Un an après, arrive-t-on à compter correctement les malades et morts du Covid?

SANTÉ - Y’a-t-il moins de contaminations au Covid que ce que disent les chiffres officiels? Depuis près d’un an maintenant, le gouvernement publie quotidiennement le bilan de l’épidémie de Coronavirus en France. On y retrouve notamment les...

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Une femme réalise un test Covid-19 à Marseille, le 12 novembre 2020.

SANTÉ - Y’a-t-il moins de contaminations au Covid que ce que disent les chiffres officiels? Depuis près d’un an maintenant, le gouvernement publie quotidiennement le bilan de l’épidémie de Coronavirus en France. On y retrouve notamment les données des nouvelles contaminations au Covid-19 dans le pays ainsi que les décès liés à la maladie. 

Des chiffres communiqués par la Direction générale de la Santé et basés sur les remontées du terrain (hôpitaux, Ehpad, laboratoires d’analyses, etc). Mais selon le compte Twitter “Covid-Tracker”, qui suit l’évolution de l’épidémie depuis son début, le nombre de contaminations en France serait, “depuis plusieurs semaines surestimés, en raison d’un problème lors du dédoublonnage des tests”.

“Pour résumer, on a probablement pas 22.200 cas chaque jour, mais un peu moins de 20.000”, ajoute-t-il.

Des écarts constatés

Sollicité par Le HuffPost, Santé Publique France (SPF) reconnaît “des écarts entre les tests positifs remontés dans SI-DEP (service chargé de centraliser les résultats des tests anticovid et géré par SPF, ndlr) et les données terrain”. Un écart qui, selon cette même source, est bien “lié à l’étape de dédoublonnage en lien avec la pseudonymisation des données”.

“Cette étape permet d’attribuer à un même individu l’ensemble des tests qu’il effectue au cours du temps”, ajoute SPF. Mais dans certains cas, si l’identité du patient est mal renseignée par exemple - erreur dans le nom de famille ou la date de naissance -, Santé Publique France ne parvient pas établir le lien entre les deux tests. Résultat: il peut exister des doublons avec deux tests positifs pour la même personne.

Selon nos confrères du Parisien, la surestimation serait “d’environ 10%”. Le taux d’incidence national, actuellement de 229 pour 100.000 habitants, serait donc plutôt autour de 206, avec des écarts potentiels selon les départements. Des chiffres que Santé Publique France n’a pas été en mesure de confirmer ou d’infirmer auprès du HuffPost.

L’agence nationale de santé publique assure toutefois qu’à ce stade, “ces analyses montrent que cela n’impacte pas l’analyse de la dynamique globale de l’épidémie des dernières semaines”. “Nous travaillons avec tous les partenaires à la résolution de cet écart”, ajoute-t-elle, précisant qu’une fois le problème résolu, les données actualisées seront publiées “en toute transparence”.

Sous-estimation du nombre de décès liés au Covid-19 dans certains pays ?

A contrario, certains pays sont pointés du doigt pour avoir sous-estimé le nombre de décès liés au Covid-19. Comme le souligne un article de Libération, plusieurs chercheurs ont comparé le nombre de décès officiels à la surmortalité. “Il s’agit de compter le nombre de décès, toutes causes confondues, depuis le début de la pandémie, et de calculer l’excès de mortalité par rapport à la mortalité attendue”, précise Libération.

Ainsi, deux chercheurs, Dmitry Kobak de l’université de Tübingen, en Allemagne et Ariel Karlinsky, du Kohelet Economic Forum, en Israël, croient savoir que la Russie, le Tadjikistan ou encore l’Ouzbékistan ont largement sous-estimé le nombre de décès liés au Covid-19. Qu’en est-il en France, où l’on dénombrait 90.455 morts ce dimanche 14 mars ?

 

Sollicité à ce sujet, Santé Publique France indique que “la surveillance de la mortalité liée au COVID-19 ne repose pas sur le système de surveillance SI-DEP”.

La surveillance sur les décès liés au Covid-19 “est issue de trois sources”, précise cette même source. La base SI-VIC pour les décès survenus à l’hôpital, la certification électronique CépiDC de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et l’application développée spécifiquement pour les décès survenus en Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ou en ESMS (Etablissements et Services Médico-Sociaux)”.

Quid des décès survenus à domicile

Contacté par Le HuffPostGiles Pison, professeur au Muséum national d’histoire naturelle et chercheur associé à l’Ined, estime que le chiffre de 90.455 décès n’est “sans doute pas très loin de la réalité”. 

Le chercheur assure qu’il “manque encore les décès survenus à domicile”, mais qu’ils sont probablement peu nombreux”. “Des pays développés, comme la Suède, l’Angleterre ou les Etats-Unis ont fait un chiffrage, ajoute-t-il. La part des décès liés au Covid et ayant lieu à domicile est d’environ 5%”.

Giles Pison assure enfin qu’il “faudra attendre plusieurs mois et les données de l’Inserm pour faire un bilan complet des décès liés au Covid-19”. “Les certificats médicaux qui donnent les causes du décès, remplis par un médecin, sont recueillis par l’Inserm, abonde-t-il. Mais beaucoup d’entre eux ont l’habitude de les compléter sous format papier”. Selon lui, ils n’étaient que 18% en 2020 à remplir de manière électronique ces documents. Résultat, ”ça réduit la capacité du système à assurer une surveillance immédiate des épidémies”, regrette-t-il.

Giles Pison doit publier avec sa consœur France Meslé, directrice de recherche à l’Institut national d’études démographiques (Ined) les résultats d’une enquête sur les décès supplémentaires imputables à l’épidémie de Covid-19 ce mercredi 17 mars. Les deux scientifiques y analysent notamment l’impact du confinement et du port obligatoire du masque sur “d’autres causes de décès comme la grippe et les accidents de la circulation”.

À voir également sur Le HuffPost: Vue d’un drone, cette file d’attente à Los Angeles pour un dépistage du Covid-19 est impressionnante