Vaccins en Israël: ce que la France peut apprendre de cette campagne
SANTÉ - Alors que dans l’Hexagone, seulement 500 personnes ont été vaccinées contre le Covid-19 en une semaine, 11% des Israéliens ont reçu la première injection. L’État hébreu a commencé à vacciner le 19 décembre 2020. En deux semaines, plus...
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SANTÉ - Alors que dans l’Hexagone, seulement 500 personnes ont été vaccinées contre le Covid-19 en une semaine, 11% des Israéliens ont reçu la première injection. L’État hébreu a commencé à vacciner le 19 décembre 2020. En deux semaines, plus d’un million de personnes ont reçu l’injection. L’État hébreu est le pays qui vaccine le plus rapidement au Monde, par rapport au nombre d’habitants.
Pour autant, est-ce un exemple à suivre et est-il possible d’aller aussi vite chez nous? Si la logistique d’Israël est difficilement reproductible à plus grande échelle, l’État hébreu pourrait bien devenir un témoin clef concernant l’efficacité réelle du vaccin Pfizer. Avec une telle avance, ce pays peut en effet aider à mieux évaluer les réactions des vaccinés.
Quelle stratégie vaccinale est déployée en Israël?
Cette campagne se fait majoritairement dans 300 vaccinodromes, des centres qu’Olivier Véran ne veut pas voir se développer en France. Elle est à destination des plus de 60 ans, en priorité. 40% d’entre eux ont reçu la première injection du vaccin, selon le ministère de la Santé israélien. En réalité, ceux qui tendent l’épaule actuellement n’ont pas tous cet âge. Pour ne pas gaspiller les doses déconditionnées qui périment dans les 5 jours, les centres vaccinaux ouvrent souvent l’accès au vaccin au plus grand nombre en fin de journée, selon plusieurs médias français et israéliens.
Confiance et communication vaccinale
L’engouement est fort en Israël. Il faut dire que la population n’est pas ménagée par la crise sanitaire. Le pays est confiné, pour la troisième fois depuis le début de l’épidémie. Ainsi, la demande d’un retour à la normale est propice à la vaccination, d’autant plus que la défiance est beaucoup moins forte qu’en France.
Plusieurs campagnes ont tout de même été lancées par les autorités pour éviter qu’un scepticisme n’apparaisse, en raison de fausses informations notamment, raconte le correspondant Santé et Science du Times of Israel, Nathan Jeffray. Le Premier ministre et d’autres personnalités se sont fait vacciner en direct à la télévision. Surfant sur cette relative confiance, les organismes de Santé publique israéliens proposent des rendez-vous directement par SMS pour se faire vacciner.
Enjeu électoral
Cette vitesse impressionnante résulte aussi et surtout d’une volonté politique particulièrement forte. Pour cette vaccination ”sans précédent dans le monde”, selon le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le gouvernement avait prévu de faire très vite. Le nombre de morts du Covid-19 est loin du sinistre bilan français mais en septembre le taux de contamination israélien était le plus élevé au monde. Sous pression, Benjamin Netanyahu promet une sortie de crise “en moins de 30 jours” et une immunité collective au printemps. Si tout se passe bien, le pays recommencerait donc une vie normale... juste avant les élections nationales du 23 mars.
Spécificités démographiques
En Israël, le système de santé est public et gratuit. L’État peut compter sur des infrastructures et une logistique parmi les plus développés au monde. La distribution est assurée par l’armée, une des plus sollicitées et entrainées au monde. C’est une des clefs de l’efficacité israélienne, qui en plus bénéficie d’une densité de population relativement forte: les neuf millions d’habitants sont plus faciles à atteindre, le déploiement est plus rapide. Ces éléments participent au succès de la campagne.
Cette stratégie vaccinale est donc difficilement transposable en France. L’organisation israélienne profite de spécificités démographiques. Avec une population de 9 millions d’habitants, les plafonds journaliers de doses produites et livrées par Pfizer suffisent largement. Habité par une volonté politique d’aller très vite, Israël distribue chaque dose reçue dans un délai très court et optimise ce plafond.
