“We’re all here to help” : lutter contre les violences sexistes dans la musique
Dans le numéro du magazine anglais The Wire daté de mai 2023, avec en couverture Dave Lombardo, ancien batteur du groupe trash metal Slayer dont le 1er album solo est attendu le 5 mai, le journaliste américain Tony Rettman signe un grand papier...
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
Dans le numéro du magazine anglais The Wire daté de mai 2023, avec en couverture Dave Lombardo, ancien batteur du groupe trash metal Slayer dont le 1er album solo est attendu le 5 mai, le journaliste américain Tony Rettman signe un grand papier sur la scène punk et hardcore de San Diego du début des années 1990. Spécialiste de la question (il a publié plusieurs bouquins sur le sujet), Rettman évoque comment, après un concert ayant tourné au pugilat à la suite de propos racistes scandés par l’ancien chanteur débile de The Vandals, l’organisation de tels événements s’est tarie à la fin des années 1980 dans la cité du sud de la Californie, avant de repartir de plus belle sur des bases plus saines quelques temps plus tard.
Le reporter cite ainsi un certain Jason Traeger, coéditeur de Leading Edge, fanzine hardcore qui, entre deux entrevues de groupes, dénonçait déjà la violence et le sexisme du milieu et donnait des conseils pour organiser des shows ou monter un canard de façon beaucoup plus vertueuse et, déjà, inclusive : “Nous étions la jeune garde straight edge et positive, nous voulions juste que les concerts restent des moments fun”, dévoile-t-il à Tony Rettman. Straight edge, comme le mouvement protéiforme né à Washington D.C. dix ans plus tôt sous l’impulsion de groupes hardcore tel que Minor Threat, qui s’est construit en marge des excès narcotiques et alcooliques du punk, promouvant notamment un mode de vie sans drogue, sans alcool, sans discriminations.
Du label de Bob Barley Vinyle Communications à des lieux comme le Che Cafe, salle de concert aux avant-postes du veganisme et de l’inclusivité, où, selon les termes du musicien Justin Pearson, il n’y avait “pas de tolérance pour les trucs fascistes, sexistes ou homophobes, ce qui était assez unique pour l’époque”, la scène de San Diego semble ainsi avoir contribué à l’écriture d’un manifeste informel à l’usage des générations futures, pour que la pratique du rock se fasse dans un espace safe qui accueille et inclue tout le monde sans distinction de race ou de genre.
Plus de trente après, où en sommes-nous ? Si l’on en croit les témoignages publiés çà et là, dans la presse ou sur les réseaux sociaux, les femmes ne se sentent pas toujours en sécurité dans une fosse de salle de concert et un grand festival comme le Hellfest affiche encore une programmation essentiellement masculine, parmi laquelle une petite frange est accusée de flirter avec des idées fascistes nauséabondes ou se trimballe des accusations de violences sexuelles. Le groupe punk hardcore français Birds in Row a d’ailleurs annoncé la semaine dernière qu’il annulait sa venue à l’édition 2023, qui doit se tenir du 15 au 18 juin prochain : “Depuis quelques années, la position du festival sur les questions telles que le mouvement #MeToo musique ou la place des idéologies d’extrême droite sur nos scènes n’est pas suffisamment claire”, précisait la formation de Laval dans un communiqué pour justifier son refus de se produire à l’événement.
Un bel endroit pour tous·tes
Heureusement, les initiatives pour faire du rock un bel endroit pour tous·tes ne manquent pas (on en recense d’ailleurs régulièrement dans Les Inrocks). Mais quand même, il y a quelque chose d’incongru à devoir s’en féliciter, non ? Je veux dire, si même à San Diego an 1990, ou à Olympia, dans l’état de Washington, quelques années plus tard, ou même encore ailleurs, on avait déjà gagné du terrain sur toutes ces questions essentielles ? L’autre jour, j’étais au concert des Psychotic Monks, à la Maroquinerie. Le groupe est venu y présenter Pink Colour Surgery, son dernier album sorti chez Vicious Circle. Avant le début de sa tournée, iels avaient posté un message rappelant qu’il est “malheureusement inévitable aujourd’hui de devoir se positionner au sujet des comportements violents et sexistes” qui peuvent décourager certain·es de se rendre dans une salle de concert. Avant le show, les membres du groupe font même de la sensibilisation, posent les limites.
On pourrait penser qu’une salle de concert n’est pas un lieu de parlote, mais face à la violence de l’époque, à la surdité et au mépris du pouvoir, à l’omniprésence dans la rue, dans les médias, partout, des thuriféraires des pires idées de fond de bidet, n’est-ce pas une nécessité ? En tout cas, il y avait beaucoup d’amour à ce concert, et moi qui n’ai jamais expérimenté aucune appréhension à l’idée d’aller voir un groupe que j’aime sur scène, je peux dire que, d’un coup, j’ai senti qu’il était important pour certain·es d’entendre qu’iels étaient ce soir-là à leur place.
Édito initialement paru dans la newsletter Musiques du 21 avril. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !