement de la réforme des rythmes scolaires qui, au-delà de ses imperfections, garantissait à tous les élèves cinq matinées de classes hebdomadaires ainsi que l’accès gratuit à des pratiques artistiques, culturelles et sportives: une régression assumée dans la lutte contre les inégalités entre les élèves.
Il supprime de la même manière le dispositif “Plus de Maîtres que de Classes” (PDMQDC) pourtant plébiscité par les équipes éducatives et abandonne la réforme du collège qui visait notamment à remettre de la mixité sociale et scolaire dans les établissements et à proposer une seconde langue à tous les élèves dès la classe de 5ème.
L’évaluation du système éducatif est mise sous la coupe ministérielle avec la suppression du CNESCO (Conseil national d’évaluation du système scolaire), instance indépendante remplacée par le Conseil d’Évaluation de l’École dont la majorité des membres dépendent directement ou indirectement... du ministre.
Une nouvelle fois en contradiction avec ses promesses de début de quinquennat, le ministre raye d’un trait de plume une instance d’évaluation indépendante dont notre pays a tant besoin pour améliorer son système éducatif et réduire les inégalités sociales de réussite scolaire.
Au final, malgré les déclarations de bonnes intentions, il y aura bel et bien une loi Blanquer, cette loi de “L’école de la Confiance” très vite renommée “L’école de la défiance” par bon nombre d’acteurs de l’éducation, tant la méthode utilisée tout comme le contenu ont généré, souvent à juste titre, des critiques voire des oppositions.
“J’ai raison, mais vous ne le savez pas encore”
Au cours de ces cinq années, on ne compte plus les apparitions médiatiques de Jean-Michel Blanquer.
Avec, derrière l’apparente volonté d’expliquer sa politique éducative, l’implacable technique du fait accompli qui contourne l’ensemble des corps intermédiaires que sont les associations de parents d’élèves, les syndicats enseignants, les acteurs de l’éducation populaire…
Plus subtil encore: en focalisant son discours sur des représentations et des images nostalgiques d’une école idéalisée (les méthodes de lecture, le port de l’uniforme…), le ministre Blanquer a tenté de détourner l’attention de sujets de fond comme par exemple celui des classes de CP et de CE1 à 12 élèves (qui dans l’absolu peut y être opposé?).
Petit rappel s’il en était besoin: ce dispositif n’a pu voir le jour qu’en supprimant des milliers de postes dans les collèges et les lycées alors que son efficacité reste encore très largement à démontrer, comme vient d’ailleurs de le souligner dans une note d’analyse l’Institut néo-libéral Montaigne pourtant très proche du ministre Blanquer.
La mainmise ministérielle sur la liberté pédagogique des enseignants via la diffusion de guides (“petits livres oranges”) qui resteront dans les mémoires s’étend jusque dans les différentes strates de l’Institution avec des personnels régulièrement amenés, souvent au prix de leur autonomie et de leurs conceptions éducatives, à faire passer les réformes descendantes du ministre, ce qui aboutira en mai 2020 à la publication inédite d’une tribune d’une quinzaine de hauts fonctionnaires de l’Education nationale dénonçant l’autoritarisme du ministre Blanquer.
Omniprésent dans tous les médias mais évitant systématiquement les confrontations et débats pour mieux inonder l’opinion publique d’annonces sans contradiction ni contradicteur, méfiant à l’endroit des enseignants renvoyés à un statut de simples exécutants, refusant le dialogue et le compromis, adepte d’une gouvernance descendante, le ministre Blanquer pratique l’injonction et l’assertion systématiques sur l’air du “j’ai raison mais vous ne le savez pas encore”.
″Écoles et Covid-19: tout va bien, tout est sous contrôle”
Comment mieux résumer la gestion pour le moins chaotique de la crise sanitaire par le ministre Blanquer? Le 15 mars 2020, sur toutes les radios, sur tous les plateaux télé et dans tous les journaux, Jean-Michel Blanquer déclare au sujet de la crise de la Covid-19 et des mesures à prendre dans les écoles, collèges et lycées: “Nous sommes prêts”.
La réalité des faits et du vécu dans les établissements balaiera les éternelles déclarations ministérielles d’auto-satisfaction.
Uniquement préoccupé par la non-fermeture des écoles au détriment de la protection sanitaire des équipes éducatives (avec un refus réitéré de vacciner les enseignants pourtant en 1ère ligne), des élèves et des familles, le ministre a géré la crise sanitaire à coups de protocoles jamais co-construits, constamment modifiés, toujours imposés et qui ont régulièrement placé les cadres intermédiaires de l’éducation nationale, les enseignants, les élèves, leurs parents et les collectivités dans des situations d’urgence et dans des contraintes sans cesse renouvelées.
Cette volonté obsessionnelle du ministre Blanquer de tout vouloir contrôler alors que tout lui échappe se retrouve par ailleurs dans une sous-évaluation chronique des chiffres du Covid-19 au sein de l’Éducation nationale, accentuant un peu plus le décalage entre les discours du ministre et la réalité de la pandémie dans les établissements scolaires, générant une suspicion jusque dans les rangs des causementaires de l’actuelle majorité.
À ce manque d’anticipation, à cette cacophonie et à cette improvisation récurrente vient s’ajouter le camouflet infligé au ministre par le président Macron quand, le 12 juillet, ce dernier annonce qu’il y aura bien une vaccination pour les collégiens et les lycéens à la rentrée de septembre, alors que quelques jours auparavant, Jean-Michel Blanquer déclarait que la vaccination sur le temps scolaire “désorganiserait le système et diminuerait le temps d’enseignement”.
Un “quinquennat Blanquer” d’hyper-fragilisation de notre École en termes de moyens, de caporalisation des personnels, d’aggravation des inégalités et de suppression de tout dialogue social avec les enseignants comme avec les familles: pour 2022, il est grand temps de tracer un nouvel horizon pour l’École de la République, il est grand temps de rendre enfin accessible une École qui tienne la promesse républicaine de démocratisation de la réussite, autour d’orientations et de valeurs qui portent un véritable projet de société.
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