Un festival de musique Covid-compatible cet été ? À quoi ça pourrait ressembler
MUSIQUE - “Quand tu m’oublies, je dors plus la nuit”, s’inquiète dans le morceau “Rocktambule” la chanteuse Catherine Lara qui a inauguré en 1989 les Eurockéennes de Belfort aux côtés d’un orchestre symphonique. Près de 22 ans après, le Covid-19...
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MUSIQUE - “Quand tu m’oublies, je dors plus la nuit”, s’inquiète dans le morceau “Rocktambule” la chanteuse Catherine Lara qui a inauguré en 1989 les Eurockéennes de Belfort aux côtés d’un orchestre symphonique. Près de 22 ans après, le Covid-19 est passé par là et ce sont désormais les festivals de musique qui craignent de n’être bientôt plus qu’un lointain souvenir dans les nuits estivales des Français.
Certains ont d’ailleurs d’ores et déjà exclu de déballer les scènes et stands à bières, à l’image des Solidays qui ont annoncé ce mercredi 10 février l’annulation de l’édition 2021, pour la deuxième année consécutive. Le directeur Luc Barruet n’a pas caché son scepticisme quant à la possibilité que d’autres lui emboitent le pas. Alors que le Hellfest avait déjà tiré la sonnette d’alarme face à des délais très courts, le directeur du raout de l’hippodrome de Longchamp ajoute cette semaine: “Le plein air, grande jauge debout est très peu probable cet été. La tendance est claire. Roselyne Bachelot a dit ce mercredi exclure l’hypothèse d’un été sans festival, mais qu’il y a festival et festival”.
La ministre de la Culture est attendue ce lundi 15 février pour dévoiler un plan d’urgence. Selon nos informations, elle ne devrait pas délivrer de pistes techniques concrètes en matière d’organisation, mais d’autres réunions doivent se tenir la semaine prochaine et notamment le jeudi 18 février. En attendant, les acteurs du secteur planchent sur des propositions et se projettent dans des protocoles, entre tests et sens de circulation.
Le casse-tête des gros festivals en plein air
Si les gros festivals en extérieur sont plus compliqués, c’est parce qu’ils ont tendance à se tenir debout et à générer des flux difficiles à gérer. “Les normes sanitaires ne sont pas de la même nature. Vous avez une masse de population de plusieurs milliers de personnes”, expliquait ainsi Roselyne Bachelot. Avec potentiellement à la clef aussi, une plus grande proportion de personnes désinhibées auxquelles il est plus difficile de faire respecter les consignes.
Si la ministre a déjà exclu de rendre obligatoire le passeport vaccinal, parmi les pistes qui pourraient être exploitées figure celle d’un dépistage obligatoire avant d’entrer sur le site. Proposée par le Hellfest dans sa lettre ouverte, l’idée soulève cependant plusieurs questions.
Lettre ouverte à Madame @R_Bachelot Ministre de la Culture
— Hellfest Open Air Festival (@hellfestopenair) January 18, 2021
cc @MinistereCC#hellfestpic.twitter.com/D6VZ5J0Owx
Dans le cas d’un événement sur plusieurs jours ou qui attire plus de 150.000 personnes - comme les Eurockéennes, les Vieilles Charrues ou le festival interceltique de Lorient - cela demanderait des moyens logistiques et humains importants et éventuellement des opérations de coordination avec les laboratoires locaux s’il s’agit de test PCR. Les festivaliers et les équipes devront-ils être testés tous les jours ou vivre dans une “bulle sanitaire” afin d’éviter les contaminations extérieures?
En France, le festival We Love Green a de son côté lancé un sondage auprès de son public et plusieurs questions concernent la possibilité d’un test, dont une qui demande notamment si les festivaliers accepteraient de payer plus cher un billet s’il comprenait un test.
À cet égard, les tests antigéniques, plus rapides, mais moins fiables, feraient plutôt figure de favori. Sur l’Isle de Wight, le Toogether festival, qui accueille en moyenne 20.000 personnes chaque année, a fait le choix de maintenir son édition 2021 avec une station de tests antigéniques à l’entrée. Il faudra absolument qu’il soit négatif et il sera valable pour les trois jours du festival, camping ou non.