Israël privilégie la vitesse
C’est peut-être sur cet aspect que la différence entre les deux pays est la plus grande. Si la France ne dispose pas de tels atouts naturels, le pays pourrait tout de même appliquer cette philosophie. Pour l’instant, nous sommes loin de délivrer toutes les doses réceptionnées. Le gouvernement préfère rassurer et mobiliser les médecins traitants.
Une lenteur extrême qui agace élus et scientifiques : “Aller doucement et prudemment, pourquoi pas, mais 500 vaccinés? C’est une blague !” tempête l’immunologiste de l’INSERM Cecil Czerkinsky. Catherine Hill partage cet avis : “ Qu’est-ce qu’on attend? Il faut s’inspirer d’Israël et vacciner aussi vite que l’on reçoit les produits, en mettant de côté uniquement la double dose, celle destinée aux vaccinés trois semaines après la première injection” fustige la chercheuse à l’institut Gustave Roussy.
Le pari risqué de l’immunité collective vaccinale
Israël mise sur un vaccin qui en plus de diminuer l’occurrence des formes graves, réduit la transmission du virus. Pour l’instant, aucune donnée ne permet d’affirmer que les molécules de Pfizer ou de Moderna répondent à ce critère. “C’est un bon pari. Le vaccin protège et nous n’avons pas d’autres alternatives. Rien n’indique non plus que le vaccin ne peut pas participer à l’immunité collective”, commente l’épidémiologiste Catherine Hill. Pour elle, Israël a raison d’essayer face à l’urgence sanitaire.
L’immunologiste Cecil Czerkinsky est quant à lui plutôt sceptique. Il est rare que les vaccins par injection empêchent de transmettre le virus. “Une immunité collective en mars en Israël? Je n’y crois pas”, explique le chercheur. Si le pari israélien sur la transmission du virus par les vaccinés est risqué, ce sprint vaccinal sera tout de même observé de très près par les scientifiques.
Israël, nation “témoin”
″À cette vitesse, on peut s’attendre à une baisse significative du nombre de personnes hospitalisées fin février”, affirme Cecil Czerkinsky qui rappelle que c’est le but premier de ce vaccin. Ainsi, Israël donnera une idée en avant-première de l’efficacité concrète du vaccin. “C’est une expérience utile pour approcher en situation réelle la balance bénéfices-risques”, explique Jean-Louis Montastruc, membre de l’Académie des sciences. Cette notion mal connue du grand public est pourtant centrale dans les campagnes vaccinales.
Un vaccin doit apporter beaucoup plus de bénéfices qu’il ne cause de torts pour rester sur le marché. Observer Israël, c’est s’assurer que le vaccin est autant efficace que les études le montrent, et que des effets indésirables graves n’émergent pas, ou restent rarissime. En effet, avec cette masse de vaccinés, il est possible d’observer des effets indétectables en phase de tests.
“À ce jour il n’y a aucun nouvel effet indésirable en provenance d’Israël”, affirme Jean-Louis Montastruc. Il est aussi directeur d’un centre de pharmacovigilance, une instance rattachée aux CHU chargée de recenser et d’analyser les effets indésirables. Si les médecins israéliens détectent des réactions graves, nous pourrons utiliser ces informations pour renforcer la sécurité de la campagne en France, affirme le scientifique.
Un risque pour la deuxième dose?
S’il est franchement mieux réussi qu’en France, le déploiement israëlien, n’est pas parfait. Premièrement, la population arabe a moins accès au vaccin. De plus, les autorités israéliennes semblent avoir sous-estimée l’importance de garantir des stocks pour les deuxièmes doses. Selon le Time Of Israella campagne vaccinale est sur pause pendant deux semaines pour garantir que les citoyens hébreux aient bien leur deuxième injection. Un caillou sous la chaussure pour les officiels hébreux. Le directeur général de la Santé Hezi Levi déclarait le dimanche 3 janvier 2021 qu’un cinquième de la population sera complètement vaccinée à la fin du mois.
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