“Years in Marble”, le nouveau cru de Raoul Vignal est une promenade en apesanteur
Longtemps basé dans la ville bouillonnante de Berlin, Raoul Vignal est revenu sur ses terres lyonnaises pour enregistrer au vert ce troisième album. À mi-chemin entre les orchestrations chaleureuses du précédent (Oak Leaf, 2018) et le dépouillement...
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Longtemps basé dans la ville bouillonnante de Berlin, Raoul Vignal est revenu sur ses terres lyonnaises pour enregistrer au vert ce troisième album. À mi-chemin entre les orchestrations chaleureuses du précédent (Oak Leaf, 2018) et le dépouillement cristallin de l’inaugural Silver Veil (2017), Years in Marble, toujours hébergé par le précieux label Talitres, trouve un équilibre assez miraculeux, et s’y tient de bout en bout en funambule éthéré.
Ce qui tisse le fil du disque, c’est d’abord son sens mélodique d’une infinie délicatesse, parcouru par le phrasé aérien de Vignal et soutenu méticuleusement par les rythmes de Lucien Chatin. Du haut de ce fil, on contemple des paysages musicaux pluvieux comme cette Angleterre impressionniste à laquelle renvoient des titres comme Coastal Town. Teintés de ce tropisme d’outre-Manche, mais aussi d’échos harmoniques plus américains, avec la sensibilité panoramique d’un Lee Hazlewood – qui compte parmi les héros du songwriter -, les morceaux caressent sans assoupir, et de leurs arrangements modestes savent toujours tirer le meilleur. Car Vignal, qui ne cherche jamais à s’imposer, en impose l’air de rien, installant une bulle de douce torpeur dans laquelle il parvient, sans la briser, à injecter ici une pointe d’acidité, là une discrète grandeur.
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Ce sont ces notes complexes qui donnent leur belle envergure à Red Fresco (sublime single) et construisent un dialogue subtil entre chant et guitare sur To Bid the Dog Goodbye. De l’accueil qu’on leur fait les yeux fermés (pour mieux les rêver ?), les chansons de Raoul Vignal n’abusent guère, et s’estompent comme un songe. Elles sont de cette eau rare qu’on ne trouve que chez les meilleurs Midlake ou Leisure Society, au creux de trésors cachés à travers les âges pop. Elles sont, surtout, l’œuvre d’un artisan en lévitation.
Years in Marble (Talitres/L’Autre Distribution)