L’exemple des petits festivals
Gage que si la taille de l’événement diminue, les enjeux de logistiques n’en deviennent que plus faciles à anticiper: au mois de septembre, le petit festival Rock in the Barn qui se déroule près de Vernon dans l’Eure avait organisé un protocole bien rodé. Au programme entre autres une jauge à 1500 personnes et pas de tests.
Sur le plan du camping, les groupes ont été priés d’espacer leurs tentes de plusieurs mètres et de respecter scrupuleusement le balisage au sol, relate le magazine Manifesto XXI. Outre les nombreux points de distribution de gel hydroalcoolique, l’organisation avait délimité des sens de circulations pour éviter les phénomènes d’embouteillage à la fin des concerts. Le port du masque était vivement conseillé et obligatoire dans certaines zones. De nombreux bénévoles ont également surveillé le respect des consignes.
Un modèle qui pourrait en inspirer d’autres. Fin décembre dans Les Inrocks, Loup Dumas, co-directeur du festival Pete The Monkey, en Haute-Normandie, indiquait une baisse de la jauge pour 2021 ”qui passera de 5000 personnes par jour à 2500″. “Avec les protocoles sanitaires, les conditions qu’on va devoir appliquer, imposer cela à plus de monde me semble être trop contraignant pour nous, comme pour les gens qui viennent au festival”, ajoutait-il.
Des expérimentations à venir
Si pour le moment, les gros festivals du secteur restent dans le flou concernant l’avenir, plusieurs expérimentations menées pourraient être sources d’inspiration. En décembre, le festival Primavera de Barcelone a permis à 500 personnes d’assister à un concert en intérieur avec test antigénique à l’entrée, port du masque (il était possible de l’enlever pour boire) mais pas de distanciation. Résultat: aucune contamination recensée. Une expérimentation que Roselyne Bachelot a dit étudier avec beaucoup de soin.
À Leipzig, en Allemagne, en août dernier, un concert avec masque FFP2, traçage des déplacements et gel hydroalcoolique fluorescent a permis de mieux cerner les surfaces touchées par les spectateurs ainsi que leur circulation. Quant au concert des Flaming Lips à Oklahoma à la fin du mois de janvier, il a tout simplement donné vie à l’expression “bulle sanitaire”. L’ensemble des spectateurs ayant assisté à l’événement à l’intérieur d’une bulle en plastique.
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En France, deux expérimentations auront lieu entre mars et avril. Le Dôme de Marseille accueillera 1000 personnes deux soirs de suite. Des places assises sans distanciation et masque obligatoire, pas de buvette et pas d’entracte, mais l’ensemble du public sera soumis à un test PCR avant et après. Les personnes positives ne seront pas exclues de l’événement, puisqu’il s’agit de mesurer la propagation du virus, “mais aussi parce que nous cherchons à définir un protocole pour les festivals, qui ne peuvent pas tester tout le monde”, indique à Made In Marseille, Vincent Estornel, médecin-urgentiste spécialisé dans la médicalisation des événements.
À Paris, on voit plus grand et différemment. Pas moins de 5000 personnes sont attendues dans les prochains mois pour un concert à l’Accor Hotel Arena. Les spectateurs devront pouvoir présenter un test PCR réalisé moins de 72 heures avant et avoir installé l’application TousAntiCovid. À l’origine de cette initiative se trouve le Prodiss, mais aussi des acteurs politiques - la mairie de Paris - et scientifiques. Le comité de pilotage comprend ainsi une virologue et un infectiologue de l’APHP. Cette fois, les spectateurs seront libres de danser, chanter et de se restaurer à la buvette librement.
Il n’est pas dit cependant que ces formules soient vraiment intéressantes pour les gros festivals de musique. Tout d’abord parce qu’elles arrivent assez tardivement dans l’agenda, mais aussi parce qu’elles ne sont pas forcément rentables. “Un festival électro ou de musique urbaine en jauge réduite et assis ce n’est pas possible. C’est comme de dire, les cinémas rouvrent, mais les spectateurs seront debout et la lumière allumée”, mettait en garde Luc Barruet cette semaine.
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